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Intolérance est un film muet américain de D.W.Griffith, sorti en 1916

Analyse

Le scénario se développe sur quatre volets, introduits par l'image leitmotiv d'une nourrice berçant un nouveau-né :

  • L'Amérique en 1914: Tout en se donnant bonne conscience en subventionnant des oeuvres de charité, un riche minotier provoque des troubles sociaux en licenciant une partie de son personnel. Un gréviste, injustement accusé d'un crime, est condamné à la pendaison. Sa fiancée tente de le sauver.
  • La Judée au temps de Jésus: Lors d'une noce à Cana, un miracle se produit. Il est l'oeuvre d'un Nazaréen, aimé du peuple mais traqué par le pouvoir en place. Il est condamné à mourir, crucifié.
  • La France au temps de Charles IX: Un catholique est amoureux d'une fille de protestants. L'extermination de ces derniers est décidée par Catherine de Médicis, qui ne tolère pas la dissidence religieuse. Le 24 août 1572, jour de la Saint-Barthélemy, a lieu un terrible massacre.
  • La Chaldée au temps de Balthazar: Babylone est la capitale d'un luxe effréné; dans ses palais se donnent de grandioses festins. Mais Cyrus assiège la ville; une fille de la montagne est blessée à mort.

Le film alterne les séquences concernant les 4 époques.
Les amoureux de la Saint-Barthélemy seront victimes de l'intolérance religieuse, comme la Chaldéenne de la guerre qui ensanglante son pays et le Nazaréen de la conjuration des pharisiens et des clercs. Seul le gréviste américain sera sauvé de l'échafaud, grâce à l'entremise de sa bien-aimée.

"Un film pour la postérité, pour la vérité, pour la beauté" : tel fut le voeu de Griffith en composant le quatuor monumental d'intolérance, cathédrale flamboyante de l'art muet.

Le précédent film de Griffith, La naissance d'une nation avait provoqué de remous aux États-unis. son succès reposait sur un malentendu : D. W. Griffith (1875-1948), en patriote doublé d'un grand cinéaste, avait voulu donner à l'Amérique sa Chanson de Roland; on lui fit grief d'avoir réveillé les vieux démons du racisme.

Pour faire taire ses détracteurs, il entreprit un film de plus grande envergure encore, mais dont la portée humaniste serait sans équivoque. Il s'inspira d'un épisode réel de la chronique judiciaire contemporaine : le procès d'un gréviste accusé à tort du meurtre de son employeur. Le film s'intitule alors Mother and the Law (La mère et la loi). il entend fustiger l'intolérance sous toutes ses formes, l'intolérance qui a « martyrisé Jeanne d'Arc... détruit la première presse... inventé les sorcières de Salem ... »

Dans une impulsion de fièvre créatrice, le cinéaste décida d'élargir ce simple fait divers aux dimensions d'une vaste fresque sociale, incluant des exemples fameux d'intolérance à travers les siècles. Autour du noyau moderne et « réaliste » vont se greffer comme autant d'amples métaphores, les spectres des guerres de Religion (le génocide huguenot au XVIe siècle), de l'effondrement de Babylone et de ce qui reste l'injustice suprême: la crucifixion de Jésus.

Trois plaies au flanc de l'histoire des sociétés, qu'il importe de conjurer à tout jamais, surtout dans le contexte d'une nation moderne où elles ont tendance à se rouvrir. D'un cas banal d'erreur judiciaire, il passe au «drame solaire de tous les âges de l'humanité ».

D'immenses décors furent édifiés (dont un d'une hauteur de cent mètres pour l'épisode babylonien), des milliers de figurants recrutés; le budget total atteignit deux millions de dollars, engloutissant les bénéfices de La naissance d'une nation et menant la firme productrice, la Triangle, où Griffith était majoritaire, au bord de la ruine.

Les audaces du réalisateur ne se limitèrent pas à cette luxuriance décorative, dont Hollywood sera, par la suite, familier. Développant les principes du montage alterné élaborés dans La naissance d'une nation, il conçoit son film comme une sorte de symphonie en quatre mouvements, entrecroisant les épisodes, sautant d'une époque et d'un lieu à un autre, multipliant les télescopages et les liaisons symboliques: au massacre des protestants répond la répression des grévistes de 1914, aux roues des chars de Cyrus celles d'une automobile vrombissante...

Il en résulte une « grêle d'images », au rythme haletant, quasi hugolien, culminant dans un admirable crescendo final, où le familier se mêle au grandiose, le quotidien au sublime. Certains n'ont voulu voir là que «tohu-bohu inexplicable» (Delluc) et « lyrisme emphatique » (Sadoul), alors que l'on y approche des « ténébreuses échappées ruisselantes » d'un Walt Whitman - auquel le leitmotiv du berceau se balançant sans fin est explicitement emprunté.

Présenté en septembre 1916, à la veille de l'entrée en guerre des États-Unis, Intolérance eut un succès médiocre. Comme le note Jean Mitry, « le moment était mal venu de prêcher la fraternité universelle, et l'oeuvre fut retirée de la circulation ». Son influence n'en fut pas moins énorme à l'étranger, sur des auteurs tels que Carl Dreyer Abel Gance ou Serguéi M. Eisenstein.

Griffith se cantonna à partir de 1918 dans le mélodrame intimiste (Le lys brisé, Le pauvre amour), la comédie fantastique (La rue des rêves, La nuit mystérieuse) et le document historique (Pour l'indépendance, Abraham Lincoln), manifestant toujours le même prodigieux sens dramaturgique et plastique. Son dernier film, parlant, The Struggle, date de 1931. Sa mort en 1948 passa inaperçue.

Distribution

  • Lillian Gish : la femme au berceau
  • Mae Marsh : la bien-aimée
  • Robert Harron : le jeune homme
  • Sam de Grasse : Arthur Jenkins
  • Margery Wilson : Brown Eyes
  • Constance Talmadge : la fille de la montagne
  • Elmer Clifton : le rhapsode

Fiche technique

  • Titre original : Intolerance
  • Réalisateur : D. W. Griffith
  • Scénario : D.W. Griffith
  • Production: Wark Producing Corporation
  • Sortie : 1916
  • Genre : Epopée historique
  • Format : muet, noir et blanc
  • Durée : 200 minutes
Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux