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Coup de tête , film français réalisé par Jean-Jacques Annaud sorti en 1979.

Analyse

François Perrin joue dans l'équipe de football de Trincamp, où tout est football, où l'on roule football chez Brochard, où l'on se meuble football chez Logerand, où l'on boit football au "Pénalty" et où l'on travaille football chez Sivardière, P.D.G. de l'usine et président du club. Lors d'un entraînement, François bouscule Berthier, la vedette de l'équipe. Après un coup de gueule, il est d'abord renvoyé de l'équipe, puis congédié de l'usine où il travaille. Un soir, à la suite d'une altercation, il est chassé du café des supporters, son dernier refuge. Décidé à quitter la ville, il veut revoir une dernière fois Marie, sa petite amie. Il a un peu bu et ses adieux provoquent un scandale.

Une heure plus tard, accusé de viol, François est amené au commissariat. La victime n'est pas Marie mais Stéphanie, une jeune femme qui, avec d'autres témoins, pense reconnaître son agresseur. Deux mois plus tard, le petit club de football a fait une fantastique percée en Coupe de France. A mi-chemin du stade où doit se disputer le match, le car des joueurs se renverse et l'équipe se retrouve à court d'effectif. Bon gré mal gré, on décide donc à la dernière minute de rappeler Perrin, toujours incarcéré. Une décision que les dirigeants du club ne sont pas prêts de regretter...

Annaud n'a tourné qu'un seul long métrage deux ans plus tôt, La Victoire en chantant, un relatif échec commercial qui lui ouvre tout de même les portes d'Hollywood grâce à l'Oscar du Meilleur Film Etranger (le film représentait alors la Côte d'Ivoire). « Après avoir obtenu cet Oscar inattendu, j'ai reçu énormément de propositions de films américains. J'ai eu la prudence de les refuser, pensant que je n'étais pas assez mûr pour affronter la mécanique de la production hollywoodienne et que je devais faire au moins un deuxième film dans ma langue. Ce film était très modeste, avec un petit budget. Il est d'ailleurs le seul de mes films qui n'ait pas connu de carrière à l'étranger. »

« J'entretiens onze imbéciles pour en calmer huit cents »

Rassurons tout de suite les réfractaires au football qui n'auraient pas encore vu le film. Coup de tête ne se prétend pas être un film sur le foot, mais plutôt une comédie satirique sur le vedettariat. Son réalisateur est d'ailleurs clair sur ce point : « Coup de tête n'est pas un film sur le foot, mais sur la façon dont le succès change le regard des gens. Le héros, c'est Loana. L'intrigue aurait pu se dérouler dans le show-biz : regardez la trajectoire d'un mec comme Pierre Richard, Dieu hier et aujourd'hui totalement ignoré. Et moi ! Après le bide de mon premier film, j'étais bon pour retourner faire des pubs. Et puis, à la stupéfaction générale, j'obtiens l'Oscar du Meilleur Film Etranger et Claude Berri m'appelle à nouveau "mon chéri". » C'est avant tout un film sur la France des supporters, sur la franchouillardise d'une petite ville de province et la mesquinerie de ses notables, où le football n'est finalement que la toile de fond. Comment un bagnard, un primate, la lie de la société peut devenir intouchable, et dans quelles circonstances, tel est le véritable propos de Coup de tête. C'est donc l'aspect sociologique de ce sport qui est mis en avant et illustré dans le choc Perrin-Bourgeoisie locale.

On a parfois reproché à Annaud de donner une image négative du foot et de jeter un regard méprisant sur le sport amateur. Un argument naturel, mais en réalité peu fondé, pour trois raisons principales :

  • De par sa nature même, la comédie satirique se doit de forcer le trait, d'appuyer là où ça fait mal. Faire dans la demi-mesure serait dès lors un contresens et irait à l'encontre de l'héritage et de la source d'inspiration déjà évoqués : la comédie italienne des années 50 à 70.
  • Les situations dépeintes dans le film ne sortent pas de l'imagination du scénariste ou du réalisateur. Rappelons qu'Annaud a traîné ses guêtres dans les petits clubs amateurs pendant deux ans avant d'attaquer le tournage. Rien de ce qui est dans le film n'a été inventé. « Le notable de Province joué par Jean Bouise m'a été inspiré par des individus que j'ai croisés. J'ai réellement vu les billets de 50 francs déchirés en deux à la sortie des vestiaires et complétés seulement si un but était marqué ! ». Annaud avoue même qu'il a dû parfois adoucir le tableau...
  • Enfin, il paraît simpliste de voir dans cette peinture de la France profonde des supporters un regard univoque teinté de dédain et de mépris. On perçoit également entre les flèches lancées par Annaud une réelle empathie pour tous ses personnages. « Je vais vous étonner mais moi, les supporters excessifs et faux-culs du film, ils me touchent. »

À sa sortie, Coup de tête reçoit d'excellentes critiques dans la presse de tous bords. Annaud fait l'unanimité, ou presque, et la prestation de Patrick Dewaere est saluée comme il se doit. Mais curieusement, les spectateurs ne suivent pas vraiment. Comme l'affiche du film représente Dewaere en tenue de footballeur, le public croit aller voir un film sur le football, ce qui n'est pas vraiment le cas, comme nous l'avons déjà signalé. Maigre consolation : Coup de tête reçoit des nominations aux Césars de l'année 1979 et Jean Bouise obtient la récompense pour le meilleur second rôle masculin. En revanche, lorsqu'il sera plusieurs fois présenté à la télévision, le film obtiendra une importante audience et un excellent indice de satisfaction. Une longévité qui ne cesse d'étonner le réalisateur. « Oui, sa durée de vie est exceptionnelle. Les gens l'aiment beaucoup. Certains disent même que c'est mon meilleur film ! J'ai toujours eu le sentiment de faire un film français “traditionnel” et qui, d'une certaine manière, s'adapterait bien au format télévisuel.

Mais il a quand même rencontré un honorable succès en salles, avec environ 300 000 entrées sur Paris, malgré la grève de la télévision qui a empêché toute promotion. En plus, Patrick était à l'époque à couteaux tirés avec la presse, après avoir frappé un journaliste de France-Dimanche. » Soulignons que Patrick Dewaere, comme Delon, Belmondo, Ventura et d'autres grands comédiens, fait à cette époque une véritable guerre au petit écran. Souvent, il refuse de coopérer à quelques émissions, jugeant déloyale la concurrence de la télévision au cinéma. Une grève des comédiens survient d'ailleurs en 1978. Pendant toute une année, Dewaere reste très sensible à ce problème et va refuser de paraître à la télévision, y compris dans des émissions très populaires, comme celle de Michel Drucker, Les Rendez-vous du dimanche, où pourtant il a été invité pour défendre et présenter son nouveau long métrage.

Le film ne s'insère pas dans l'univers habituel d'Annaud. Il est intéressant de noter que Coup de tête est le seul film contemporain du réalisateur. Toutes ses autres œuvres s'inscrivent systématiquement dans un contexte historique : la préhistoire (La Guerre du feu), le Moyen Âge (Le Nom de la rose), l'entre-deux guerres (L'Amant) ou la guerre (La Victoire en chantant, Stalingrad), par exemple. Ici, il n'y a plus d'armée ni de clergé. Mais il y a le sport, nouvelle religion moderne et planétaire qui permet d'installer des "primates" comme François Perrin à la table des grands patrons plus soucieux de financer le sport que de promouvoir la culture. L'époque n'est pas le seul critère discordant. L'espace, donnée essentielle des films de Annaud, n'est pas immédiatement perceptible dans Coup de tête : en dépit des tentatives d'évasion du héros en auto-stop, le film reste une comédie rurale confinée au cadre étroit d'une petite ville de province et de ses "institutions" : le stade, l'usine, la prison. Ce n'est d'ailleurs pas tant de sa cellule que voudrait s'extraire Perrin que de cette ville qui symbolise sa claustration physique et mentale. Et quand il retrouve enfin un semblant de liberté, il n'est pas anodin de le voir insister pour regagner sa cellule. Cet acte n'est pas simplement un camouflet lancé au visage de ses soudains admirateurs, c'est aussi une manière de fuir les barreaux virtuels d'un confort factice pour ceux bien réels de la prison.

La réplique qu'il lance à Stéphanie en dit d'ailleurs long à ce sujet : « Je voudrais foutre le feu à cette putain de ville ». Son voyage en Afrique, il le fait en arpentant le caniveau de Trincamp, au contact de braves éboueurs exclus comme lui de l'ordre petit-bourgeois. Dernière particularité de Coup de tête : le texte. Les films d'Annaud contiennent généralement peu de mots. La Guerre du feu, L'Ours sont presque des films muets. Le Nom de la rose est beaucoup moins riche en dialogues que le livre d'Eco. L'Amant et Sept ans au Tibet sont aussi des films silencieux. Seules les deux premières comédies, qui dépeignent la France des bistrots et des colonies, sont bavardes. Il faut ici souligner le travail remarquable de Francis Veber et sa contribution importante au résultat final. C'est lui notamment qui est à l'origine des dialogues savoureux, des répliques devenues cultes et du retournement de situation final, une idée subtile qui participe beaucoup au charme du film. En mettant à exécution ses menaces de vengeance, Perrin se rabaisserait au niveau de ses médiocres adversaires et le spectateur perdrait tout sentiment de sympathie et d'empathie à son égard. Toute la subtilité du scénario réside donc dans le fait de laisser ses ennemis en situation de frustration de vengeance, à la fois désemparés et insatisfaits. Une idée qui aujourd'hui, avec le recul et plusieurs visionnages du film, paraît couler de source, mais qui en réalité a été le fruit de longues heures de réflexion. Pour reprendre les mots de Jean-Jacques Annaud, et contrairement au dicton populaire, « la vengeance n'est pas un plat qui se mange froid, la vengeance est un plat qui ne se mange pas. »

Distribution

  • Patrick Dewaere : François Perrin
  • France Dougnac : Stéphanie
  • Jean Bouise : Sivardière, le président du club de Trincamp
  • Michel Aumont : Brochard, le concessionnaire auto
  • Paul Le Person : Lozerand, le marchand de meubles
  • Corinne Marchand : Mme Sivardière
  • Robert Dalban : Jeanjean
  • Bernard-Pierre Donnadieu : Lucien, "la bête"
  • Janine Darcey : la secrétaire
  • Dora Doll : la religieuse
  • Dorothée Jemma : Marie
  • Maurice Barrier : Berri, le patron du café "le Penalty"
  • Hubert Deschamps : le directeur de la prison
  • Gérard Hernandez : l'inspecteur de police
  • Michel Fortin : Langlumey, l'entraîneur du club
  • Patrick Floersheim : Berthier
  • Jean-Pierre Darroussin : le photographe

Fiche technique

  • Titre : Coup de tête
  • Réalisation : Jean-Jacques Annaud
  • Scénario et dialogues : Francis Veber?
  • Musique : Pierre Bachelet
  • Durée : 92 minutes
  • Date de sortie : 14 février 1979 (France)

Source partielle : http://fr.film.wikia.com/wiki/Coup_de_t%C3%AAte sous GFDL

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