Un homme et une femme

De Cinéann.

Un homme et une femme film français réalisé par Claude Lelouch et sorti en 1966.

Analyse critique

En 1965, Claude Lelouch réalisa Les Grands Moments qui fut un échec. « Quand ça va mal, dit-il, je vais à Deauville. C'était le 13 septembre... je marchais donc sur la plage et très loin - il faisait très mauvais ce jour-là - j'ai vu une femme qui marchait aussi. De très loin, elle semblait très très belle. Et il y avait une petite fille qui jouait à côté d'elle. J'essayais de me rapprocher de cette dame... et tout en me rapprochant j'essayais de trouver une explication... Les idées venaient comme ça, et, tout en marchant, j'écrivais l'histoire d'Un homme et une femme »

Anne Gauthier, scripte girl au cinéma, inconsolable depuis la mort de son mari cascadeur Pierre, rencontre à Deauville, en allant chercher sa fille à la pension, un coureur automobile, Jean-Louis Duroc, dont la femme s'est suicidée par désespoir. Jean raccompagne Anne à Paris. Tous deux sont endeuillés, et tous deux ont un enfant. C'est l'histoire d'un homme et d'une femme qui s'aiment, se repoussent, se retrouvent et s'aiment encore.

Sur ce scénario ultra-mince, la probabilité de réaliser un navet à l'eau de rose était élevée. Et pourtant Lelouch nous livre là son meilleur film, que même ses détracteurs accepte pour chef-d'œuvre. Des dizaines d'années après, ce qui tranche c'est le sentiment de modernité pour un film qui date de 1966, étonnant pour un cinéaste dont beaucoup de critiques raillent aujourd'hui le classicisme. Cette modernité est liée à sa méthode, et en partie la conséquence de contraintes techniques et budgétaires. Lelouch, n'ayant pas assez d'argent, tourne les extérieurs en couleurs et les intérieurs en noir et blanc. Le montage et les alternances de noir et blanc et de couleurs jouent alors habilement avec les méandres du temps et de la mémoire émotive, entre le présent et le bonheur passé qui ressurgit sans cesse.

Claude Lelouch donne la sensation de voir une histoire d'amour naître et vibrer , d'en ressentir le moindre battement de cœur ou le moindre frémissement de ses protagonistes, comme si la caméra scrutait les visages et les âmes. L spectateur est ému par une main qui frôle une épaule si subtilement filmée, par le plan d'un regard qui s'évade et s'égare, par des mots hésitants ou murmurés. Par une photographie aux accents picturaux qui sublime Deauville, avec une lumière nimbée de mélancolie, des paysages qui cristallisent les sentiments de Jean-Louis et d'Anne.

Le film doit beaucoup aux deux grands acteurs Anouk Aimée/ Jean-Louis Trintignant, au charme de leurs voix, à la maladresse des premiers instants cruciaux d'une histoire d'amour quand le moindre geste, la moindre parole peuvent tout briser. Et puis ces plans fixes, de Jean-Louis dans sa Ford Mustang, véritable personnage du film, notamment lorsqu'il prépare ce qu'il dira à Anne après qu'il ait reçu son télégramme.

Le film ne serait pas aussi brillant sans la musique éternelle de Francis Lai. Francis Lai n'avait, à l'époque, composé que des musiques de chansons. Il rencontre Pierre Barouh qui lui présente Claude Lelouch. Un homme et une femme marque les débuts de Francis Lai dans le domaine de la composition pour le cinéma. La caractéristique originale de cette musique de film est qu'elle a été écrite par Francis Lai en totalité avant le début du tournage. Faute de moyens, Francis Lai utilise un tout petit orchestre. Séduit par cette partition, Claude Lelouch en fait un vrai personnage du film, adapte les séquences et le montage à la musique et surtout réduit au minimum les dialogues et remplace, dés qu'il le peut, des paroles évidentes par une musique qui parle à la place des personnages.

Alors que Claude Lelouch a tourné sans avoir de distributeur, sans même savoir si son film sortirait un jour. Il signe une histoire intemporelle, universelle avec un ton très personnel et poétique. La plus simple du monde et la plus difficile à raconter. Celle de la rencontre d'un homme et une femme, de la rencontre de deux solitudes blessées. Il prouve que les plus belles histoires sont les plus simples et que la marque du talent est de les rendre singulières et extraordinaires. Il obtient la palme d'or à Cannes en 1966, l'oscar du meilleur film étranger et celui du meilleur scénario et 42 récompenses au total et aujourd'hui encore de nombreux touristes viennent à Deauville grâce à « Un homme et une femme », le film, mais aussi sa musique mondialement célèbre. Vingt ans après, Claude Lelouch tourna une suite « Un homme et une femme 20 ans déjà » réunissant à nouveau les deux protagonistes, mais sans retrouver le succès..

Distribution

  • Anouk Aimée : Anne Gauthier
  • Jean-Louis Trintignant : Jean-Louis Duroc
  • Pierre Barouh : Pierre Gauthier
  • Valérie Lagrange : Valérie Duroc
  • Simone Paris : La directrice de la pension
  • Antoine Sire : Antoine Duroc
  • Souad Amidou : Françoise Gauthier
  • Henri Chemin : L'autre pilote
  • Yane Barry : La maîtresse de Jean-Louis
  • Paul Le Person : Le pompiste
  • Gérard Sire : Le speaker radio
  • Gérard Larrousse, Clive Roberts : Les pilotes de rallye

Fiche technique

  • Réalisation : Claude Lelouch (également producteur, et directeur de la photographie)
  • Scénario : Claude Lelouch et Pierre Uytterhoeven
  • Musique : Francis Lai (compositeur) et Pierre Barouh (parolier et interprète, avec Nicole Croisille, de Un homme et une femme, Samba Saravah, À l'ombre de nous, Plus fort que nous, parolier d'Aujourd'hui c'est toi)
  • Montage : Claude Barrois
  • Format : couleur avec des séquences en noir et blanc
  • Durée : 102 minutes
  • Date de sortie : France 27 mai 1966
  • La fin du film vidéo sur Dailymotion

Récompenses

  • Palme d'or du Festival de Cannes 1966 (ex aequo avec Ces messieurs dames de Pietro Germi)
  • Oscar du meilleur film en langue étrangère
  • Nomination à l'Oscar du meilleur réalisateur
  • Oscar du meilleur scénario original
  • Golden Globe du meilleur film étranger
  • Golden Globe du meilleur réalisateur
  • Golden Globe de la meilleure actrice dans un film dramatique - Anouk Aimée
  • Golden Globe de la meilleure musique de film - Francis Lai


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