La Planète des singes (1968)

De Cinéann.

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La Planète des singes (Planet of the Apes), film américain de Franklin J. Schaffner, sorti en 1968 et inspiré du roman La Planète des singes de Pierre Boulle.

Analyse critique

Parti en 1972, un engin spatial américain piloté par 4 humains : 3 hommes et une femme navigue dans une galaxie à une vitesse très proche de celle de la lumière. Au terme d'un voyage de 18 mois à cette même vitesse, le vaisseau amerri, pour couler rapidement, en 3978 (temps terrestre) sur une mystérieuse planète. La théorie de la relativité restreinte, qui veut que si l’on fait un voyage aller-retour à une vitesse proche de celle de la lumière, le temps passe plus vite pour ceux restés fixes, s’applique pour ces trois hommes qui, atterrissant à bord d’un vaisseau spatial sur une planète inconnue et désertique, s’aperçoivent qu’entre temps vingt siècles se sont écoulés.

L'unique femme n'ayant pas survécu à son hibernation, les trois astronautes survivants, le capitaine George Taylor, ainsi que les lieutenants John Landon et Thomas Dodge, y découvrent une peuplade d'humains primitifs et muets dominés par une civilisation de singes très évolués et dotés de la parole. Lors de leurs déplacements sur ce nouveau sol, ils sont rapidement repérés et chassés comme de vulgaires animaux, anéantis ou faits prisonniers pour les plus chanceux d'entre eux. Leur sort ne préoccupe nullement leurs assaillants, des singes doués de la parole, qui défendent leur rang de maître de la pensée. L’homme devenu bête hérite d’un statut inférieur. Bientôt, Dodge est abattu par les singes, Landon trépané et Taylor, blessé, enfermé dans une cage.

Deux chimpanzés scientifiques, Zira et Cornélius, s'intéressent de près à Taylor. Zira représente l'esprit scientifique à la recherche de la vérité à tout prix. Son fiancé Cornélius est aussi un scientifique, mais il renonce à certaines de ses idées, par crainte de représailles, par conformisme, respect des idées et de la religion en vigueur.

Le docteur Zaïus fait partie des autorités scientifiques et religieuses établies, il officie en Ministre des Sciences et de la Foi. Mais il a deviné la vérité, quant à Taylor et fait tout son possible pour nier l'intelligence des hommes qui remettrait en cause les idées, la religion et les fondements même de leur civilisation. Le professeur Zaius l’a bien compris : il cherche systématiquement à écarter les preuves de la suprématie de l’être humain qui, incapable de cohabiter pacifiquement avec ses semblables, a fini par détruire sa propre civilisation dans des temps reculés.

Taylor, aidé par Zira et Cornélius, se retrouve devant un tribunal des singes rappelant celui de l'inquisition, ou d'États totalitaires actuels. Pour prouver son intelligence, on lui demande de réciter les textes sacrés que bien évidemment il ignore. Finalement, ce sont Zira et Cornélius qui sont accusés d'hérésie scientifique et de déviationnisme. Et Taylor va être utilisé pour des expériences médicales.

Le film démontre au travers des singes les travers humains, comme le racisme ou le spécisme. Les humains sont traités comme des êtres inférieurs, potentiellement parasites ou nuisibles, comme nous le faisons avec la plupart des animaux sur notre planète. Les hommes sont accusés de vivre dans la saleté, redevenus des êtres primitifs ne se souciant que de leur survie instinctive. La religion locale emprunte quelques facettes au Christianisme avec un intéressant "Dieu a créé le singe à son image".

Les singes sont comme les hommes : pris par les feux des autorités, jouant de la violence et réduits au silence par les lois de la religion. Mais une différence fondamentale fait de l'homme un plus grand mal que le singe : son incroyable capacité à se détruire luimême. Il faut se replacer en 1968, la menace nucléaire plane toujours, même si l'heure est à la détente. Un contexte propice au fatalisme, quant à la nature autodestructrice de l'homme, qui a sûrement amené ce final de la Planète des singes, l'un des plus bouleversants de toute l'histoire du cinéma. Un final qui diffère de celui du livre, par un pessimisme plus prononcé. Autre différence avec le livre, l'évolution technologique des singes. Ceux-ci ont une civilisation d'un même niveau que les contemporains du personnage dans le livre, mais sont très en retard dans le film (pas d'aviation, de mécanismes, emprise sévère de la religion sur la science). On explique cette différence par une critique indirecte des conservateurs extrémistes américains, respectueux des écrits bibliques, stipulant que Dieu a créé l'homme pour qu'il commande aux animaux et aux plantes, et pas l'inverse.

Le sacré est désigné comme un outil politique, servant à dissimuler une vérité scientifique pour protéger un ordre établi. Les parallèles entre la société simiesque décrite et la notre sont forts, ce qui explique l'impact philosophique et de réflexion du film. Il est aujourd'hui presque inconcevable d'aller voir un film pensé pour le très grand public alignant dans une discussion plus de dix répliques, sans incursions musclées. Le film débute par une scène de traversée du désert, pendant laquelle deux des trois personnages s'affrontent verbalement, de manière très critique et fouillée. Deux points de vue opposés, avec un personnage, Taylor, qui va devoir déchanter. Il y a un effet miroir, typique de la science-fiction, à l'impact très puissant sur le spectateur. L'injustice se montre beaucoup plus apparente et sans aucun pathos quant elle est pratiquée par des singes sur un homme, alors que pratiquée par des hommes sur un autre homme, il y a toujours des justifications possibles comme le colonialisme ou la lutte contre le communisme.

La réalisation de Schaffner est très stylisée, alors qu'on a souvent reproché au cinéaste d'être trop illustratif. On a droit à plusieurs audaces, comme des zooms furtifs ou des cadrages à l'envers, Charlton Heston enjambant la caméra, allongée sur le sol, le suivant du regard. Le film insiste beaucoup sur les paysages, complètement sou-sexploités dans la ré-interprétation du Tim Burton. Par ailleurs on remarque une alternance intelligente entre les scènes parlées, le passage du tribunal, rappelant la chasse aux sorcières américaine, et les scènes d'action comme la tentative d'évasion dans le village.

Alors que, dans le film, la planète est la Terre, dans le livre de Pierre Boulle, cette planète est éloignée, mais le héros retourne sur Terre, et découvre que sur Terre également les singes ont supplanté l'homme. La portée philosophique du livre n'est pas tout à fait la même. Ce n'est pas nécessairement l'homme qui s'est auto-détruit mais il y a l'idée d'une certaine fatalité dans cette évolution qui amène les singes à devenir supérieurs aux hommes. On peut aussi dire que le film rend l'homme responsable de sa décadence alors que le livre faisait plus du singe le responsable de son évolution. En quelque sorte le film est moins misanthrope et plus anthropocentrique.

Suites et remakes

La Planète des singes engendra de nombreuses suites et films dérivés. Tout d'abord Le Secret de la planète des singes (1970). Fermement opposé à une suite, Charlton Heston accepta pourtant de revenir par amitié envers le producteur Richard D. Zanuck, qui avait pris le risque de faire le premier film. Refusant toutefois de toucher un cachet pour ce petit rôle, il reversera l'argent à l'école de son fils. Il demanda également à ce que son personnage meure, pour ne pas tourner d'autres volets. Cela se traduit par l'explosion de la planète, les trois films suivants se déroulant avant le premier.

Le succès étant au rendez-vous, la Fox tourne Les Évadés de la planète des singes (1971), dont les héros principaux sont Kim Hunter et Roddy McDowall. Contrairement aux deux précédents volets, l'action se déroule au présent. Suivent La Conquête de la planète des singes (1972), qui révèle comment les singes ont pris le pouvoir, puis La Bataille de la planète des singes (1973), épisode qui voit les humains et les singes vivre en paix.

En 1974, une série télévisée est créée, nommée également La Planète des singes ; elle est complètement indépendante de la série de cinq films. Faute de succès, elle s'arrête au bout d'une saison de 14 épisodes.

Enfin, en 2001, Tim Burton réalise un remake, nommé encore une fois La Planète des singes, qui donne une autre explication à l'apparition des singes. On notera que la fin de ce remake est fidèle à celle du livre, bien que transposée à Washington.

Distribution

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  • Charlton Heston (V.F : Georges Aminel) : Le capitaine George Taylor
  • Roddy McDowall (V.F : Serge Lhorca)  : Dr. Cornélius
  • Kim Hunter (V.F : Arlette Thomas) : Dr. Zira
  • Maurice Evans (V.F : Jean Martinelli) : Dr. Zaius,ministre de la Science
  • James Whitmore (V.F : Yves Brainville)  : Le président de l'Assemblée
  • James Daly (V.F : Rene Beriard) : Dr. Honorious , Ministre de la Justice
  • Linda Harrison : Nova
  • Robert Gunner (V.F : Roland Menard)  : Le lieutenant John Landon
  • Jeff Burton : Le lieutenant Thomas Dodge
  • Lou Wagner : Lucius
  • Woodrow Parfrey (V.F : Jacques Beauchey) : Dr. Maximus , Commissaire aux Affaires Animales
  • Buck Kartalian (V.F : Marc de Georgi)  : Julius
  • Norman Burton (V.F : Claude Bertrand) : Leader des chasseurs
  • Paul Lambert (V.F : Gerard Ferat) : curé

Fiche technique

  • Titre original : Planet of the Apes
  • Titre français : La Planète des Singes
  • Réalisation : Franklin J. Schaffner
  • Scénario : Michael Wilson et Rod Serling, d'après le roman homonyme de Pierre Boulle
  • Dialogues : Maria Signorini
  • Producteurs : Arthur P. Jacobs et Mort Abrahams
  • Musique originale : Jerry Goldsmith
  • Direction artistique : Jack Martin Smith et William Creber
  • Maquillage : John Chambers, Ben Nye et Dan Striepeke
  • Photographie : Leon Shamroy
  • Montage : Hugh S. Fowler
  • Sociétés de production : APJAC Productions, Inc. et Twentieth Century-Fox Film Corporation
  • Durée : 112 minutes
  • Date de sortie : 8 février 1968
  • Oscar d'honneur pour son exceptionnelle performance en maquillage dans ce film (John Chambers)


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