Tout est pardonné

De Cinéann.

Tout est pardonné , film français et allemand de Mia Hansen-Love, sorti en 2007

Analyse critique

À Vienne, en 1995, Victor habite avec Annette et leur fille Pamela, six ans. Victor, écrivain et journaliste, fuit le travail, s'abîme dans l'oisiveté et passe le plus clair de son temps à l'extérieur.

Au vu de la dégradation de leur couple, sa compagne Annette et lui décident de retourner à Paris, où le contexte semble plus favorable à leur épanouissement. Pourtant, lors de son arrivée en France, Victor sombre de nouveau et habite chez une droguée, en s'adonnant lui-même à ses addictions. Son couple avec Annette se délite, et celle-ci quitte Victor, puis disparaît avec leur fille.

Onze ans plus tard, Pamela a dix-sept ans et vit à Paris, toujours chez sa mère. Elle apprend un jour que son père y est aussi et décide de le revoir. Les retrouvailles sont d'abord silencieuses, puis chacun se raconte. C'est dans un calme intemporel que les sentiments sont mis à nu.

Le film travaille à contredire sa structure en deux périodes, d’abord le temps de l’enfance et la formation inconsciente d’un trauma, puis celui de l’entrée dans l’âge adulte et l’apprivoisement des cicatrices. Étrangement, le malheur accumulé dans la première partie flotte et ne pèse pas sur la seconde. Entre les deux temps du film, les liens de causalité sont lâches, estompés, prennent des chemins vicinaux, presque invisibles. Paméla n’a pas de compte à régler avec ce père volatil. Il réapparaît et elle lui tend les bras. Pourtant, du ressentiment chemine dans le film, mais il ne traverse pas son personnage principal, mais celui de sa mère.

Émouvante et digne dans son statut de victime dans la première partie, elle est rejetée à l’extrême périphérie du récit dans le second volet. Même son nouveau mari, lui aussi tout à la volonté de réparer et de reconstruire, a plus de relief et de consistance qu’elle. De façon tout à fait inattendue, Tout est pardonné ne pardonne pas à la mère de ne pas avoir pardonné. Chacune de ses réapparitions, se heurtant à l’impossibilité de sa fille de déjeuner avec elle, travaille à l’isoler dans son âcreté vaguement rancunière, jusqu’à ce très beau moment de suspension, où le film la suit jusqu’à son lieu de travail, le musée d’Orsay, où elle disparaît parmi les statues, traçant un chemin seule.

Il y a une belle ambiguité dans cette façon de ne pas accabler la mère, de toute façon fautive de rien, contrairement au père, sans pour autant donner droit de cité à sa douleur non soldée. Cette hostilité jamais exprimée, sinon par des choix de construction du récit, pour un personnage assez irréprochable est ce que le film a de plus troublant, plus encore que la puissance de pardon presque surnaturelle de son caractère principal. Le film est fasciné par ces systèmes de protection, ces bulles sécurisées, et pourtant poreuses, que constitue l’imaginaire enfantin. Pourtant, malgré l’apparente déconnection, quelque chose se transmet. De Victor, Paméla a retenu quelque chose, qui n’est pas vraiment un contenu, mais plutôt une attitude, une façon de tout traverser en promeneur.

Distribution

  • Paul Blain : Victor
  • Constance Rousseau : Pamela adolescente
  • Marie-Christine Friedrich : Annette
  • Carole Franck : Martine

Fiche technique

  • Réalisation et scénario: Mia Hansen-Love
  • Directeur de la photographie : Pascal Auffray
  • Montage : Marion Monnier
  • Producteurs : David Thion et Philippe Martin
  • Sociétés de production : Les Films Pelléas
  • Durée : 105 minutes
  • Dates de sortie : 19 mai 2007, Festival de Cannes, section Quinzaine des réalisateurs.
    • France : 26 septembre 2007
  • Prix Louis-Delluc du premier long-métrage 2007
  • Nommé au César du cinéma 2008 pour le meilleur premier film
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