Les Merveilles

De Cinéann.

Version du 17 mai 2015 à 21:08 par MariAnn (discuter | contributions)
(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)

Les Merveilles (Le Meraviglie) film italien écrit et réalisé par Alice Rohrwacher, sorti en 2014.

Analyse critique

Dans un village d’Ombrie, c’est la fin de l’été. Gelsomina vit avec ses parents et ses trois jeunes sœurs dans une ferme où ils produisent du miel. Tenues à distance du monde par leur père, les filles grandissent en marge de la société. Pourtant, les règles strictes qui tiennent la famille ensemble vont être mises à mal par l’arrivée de Martin, un jeune délinquant, et par le tournage d’un jeu télévisé qui envahit la région.

Le film présente une tribu germano-italienne, qui rappelle évidemment celle de la réalisatrice et où les parents se parlent en français pour retrouver de l'intimité. Dans cette famille dans l'activité principale est l'apiculture, personne ne commande. Quand il faut désigner un chef, tous les regards se tournent vers l'adolescente Gelsomina, l'aînée des quatre sœurs. Elle aide son père à la récolte du miel de leurs abeilles. En retour, il lui promet un chameau, un vrai, comme si elle était encore une enfant. Mais le rêve de Gelsomina, c'est que toute la famille passe à la télévision dans l'émission de télé-réalité Le Pays des Merveilles, qui s'est arrêtée au fin fond de leur campagne italienne.

Martin, un gamin allemand qui débarque dans la famille ne parle pas, il siffle. Mais magnifiquement. Le don de cet enfant sauvage est beau. A travers lui s'exprime la volonté de la réalisatrice : aller vers ce qui est beau en restant sauvage. Les Merveilles célèbre un monde pas encore domestiqué, pas aux normes, issu de la contestation des années 1980. Elle a, certes, disparu. Un ami de passage reproche même aux parents d'avoir « arrêté la lutte ». Mais de cet héritage politique, idéologique, Alice Rohrwacher retient cet amour de la liberté qui continue d'impressionner cette Gelsomina en qui elle se projette. Pour l'adolescente, même la télé garde encore le sens de la beauté, avec sa présentatrice aux airs de fée : Monica Bellucci, filmée telle une apparition au milieu des autres comédiens, pratiquement tous inconnus.

L'action se situe au milieu des années 1990, comme le laisse supposer un tube qui passe à la radio (T'appartengo). Mais rien n'est précis, tout flotte harmonieusement. Ce drôle d'univers a même une étrange magie. Comme immergée parmi ses personnages, Alice Rohrwacher fait presque disparaître ce que leur vie a d'excentrique et laisse apparaître tout ce qu'elle a de précieux et de poétique. La trame du scénario tend des liens tendres ou violents, provoque un sentiment de communion, d'appartenance qui sont de l'ordre de l'invisible. La manière de filmer paraît pourtant familière, dans la veine du réalisme: mais tout en reprenant cet héritage, la réalisatrice trace une voie singulière, poétique, saluée par le Grand Prix du dernier festival de Cannes.

Le film fourmille de références cinématographiques, la fillette s'appelle Gelsomina et, à chaque fois qu'elle est appelée, on se retrouve immanquablement dans La Strada de Fellini. Le père, avec son tempérament colérique, provoque des éclats dignes de ceux de Pialat dans À Nos Amours. Les enfants pourraient être des héros des des frères Dardenne.

Le film déclencha une polémique lorsqu'il remporta le Grand prix du Festival de Cannes bien que la récompense corresponde, dans sa définition, à ce genre de film atypique. Avant le palmarès, plusieurs médias comme Télérama et Metronews affirmaient d'ailleurs que certains thèmes du film (l'enfance, la féminité, l'errance, le lien à la nature) ainsi que sa tonalité élégiaque et romantique avaient tout pour séduire la présidente du jury Jane Campion et certains de ses co-jurés parmi lesquels Sofia Coppola. Toutefois, le film fut sifflé lors de sa projection.

« Rohrwacher se montre orfèvre dans le maniement de sa troupe, les effets d’intimité étant si forts qu’on a parfois le sentiment de visiter le rêve éveillé de la réalisatrice. Impression encore accusée par le jeu étrange de superpositions de registres, entre épopée familiale, film expérimental, documentaire et autofiction. Passant du réalisme cru au pur onirisme sans rugosité ni couture, mais singulier jusqu’au bout. » Olivier Séguret, Libération, 19 mai 2014

Distribution

  • Monica Bellucci : Milly Catena
  • Alba Rohrwacher : Angelica
  • Agnese Graziani : Marinella
  • Margarete Tiesel
  • André Hennicke
  • Sabine Timoteo
  • Sam Louwyck
  • Maria Alexandra Lungu : Gelsomina

Fiche technique

  • Titre original : Le Meraviglie
  • Réalisation et scénario : Alice Rohrwacher
  • Photographie : Hélène Louvart
  • Musique originale : Piero Crucitti
  • Montage : Marco Spoletini
  • Durée : 110 minutes
  • Dates de sortie : 18 mai 2014 : (Festival de Cannes)
    • France : 11 février 2015
  • Prix du Jury au Festival de Cannes 2014


Retrouvez tous les détails techniques sur la fiche IMDB

merveilles.jpg

Outils personnels

Le cinéma de Nezumi; les artistes contemporains / Randonnées dans les Pyrénées

Les merveilles du Japon; mystérieux Viêt Nam; les temples et des montagnes du Népal ; l'Afrique