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Les Carabiniers est un film franco-italien de Jean-Luc Godard sorti en 1963.

Ce film est dédié à Jean Vigo?.

Analyse

Deux frères, paysans, l'aîné Ulysse et le cadet Michel-Ange vivent avec leur jolie soeur Vénus et la non moins belle épouse de Ulysse, Cléopâtre. Débarquent des carabiniers, porteurs d'une "invitation" du Roi à la guerre dans laquelle est engagé le pays. Après une échauffourée avec les soldats, les deux frères hésitent à s'engager. Mais devant les promesses mirobolantes faites par les carabiniers qui leur assurent qu'ils pourront faire et prendre tout ce qu'ils veulent, ils se décident et partent.

Ce film est le cinquième long métrage de Jean-Luc Godard. Tourné rapidement (trois semaines) avec un budget très réduit, le film dénonce sur le ton d'une fable tout à la fois cruellement ironique et violemment cynique les horreurs de la guerre et constitue en cela la deuxième oeuvre politique du cinéaste, juste après Le Petit Soldat, tourné la même année.

Avec des moyens modestes, Godard réussit à recréer tout un climat de guerre et son cortège d'horreurs. Limité par ses manques en moyens matériels et humains, il compense par le montage et l'intégration de documents d'actualités ainsi que par l'affichage à l'écran d'extraits de cartes postales envoyées par les deux frères. Ce que vise Godard en priorité, au-delà de l'horreur physique de toute guerre, est le mensonge idéologique servi aux populations par les pouvoirs.

Sans ce mensonge, reposant en l’occurrence sur des promesses de possession et sans la recevabilité des destinataires, naïfs et cupides, rien sans doute ne serait possible. Cléopâtre, la mère, dresse ainsi avec sa fille une "liste des courses", commandes passées aux deux nouveaux soldats : un cheval, une robe en velours, une machine à laver, un bikini. Inventaire à la Prévert.

Le ton du film se partage continuellement entre un burlesque très primaire, style début du cinéma et une sorte de néo-réalisme décalé. Le cinéma muet est convoqué à plusieurs reprises : intertitres, visage "charbonneux" de Catherine Ribeiro qui semble à plusieurs reprises sortir d'un film de Griffith, gags, et surtout cette très belle scène poétique au "Cinématographe" où un hommage très direct est rendu aux frères Lumière via une reconstitution des effets sur le public de "L'entrée du train en gare de La Ciotat".

On y voit Michel-Ange, fasciné, tenter d'entrer littéralement "dans" le film qu'il visionne, le bain d'une femme du monde. L'humour corrosif se retrouve aussi par exemple dans cette croix blanche qui orne les uniformes et le seul char d'assaut visible, croix qui ne peut que renvoyer au drapeau de la Suisse, symbole même de neutralité et patrie de Godard.

Godard impose une distance entre son film et le spectateur à laquelle tous les artifices cinématographiques utilisés contribuent, de la fausse diction à l'omniprésence d'une bande son trop forte en passant par le refus de tout caractère positif. Le réalisateur se montre efficace dans l'utilisation des décors naturels à sa disposition : campagnes dénudées, "cités" bétonnées et vides.

Citations :

"D'abord, vous allez enrichir votre esprit en visitant des pays étrangers. Et puis vous allez devenir très riches. Vous pourrez avoir toute ce que vous voudrez (...) Y a qu'à le prendre à l'ennemi. Pas seulement des terres, des troupeaux, mais aussi des maisons, des palais, des villes, des cinémas, des Prisunics, des gares, des aérodromes, des piscines, des casinos, des théâtres de boulevards, des bouquets de fleurs, des arcs de triomphes, des usines de cigares, des imprimeries, des briquets, des avions, des femmes du monde, des trains de marchandises, des stylos, des bijouteries, des Alfa Roméo, des guitares hawaïennes, des paysages splendides, des éléphants, des locomotives, des stations de métro, des Rolls-Royce, des Maserati, des femmes qui se déshabillent..."

A la guerre, on peut "voler des appareils à sous, casser les lunettes des vieillards, casser un bras et même deux aux enfants, cambrioler des appartements, incendier des villages, voler des femmes, des pantalons chics, massacrer des innocents, dénoncer des gens, partir sans payer des restaurants" car "Oui, oui, c'est la guerre".

Distribution

  • Marino Mase : Ulysse
  • Albert Juross : Michel Ange
  • Geneviève Galéa : Vénus
  • Catherine Ribeiro : Cléopâtre
  • Jean Brassat et Gérard Poirot : les carabiniers
  • Odile Geoffroy : la révolutionnaire
  • Barbet Schroeder : le vendeur de voitures
  • Jean Gruault : le père de bébé
  • Jean Louis Comolli : le carabinier à l'anguille
  • Alvaro Gheri : troisième carabinier
  • Catherine Durante : la femme du monde
  • Jean Monsigny : un carabinier
  • Gilbert Servien : un carabinier
  • Wladimir Faters : un révolutionnaire
  • Roger Coggio et Pascale Audret : un couple dans une voiture

Fiche technique

  • Réalisation, adaptation, dialogues : Jean-Luc Godard
  • Scénario : Jean Gruault et Roberto Rossellini
    d'après la pièce Les Carabiniers de Benjamino Joppolo
  • Musique : Philippe Arthuys
  • Image : Raoul Coutard
  • Montage : Agnès Guillemot
  • Son : Jacques Maumont
  • Décors : Jacques Fabre
  • Format : Noir et Blanc
  • Durée : 78 minutes (1h18)
  • Tournage : région parisienne de décembre 1962 à janvier 1963
  • Date de sortie : 31 mai 1963
Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux