Hors Satan

De Cinéann.

Hors Satan film français réalisé par Bruno Dumont et sorti en 2011

Analyse critique

« Le gars » (comme l'appelle le générique) campe seul aux abords d'un village, dans un paysage de dunes et de marécages. Il ne semble n'avoir qu'une amie, « la fille », une jeune fille d'une ferme avoisinante, douce et sobrement habillée en « gothique ». Celle-ci se fait abuser sexuellement par son beau-père, et lui demande protection. Au début du film, il tue ce beau-père de sang froid. Mystique qui prie au milieu de la nature, cet ermite est aussi exorciste : une mère le sollicite pour guérir sa fille qui semble habitée par le démon. Cependant il n'est pas entièrement bon, et quand un homme tourne trop autour de sa protégée, il n'hésite pas à le tabasser.

L’homme qui erre dans les dunes dans Hors Satan, n’est pas un saint. Avec sa belle gueule ravagée, le personnage principal est un SDF qui s’est installé une petite cabane dans les dunes. Il vit de la générosité des habitants du village. Il guérit les malades, à moins qu’il ne les exorcise. Il a aussi un fusil et abat un homme qui abusait régulièrement de sa belle-fille.

Le “héros” assomme aussi à mort un gardien qui s’approchait un peu trop de la jeune femme libérée de l’emprise de son beau-père, qui est devenue sa protégée, sa disciple. Son amoureuse peut-être aussi. C’est une fille de la campagne, une brune aux cheveux en l’air qui affectionne et suit partout cet homme étrange qui ne semble pas très intéressé par la galipette mais qui n’aime pas qu’on s’en prenne à cette fille. Parfois aussi, il s’agenouille en regardant les nuages qui passent dans le ciel et elle fait comme lui.

Dumont reprend les motifs, les personnages, les thèmes des grands cinéastes chrétiens, comme Bresson, ou Dreyer (Le film a été comparé à Ordet de Carl Theodor Dreyer où un illuminé erre à travers les dunes), mais en les montrant avec un œil d’agnostique et en intégrant à son cinéma la sexualité frontale, qui ne pouvait être montrée à l’époque de ses prédécesseurs illustres.

Le montage est sec, sans fioritures, sans aucune musique, en plans larges ou très serrés, par ellipses parfois, de rares travellings, des plongées et contre-plongées. Le film est entièrement en son direct, sans aucune musique extérieure et sans aucune post-synchronisation.

La vision de Bruno Dumont n’est ni féerique, ni brutale, et en rien morale: le cinéaste n’a comme seul propos que d’offrir les outils pour appréhender le monde, jamais de le juger, ni de le corriger. Rebouteux mystérieux, ermite et vagabond, le gars n’est jamais que de passage dans la vie de ceux qu’il aide ou qu'il punit, le temps du film, comme un cinéaste, déterminé à désigner des clés pour comprendre le réel à son auditoire sans jamais les obliger à les saisir. Comme son gars, Bruno Dumont n’est que de passage, comme lui il cache son but véritable sous d’autres mots, d’autres actes, ainsi, le miracle qui constitue le centre névralgique de l’intrigue parait curieusement anodin. Il ne vaut vraiment que par ce qui l’a précédé.

Distribution

  • David Dewaele  : Le gars
  • Alexandra Lematre : La fille
  • Aurore Broutin : La routarde

Fiche technique

  • Réalisation : Bruno Dumont
  • Scénario : Bruno Dumont
  • Producteur : Rachid Bouchareb
  • Photographie : Yves Cape
  • Montage : Bruno Dumont et Basile Belkhiri
  • Durée : 110 minutes
  • Date de sortie : 19 octobre 2011
  • Prix de l'Âge d'Or 2011


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