Asako I & II

De Cinéann.

Asako I & II (Netemo sametemo) film japonais de Ryûsuke Hamaguchi, sorti en 2018

Analyse critique

L’ouverture du film, qui fait office de pré-générique d’un quart d’heure, montre un coup de foudre, à Osaka, entre la tendre Asako et un brun ténébreux prénommé Baku. La mise en scène montre une poésie et une virtuosité qui font partager cette romance post-adolescente, chacune de leur étreinte étant alors une explosion de douceur.

Et puis, Baku s’en va. Pour Asako le choc est dur à encaisser, immergée qu’elle était dans leur amour fusionnel. Deux ans plus tard, à Tokyo, elle rencontre Ryohei, jeune cadre sosie de Baku, mais ne retrouve pas l'intensité émotionnelle de son premier amour.

Les hésitations qui tiraillent Asako entre ses deux hommes, l’un bon gentleman de la classe moyenne, et l’autre devenu star, et donc objet de fantasmes inaccessibles, et qui devraient représenter le nœud dramaturgique de son parcours émotionnel, ne restent qu’en surface.

L’évolution de cette fille sur plus de dix années de sa vie va davantage se faire sur la base de ses relations avec ses copines que de ses regrets d’avoir laissé filer l’homme de sa vie. Le film va alors multiplier de longues scènes de conversations, et mêmele retour de Baku, dont on peu même se demander s'il est réel ou phantasmé, est survolé avec un détachement qui laisse peu de place à l'expression des émotions. Ce retrait peut dérouter un spectateur occidental, mais montre l'état des relations entre les jeunes adultes au Japon.

Le film rappelle le shéma psychologique de Vertigo (Sueurs froides), d’Alfred Hitchcock, la dimension criminelle en moins. Scottie entamait une liaison avec Judy, improbable jumelle de Madeleine, son grand amour perdu. Dans les deux cas, on passe d’un être paré de mille vertus, peut-être trop parfait pour être vrai, à un(e) remplaçant(e) identique physiquement, mais sans l’aura de l’absent(e). Pourtant, des sentiments forts naissent dans cet écart. Le quotidien partagé engendre des liens et du désir. Le film offre ainsi une fine réflexion sur l’empreinte laissée par une passion amoureuse et le passage à une relation moins intense mais plus durable.

A la faveur de péripéties ménagées tout au long de l’histoire, le cinéaste suggère combien la rationalité, conjugale, sociale, est précaire, friable, et combien les sentiments sont réversibles et les identités, volatiles. En ce sens, le titre du film est révélateur, qui laisse croire que l’héroïne a, elle aussi, son double.

Distribution

  • Masahiro Higashide : Baku / Ryôhei
  • Erika Karata : Asako
  • Kôji Seto : Kushihashi
  • Rio Yamashita : Maya
  • Sairi Itô : Haruyo

Fiche technique

  • Titre original : 寝ても覚めても ,Netemo sametemo, « Même si je dors, même si je suis éveillée »
  • Réalisation : Ryûsuke Hamaguchi
  • Scénario : Ryûsuke Hamaguchi et Sachiko Tanaka d'après le roman Netemo sametemo de Tomoka Shibasaki, publié en 2010
  • Photographie : Yasuyuki Sasaki
  • Durée : 198 minutes
  • Dates de sortie : 14 mai 2018 (Festival de Cannes 2018)
    • France : 2 janvier 2019 (sortie nationale)
    • Japon : 1er septembre 2018
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