L'Atelier

De Cinéann.

L'Atelier , film français de Laurent Cantet, sorti en 2017

Analyse critique

La Ciotat, été 2016. Antoine, bel adolescent mutique et solitaire de La Ciotat, cultive sa misanthropie en nageant seul dans l’eau bleu marine et contemple ses muscles dans la glace entre deux jeux vidéo guerriers. Il a accepté de suivre un atelier où quelques jeunes une demi-douzaine de jeunes gens en échec scolaire et en phase de ré-orientation doivent écrire un roman noir avec l’aide d’Olivia, une auteure parisienne reconnue. Contrairement à ce que les jeunes lui reprochent dès la première séance, Olivia n’a pas décidé de sacrifier son été avec eux pour gagner de l’argent sur leur dos. Savoir ce qu’ils ont dans la tête et le ventre, les aider, par l’écrit, à faire resurgir le passé de leur ville et de son chantier naval fermé depuis vingt-cinq ans la motivent. Mais cette nostalgie ouvrière laisse Antoine totalement froid. Rapidement, il s’oppose à ses camarades et à Olivia, qui cherche à en savoir plus sur lui, car elle est aussi là pour nourrir sa collection de personnages pour son prochain roman. Le film ne le dit pas mais La Ciotat est aussi éternellement liée aux frères Lumière.

Laurent Cantet se passionne pour les classes sociales dans lesquelles sont enfermés les individus, et la manière dont ils se débattent pour en sortir. Avec L’Atelier, le cinéaste révèle, dans le sud de la France, d’autres jeunes, en cours d'insertion, version province: Boubacar, le plaisantin black bon enfant, Fadi le beur glandeur qui se rebelle quand Antoine l’attaque, ou Malika, fière que son grand-père immigré se soit intégré grâce aux chantiers de La Ciotat. Mais c’est bien sur Antoine que le réalisateur resserre son objectif, comme Olivia, l’intellectuelle, braque son regard sur lui.

Petit à petit se noue un lien d'attirance et de conflit entre la romancière et Antoine. Ce dernier est un peu le mouton noir du groupe, il est souvent peu coopératif, ou alors fait des propositions de texte "choquantes" pour les autres. En dehors de l'atelier, il rumine seul dans sa chambre, joue aux jeux vidéo, fréquente la bande de son cousin qui fricote avec l'extrême-droite. Olivia se rapproche de lui pour tenter d'éclaircir l'origine de son malaise et de le reprendre en main, mais aussi par une attirance érotique non dite, et peut-être réciproque. Antoine s'est aussi permis de formuler des remarques assez justes sur les romans d'Olivia ce qui perturbe celle-ci.

La mise en scène réaliste de la première partie faussement documentaire, devient baroque, et sous la lune, la mer et les rochers prennent une superbe dimension poétique. Le discours final d’Antoine, bouleversant, sur l’acte gratuit, qui évoque fortement L’Etranger de Camus résume les motivations troubles d’une jeunesse qui a le soleil dans les yeux et qui, par ennui, par dégoût, pourrait tuer. Une jeunesse que Laurent Cantet, observe et écoute, sans la juger.

« Marina Foïs veut s’approprier Antoine parce qu’il est jeune, beau et capable de s’exclure lui-même d’un groupe au nom de l’idée qu’il se fait de lui-même. Mais aussi parce qu’il apporte la chair fraîche nécessaire à la vitalité des histoires que la romancière peine à mettre au monde. Cette ambiguïté finit par envahir le film, à infléchir sa composition de portrait de groupe pour en faire une œuvre beaucoup plus troublante. » Thomas Sotinel, Le Monde, 23 mai 2017

Distribution

  • Marina Foïs : Olivia
  • Matthieu Lucci : Antoine
  • des acteurs non professionnels ou débutants...

Fiche technique

  • Réalisation : Laurent Cantet
  • Scénario : Laurent Cantet et Robin Campillo
  • Montage : Robin Campillo
  • Production : Denis Freyd
  • Durée: 113 minutes
  • Dates de sortie : 22 mai 2017, Festival de Cannes 2017, section Un certain regard
    • Sortie nationale : 11 octobre 2017
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