Inglourious Basterds

De Cinéann.

Inglourious Basterds film américain écrit et réalisé par Quentin Tarantino, sorti en 2009.

Tarantino a commencé à écrire le scénario du film plus de dix ans avant sa sortie mais, ayant des difficultés à le terminer, a réalisé Kill Bill et Boulevard de la mort avant d'achever ce projet de longue date. Le film a été tourné en France et en Allemagne à la fin de l'année 2008.

Les deux fautes d'orthographe du titre sont volontaires (Inglourious Basterds), afin de le différencier du titre anglophone d’Une poignée de salopards (The Inglorious Bastards, 1978).

Analyse critique

Pendant l'Occupation, en 1941, une voiture allemande s'approche d'une ferme tenue par Perrier LaPadite et ses filles près de Nancy. Le colonel Hans Landa de la SS, surnommé « Le Chasseur de Juifs » (The Jew Hunter) interroge alors le fermier à propos de rumeurs faisant état d'une famille de juifs qui serait cachée dans les environs. Après avoir fait pression sur lui, Landa lui fait confirmer que LaPadite cache des juifs chez lui, puis ordonne à ses hommes de faire feu en direction du plancher où ils sont cachés. La famille est assassinée, à l'exception de l'aînée, Shosanna Dreyfus, que Landa laisse finalement s'échapper, estimant qu'elle n'est plus une menace.

Au printemps 1944, le lieutenant Aldo Raine du 1er Détachement du service spécial met sur pied un commando de huit soldats juifs-américains destinés à être parachutés derrière les lignes ennemies, afin de terroriser les soldats allemands. Opérant de manière furtive, ils prennent des groupes en embuscade et massacrent systématiquement les soldats de la Wehrmacht, sans oublier de les scalper. Ils sont connus sous le nom des Bâtards (The Basterds) et ont pour politique de ne pas faire de prisonnier. Cependant, un soldat est reçu par Adolf Hitler, et lui raconte l'embuscade dans laquelle est tombée sa compagnie. Il raconte au Führer l'assassinat brutal d'un sergent à la batte de baseball par l'un des Bâtards, Donny Donowitz , surnommé l'Ours juif (The Bear Jew), et la raison pour laquelle ils lui ont laissé la vie sauve afin qu'il puisse témoigner auprès de ses supérieurs, après lui avoir gravé au couteau une croix gammée sur le front.

En juin 1944, on retrouve Shosanna, ayant changé d'identité pour s'appeler Emmanuelle Mimieux et devenue propriétaire d'un cinéma à Paris. Elle rencontre par hasard un soldat allemand féru de cinéma nommé Fredrick Zoller. Elle apprend plus tard qu'il est un sniper dont les exploits militaires l'ont fait connaître et ont été célébrés par un film de propagande nazi, La Fierté de la Nation (Stolz der Nation). Zoller, très attiré par Shosanna, convainc le Docteur Joseph Goebbels d'organiser la première dans le cinéma de celle-ci. Shosanna réalise rapidement que la présence de nombreux hauts dignitaires nazis lui donne une opportunité de venger sa famille, et elle décide, avec l'aide de son fiancé, d'organiser l'incendie de son cinéma à l'aide des nombreuses pellicules au nitrate extrêmement inflammables qu'elle stocke. Alors qu'elle est conduite de force devant Goebbels, Shosanna voit réapparaitre le Colonel Landa, affecté à la protection de la soirée, sans qu'on soit certain qu'il l'a reconnu.

Archie Hicox, Lieutenant de l'armée britannique, est convoqué par le Général Ed Fenech afin qu'il participe à l'Operation Kino (« Opération cinéma » en allemand), organisée par une espionne britannique, l'actrice allemande renommée Bridget von Hammersmark. L'opération, montée suite à l'annonce de l'organisation de la première de La Fierté de la Nation à Paris qui réunirait des nombreux officiels nazis, a pour objectif d'y infiltrer Hicox et deux des Bâtards, chacun parlant un allemand parfait qui se feraient passer pour des officiers amis de Von Hammersmark. Leur point de rendez-vous, organisé dans la taverne d'un petit village situé à quelques kilomètres de Paris, tourne mal en raison de la présence fortuite d'un groupe de soldats allemands et du Major Dieter Hellstrom de la Gestapo. Il remarque l'étrange accent de Hicox, le seul des conspirateurs n'étant pas né en Allemagne, et leur affrontement se solde par la mort de toutes les personnes présentes, à l'exception de Von Hammersmark, qui est blessée à la jambe dans la fusillade. Lorsque Raine l'interroge, il apprend que contrairement à ce qui était prévu, Hitler a l'intention d'assister également à la première, et il décide de remplacer les soldats morts par lui-même, Donny Donowitz et Omar Ulmer, se faisant passer pour des amis italiens de l'actrice. Landa enquête sur les lieux du massacre et retrouve une chaussure de femme et un autographe dédicacé par von Hammersmark à un soldat allemand.

Au cours de la première, Landa fait essayer la chaussure qu'il a trouvé à Von Hammersmark et, désormais convaincu qu'elle est une traîtresse, l'étrangle. Il fait ensuite arrêter Raine, ainsi qu'un des Bâtards, Smithson Utivich , Donny et Omar étant déjà placés dans la salle, les chevilles cerclées d'explosifs. Il propose à Raine de se rendre, et de ne pas intervenir contre leur tentative d'attentat au cinéma, en échange de l'immunité et d'une retraite dorée aux États-Unis ainsi que la citoyenneté américaine, assurée par un officier via une radio. Au cinéma, alors que le film est en train d'être diffusé, Zoller s'éclipse et va rencontrer Shosanna dans la cabine de projection. Celle-ci le repousse une nouvelle fois, et alors qu'il s'irrite de son attitude, elle lui tire dessus plusieurs fois, mais il arrive à la tuer également avant de mourir. À la quatrième bobine, un film enregistré par Shosanna est projeté à l'écran, informant les personnes présentes qu'elles vont être tuées par une juive. Au même moment, et après avoir condamné les sorties, Marcel allume un tas de films au nitrate caché derrière l'écran, qui flambe presque instantanément et met le feu au cinéma en entier. Omar et Donny, s'étant échappés de la salle avant qu'elle soit fermée, accèdent à la loge où sont placés Hitler et Goebbels et les fusillent avant de tirer au hasard sur la foule paniquée, jusqu'à que que les détonateurs placés dans leurs explosifs ne se déclenchent et soufflent l'ensemble du cinéma.

Landa et un opérateur radio conduisent Raine et Utivich jusqu'aux lignes américaines, et, conformément à l'accord passé, ils se rendent. Utivich menotte Landa pendant que Raine abat l'autre homme, à l'indignation du colonel. Conformément à sa répulsion à voir un nazi quitter son uniforme et écœuré à l'idée de voir Landa s'en sortir si facilement, Raine lui grave profondément un svastika sur le front. Ce n’est pas la première fois qu’un réalisateur tient en respect la barbarie mais personne n’ignore que Tarantino n’hésite pas à l’utiliser aussi. Qui d’autre que lui réussit à faire sourire ou rire avec une violence inouïe, tellement intolérable qu’elle en devient inconcevable alors que finalement on se doute que la guerre en vrai est encore bien pire.

Dans cette histoire, tout le monde est plus ou moins espion, plus ou moins agent double mais on ne doute jamais de qui sont les « gentils » et qui sont les « méchants ». Ce film est un western. La première scène évoque ce genre sans ambiguïté. La musique, les grands espaces, la maison isolée ne font qu’accentuer la menace qui rôde, qui pèse et ne cessera d’ailleurs d’accabler tous les personnages, ensemble ou séparément.

C’est un western, un film de guerre, un film d’espionnage et il est d’une beauté prodigieuse aussi bien dans la campagne que dans la ville ou dans ce décor de carton pâte que semble être le cinéma où une grande partie de l’action va se dérouler. Comme dans un film choral où tous les personnages se retrouvent à la fin par des pirouettes pas toujours subtiles, c’est avec maestria que Tarantino, lui, rassemble tout le monde dans ce cinéma pour y faire jouer l’épilogue. Le réalisateur nous propose une fin de rêve comme seul le cinéma d’un gamin utopiste peut l’oser, nous laissant malgré tout bizarrement abandonné, comme étourdi d’avoir réussi à nous emporter là, en faisant littéralement flamber l’écran.

Le thème du langage, sous-jacent à toute l’intrigue et portant véritablement le film, est ici remarquablement bien traité. Comme dans tous les films de Tarantino, les dialogues sont prédominants dans Inglorious, et remplissent de multiples usages : Creuser la mentalité des personnages, introduire les scènes postérieures, faire monter le suspens, notamment avant les scènes d’actions, créer un décalage humoristique. La nouveauté ici est que le langage n’est plus traité comme un moyen servant l’intrigue mais comme une fin à part entière. Ne se limitant plus à la façon de s’exprimer, Tarantino traite ici du Langage dans le sens le plus large du terme. À savoir la capacité à communiquer, sous toutes ses formes. La connaissance des langues étrangères, des us et coutumes et de l’étiquette, la maîtrise du contexte de communication, l’intelligence du sous-entendu et du mensonge, deviennent dans ce film armes subtiles et implacables, permettant d’avoir le dessus dans toute situation d’interaction. Instruments de pouvoir entre les mains de qui sait les maîtriser (Le colonel Landa), elles se retournent à la moindre erreur contre le fautif, engendrant la mort (le Lieutenant Hicox qui commande des bières sans accompagner sa demande du bon geste). La subtilité est donc de mise dans ce film truffé de chausse-trappes, où chacun joue de multiples rôles pour survivre.

Dans un tel contexte, on assiste à une étonnante et très intéressante inversion des rapports de pouvoir dans la majeure partie d’Inglorious. Les Basterds, commandos d’élite et héros proclamés du film, ont beau être des maîtres sur leur terrain, comme le démontre leur séquence de présentation au premier tiers du film, qui glorifie particulièrement leurs capacités guerrières, ils sont très vite en difficulté sortis de leur contexte de prédilection. Lourdauds, nerveux, ne baragouinant que l’anglais pour la plupart, ils virent même au ridicule quand ils doivent participer, caricatures muettes et endimanchées, à une soirée de gala nazie.

Face à eux, sur un plan diamétralement opposé, trône le génial Colonel Landa. Polyglotte cultivé, éloquent et sagace, acteur né, gentleman cosmopolite et tueur implacable, il manie avec une égale facilité le registre de l’humour et de la menace. Magistralement interprété par Christoph Waltz, c’est incontestablement lui le personnage clé du film. À l’aise dans toutes les situations, jamais pris au dépourvu, il est le Maître dans cet univers de faux-semblants, et le sait très bien. Cruel comme un chat, il prend un plaisir sadique à jouer avec ses proies, forcément désarmées et sans défense face à tant d’habileté. Presque toujours vainqueur, il commet cependant une grave erreur à la fin : Grisé par l’éclat de sa victoire, il en vient à présumer de sa toute puissance et à oublier que les mots ne sont pas tout. Face à deux brutes blasées et armées dans une forêt déserte, les paroles ne valent en effet plus grand-chose.

Un autre intérêt du film, c’est qu’il se caractérise également par son absence quasi totale de limites en ce qui concerne la ligne de conduite historique ou le genre. Le procédé présente le double avantage de ménager un suspens pour le spectateur, contrairement aux films de guerre classique, on ne sait pas comment ça va finir et de laisser la part belle à la créativité. Ceci permet à Tarantino de jouer, du cliché sans s’embarrasser des questions de ton ou de vraisemblance historique, et de traiter un film sur la seconde guerre comme on ne l'avait jamais fait. Tout y passe au culot : Il en ressort, dans de nombreuses parties du film, une incontestable énergie, une spontanéité qui tend à nous faire suivre l’action avec un regard de gosse. C’est la force de Tarantino, que de recycler les lieux communs du cinéma (le Héros, le duel, la vengeance…) en réussissant à adopter à la fois un certain recul par l’humour et le décalage.

Distribution

  • Brad Pitt  : le lieutenant Aldo Raine
  • Mélanie Laurent  : Shosanna Dreyfus
  • Christoph Waltz  : le colonel Hans Landa
  • Eli Roth  : le sergent Donny Donowitz
  • Michael Fassbender : le lieutenant Archie Hicox
  • Diane Kruger  : Bridget Von Hammersmark
  • Daniel Brühl  : le soldat Frederick Zoller
  • Til Schweiger : le sergent Hugo Stiglitz
  • August Diehl : le major Deiter Hellstrom
  • Gedeon Burkhard : le caporal Wilhelm Wicki
  • B.J. Novak  : le soldat Smithson Utivich
  • Omar Doom : le soldat Omar Ulmer
  • Sylvester Groth : le docteur Joseph Goebbels
  • Julie Dreyfus : Francesca Mondino

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Fiche technique

  • Titre français et original : Inglourious Basterds
  • Titre au Québec : Le Commando des bâtards
  • Réalisation : Quentin Tarantino
  • Scénario : Quentin Tarantino
  • Production : Lawrence Bender, Erica Steinberg, Harvey Weinstein, Robert Weinstein
  • Société de production : Universal Pictures, The Weinstein Company, A Band Apart, Zehnte Babelsberg Film
  • Photographie : Robert Richardson
  • Montage : Sally Menke
  • Pays d'origine : États-Unis, Allemagne, France
  • Durée : 148 minutes (2 h 28)
  • Date de sortie : mai 2009 (Cannes) en salles (France) 19 août 2009
  • Le film a reçu de nombreuses récompenses et Christoph Waltz a été particulièrement honoré pour son interprétation, puisqu'il a remporté le prix d'interprétation masculine au festival de Cannes 2009 mais aussi l'Oscar, le Golden Globe et le British Academy Film Award du meilleur acteur dans un second rôle. Le film a également été en compétition officielle pour la Palme d'or au festival de Cannes et a reçu (en plus des prix remportés par Waltz) sept nominations à la 82e cérémonie des Oscars, trois à la 67e cérémonie des Golden Globes et cinq à la 63e cérémonie des BAFTA Awards.


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