Recherchez sur ce site

Sommaire (edit)

Le cinéma

Liens

Développé grâce à: pmwiki.org

Changements Récents Version imprimable Edition

La Maman et la putain est un film français de Jean Eustache réalisé en 1973?.

Analyse

Se remettant difficilement d'une rupture avec Gilberte, Alexandre vit avec Marie. Oisif mais pauvre, son emploi du temps bien rempli est consacré au bavardage, avec ses amis, ses connaissances, ses maîtresses et ses ex-maîtresses. Un jour au Café de Flore, il rencontre Veronika, une infirmière.

Dernier film emblématique de la Nouvelle vague, La Maman et la Putain étonne par sa thématique décalée : alors que la société revendique une redéfinition des rapports amoureux, le film de Jean Eustache s'achève sur une très traditionnelle demande en mariage, et montre la tristesse d'une certaine "liberté sexuelle" ou encore le désespoir lié à l'interruption volontaire de grossesse. La jalousie, sentiment que chacun affecte d'évacuer, frappe à son tour chacun des personnages principaux du film.

Le jeu des acteurs, qui semble au départ un peu faux car ils récitent un texte théâtral, très écrit, très éloigné du langage parlé, aboutit pour finir à des scènes très intenses, comme le long monologue de Veronika à la fin du film, ou, un peu plus tôt, le récit de sa rupture avec Gilberte par Alexandre.

Á sa sortie, le film créera un scandale important pour différentes raisons. Son titre, pour commencer, et ses différentes affiches qui évoquent l'amour à trois ; sa thématique jugée réactionnaire par la génération soixante-huitarde : des emblèmes de la gauche sont moquées - Sartre est traité d'alcolique, Duclos de rat) - et le mot d'ordre "jouissez !" est retourné contre lui-même ; sa trivialité, enfin, dans certains dialogues et dans certaines scènes comme celle où Alexandre doit ôter un tampon périodique à Véronika.

Les personnages qui au début paraissent ternes et peu sympathiques, deviennent, en vertu même de la longueur du film, assez attachants.

Alexandre accumule les défauts: égoïste absolu, girouette sentimentale, son désespoir de perdre Gilberte ne dure que le temps d'aller croiser la route de Véronika. Romantique peu crédible, hyper complaisant envers lui-même et ses douleurs, il lâche des phrases définitives et rêve puérilement de parler avec les mots des autres car "ce doit être cela la liberté", avant de lâcher des blagues puériles. Il se montre de plus très réactionnaire avec son copain, tirant tous azimuts sur tout ce qui pourrait être assimilé à la gauche, surtout communiste.

Mais derrière cette façade de narcisse égoïste, la peur apparaît et avec elle l'humanité. Son faux romantisme devient vrai et son aveu sur sa peur de mourir, livrée à Véronika en fin d'une longue séquence de chambre est extraordinairement émouvante, tout comme celle faite dans le café… Son silence face au monologue-confession de Véronika résonne alors de manière magistrale, comme une acceptation de sa propre part d'humanité, comme, enfin, une humilité retrouvée.

Marie, la "maman" du film, semble transparente au début. D'un caractère qu'on pourrait qualifier de bonne composition, elle aime Alexandre mais le laisse libre d'aller courir ailleurs. Elle n'est pas antipathique, Marie, au contraire, seulement un peu creuse. Chez elle aussi le maquillage va céder aux événements et à la réalité des sentiments. Alternant entre tendresse "maternelle", amour sincère et jalousie furieuse, Marie atteint peu à peu une dimension qui nous touche. Elle essaie d'accéder à une grandeur dans ses relations avec Véronika qu'il serait trompeur de confondre avec une simple permissivité sexuelle de circonstance et de temps. Ses tentatives d'accueillir dans la vie d'Alexandre et dans la sienne propre une autre femme sonnent comme l'écho d'un amour bien réel pour son jeune amant.

Véronika, elle, la "putain" est le centre, l'axe du film, celle autour de laquelle peut tourner la triste java dansée par le couple Alexandre et Marie. Avec son visage pâle au maquillage contrasté, semblant sortir d'une oeuvre de Murnau, ses tresses sagement nouées derrière la tête, ses habits noirs, Véronika sert de catalyseur au couple. Alexandre finira grâce à elle par découvrir sa propre humanité et Marie la profondeur de ses sentiments.

La blonde infirmière polonaise qui couche facilement et en parle avec une franchise et une crudité qui surprend encore près de 30 ans plus tard apparaît souvent comme passive. Sa blessure secrète est sublimement exprimée dans son long monologue, si émouvant et pourtant dénué de tout pathos. Bien plus mature qu'Alexandre, pleinement consciente de qui elle est et de la spirale infernale dans laquelle elle est prise, elle se voit comme cette putain du titre, et qui correspond bien sûr au regard de la société que dénonce Eustache

Distribution

  • Jean-Pierre Léaud : Alexandre
  • Bernadette Lafont : Marie
  • Françoise Lebrun : Veronika
  • Isabelle Weingarten : Gilberte
  • Jacques Renard : l'ami d'Alexandre
  • Jean-Noël Picq : l'amoureux d'Offenbach
  • Jean-Claude Biette
  • Pierre Cottrell
  • Jean Douchet
  • Douchka
  • Bernard Eisenschitz
  • Jean Eustache
  • Caroline Loeb
  • André Téchiné
  • Noël Simsolo

Fiche Technique

  • Titre : La Maman et la putain
  • Scénario et dialogues : Jean Eustache
  • Image : Pierre Lhomme
  • Son : Jean-Pierre Ruh
  • Montage : Jean Eustache
  • Producteur: Pierre Cottrell
  • Production: Elite Films, Ciné Qua Non, Les Films du Losange, Simar Films, V.M. Productions.
  • Durée: 220 minutes
  • Noir et blanc
  • Date de sortie : mai 1973

Récompense: Grand prix du Jury festival de Cannes 1973



Original: source Wikipédia

Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux