Ingmar Bergman

De Cinéann.

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'''Ernst Ingmar Bergman''', né à [[Uppsala]] le {{date|14|juillet|1918}} et mort le {{date|30|juillet|2007}} sur l'île de [[Fårö]], est un [[metteur en scène]] de [[théâtre]], [[scénariste]], et [[réalisateur]] de [[cinéma]] [[Suède|suédois]]. Il s'est imposé comme l'un des plus grands réalisateurs de l'histoire du cinéma en proposant une œuvre s'attachant à des thèmes [[métaphysique]]s (''[[Le Septième Sceau]]''), à l'[[introspection]] [[psychologique]] (''[[Persona]]'') ou familiale (''[[Cris et chuchotements]]'', ''[[Fanny et Alexandre]]'') et à l'analyse des comportements du couple (''[[Scènes de la vie conjugale]]''). Il est le seul [[cinéaste]] à avoir obtenu la Palme des Palmes au [[Festival de Cannes]] en [[1997 au cinéma|1997]].
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'''Ernst Ingmar Bergman''' , metteur en scène, scénariste et réalisateur suédois, né à Uppsala le 14 juillet 1918 et mort le 30 juillet 2007 sur l'île de Fårö.
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== Biographie ==
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=== Biographie ===
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=== Enfance ===
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[[Image:Erik Bergman.jpg|thumb|left|Erik Bergman, père d'Ingmar Bergman]]
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Quand Ingmar Bergman naît en [[1918]], sa mère est atteinte de la [[grippe espagnole]] ; l'enfant est quasi mort-né. À force de soins, il se rétablit mais contracte encore plusieurs maladies. Il est le fils cadet d'une famille de trois enfants : un frère aîné, Dag, et une sœur plus jeune, Margareta, qui vient au monde quatre ans plus tard. Le jeune Ingmar Bergman vit une enfance tourmentée ; ses relations avec sa mère et son frère sont contrariées par les manipulations et les chantages affectifs<ref>Ingmar Bergman, ''Laterna magica'', édition [[Folio]], 2001, p. 12-13</ref>. Le père est un [[Pasteur protestant|pasteur]] [[Luthéranisme|luthérien]] ambitieux. Le [[presbytère]] où vit la famille est ouvert à tous les paroissiens et se doit d'être modèle. Sans doute cédant à cette pression sociale, le père soumet sa famille à une discipline extrêmement rigide. Les enfants sont élevés dans la traque obsessionnelle du [[Péché (christianisme)|péché]] et du repentir. Les [[Châtiment corporel|punitions corporelles]] sont courantes et ritualisées<ref>[[Ibid.]], p. 18-21.</ref>. L’[[auteur]] conserve un [[traumatisme]] de cette éducation rigide qui affleure dans plusieurs de ses œuvres.
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C’est au sein des proches de la famille qu’il s’épanouit. Il passe le meilleur de son enfance chez sa grand-mère à [[Uppsala]] qui l'emmène au [[cinéma]]. Lors d'un [[Noël]], une riche parente offre au frère d'Ingmar Bergman un [[cinématographe]]. L'appareil est doté de [[Lentille optique|lentilles]] et d'un système de [[Projection cinématographique|projection]]. La bobine se tourne à la main et permet de voir un petit [[film]] en boucle. Les deux frères procèdent à un échange et le jouet passe entre ses mains. Un oncle, [[Maladie mentale|handicapé mental]] et inventeur fou, lui dessinera directement sur la [[Pellicule photographique|pellicule]] des courts films d'[[animation]]. Ce cinématographe agit comme la madeleine de [[Proust]] pour le futur [[réalisateur]]<ref>Ibid., p. 103</ref>. Il baptisera plus tard sa société de production ''Cinematograph''.  
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Ingmar Bergman naît en 1918. Il est le fils cadet d'une famille de trois enfants : un frère aîné, Dag, et une sœur plus jeune, Margareta, qui vient au monde quatre ans plus tard. Le jeune Ingmar Bergman vit une enfance tourmentée ; ses relations avec sa mère et son frère sont contrariées par les manipulations et les chantages affectifs. Le père est un pasteur luthérien ambitieux. Le presbytère où vit la famille est ouvert à tous les paroissiens et se doit d'être modèle. Sans doute cédant à cette pression sociale, le père soumet sa famille à une discipline extrêmement rigide. Les enfants sont élevés dans la traque obsessionnelle du péché et du repentir. Les punitions corporelles sont courantes et ritualisées. L’auteur conserve un traumatisme de cette éducation rigide qui affleure dans certaines de ses œuvres.
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Alors qu'il a 12 ans, son père obtient qu'il puisse visiter les studios cinématographiques suédois de [[Rasunda]], en banlieue de [[Stockholm]]. C'est, pour lui, comme « ''entrer au paradis'' »<ref>[[Alain Bergala]], ''Harriet Anderson regarde dans l'objectif de Bergman'', [[Cahiers du cinéma]], numéro spécial, ''100 journées qui ont fait le cinéma'', p. 70.</ref>. Quant au [[théâtre]], où il se rend régulièrement depuis tout jeune, Ingmar Bergman a l’occasion de l’observer en [[coulisse]] grâce à un [[musicien]] qui joue derrière la [[scène]] pour une mise en scène du ''Songe'' d’[[August Strindberg]] qu’il mettra lui-même en scène à plusieurs reprises. Ses [[lecture]]s l’emmènent vers l’auteur pour lequel il a une véritable vénération mais aussi [[Fedor Dostoïevski|Dostoïevski]], [[Honoré de Balzac|Balzac]], [[Gustave Flaubert|Flaubert]], [[Friedrich Nietzsche|Nietzsche]]… Jeune adolescent complexé et solitaire, volontiers soupe au lait, Ingmar Bergman a une première liaison orageuse avec une de ses camarades de classe, elle-même recluse.
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C’est au sein des proches de la famille qu’il s’épanouit. Il passe le meilleur de son enfance chez sa grand-mère à Uppsala qui l'emmène au cinéma. Ingmar Bergman se découvre pour cet art une passion précoce. Lors d'un Noël, une riche parente fait cadeau aux enfants d'un cinématographe. L'appareil est doté de lentilles et d'un système de projection.
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Dans le cadre d’un programme d’échange, il part pour l’[[Allemagne]], dans la région de [[Thuringe]], en [[1934]]. Sa famille d’accueil est embrigadée par le [[Nazisme|national-socialisme]] et voue un culte à [[Adolf Hitler]]. Il assiste à une de ses prestations dans un stade sportif à [[Weimar]]. Sans doute trop jeune pour disposer d’un recul nécessaire, il se retrouve à son tour galvanisé par le discours du [[Führer]]. De retour en [[Suède]], le milieu dans lequel il vit, essentiellement germanophile, est de la même façon imprégné par l’idéologie nazie. Son frère est un des fondateurs et membre actif du parti national-socialiste suédois<ref> Ingmar Bergman, ''Laterna magica'', [[op. cit.]], p. 163 à 169</ref>. Le traumatisme de la découverte des [[camps d'extermination]] par la suite le conduira à prendre ses distances avec la [[politique]].
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Il se rend régulièrement au théâtre depuis tout jeune. Ingmar Bergman a l’occasion de l’observer en coulisse grâce à un musicien qui joue derrière la scène pour une mise en scène du Songe d’August Strindberg.
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=== Entrée en scène ===
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Dans le cadre d’un programme d’échange, il part pour l’Allemagne, dans la région de Thuringe, en 1934. Le pays est alors plongé dans la tourmente nazie. Sa famille d’accueil l'emmène assister à une prestation d'Adolf Hitler dans un stade sportif à Weimar. Il se retrouve fasciné par le discours du Führer. De retour en Suède, le milieu dans lequel il vit, essentiellement germanophile, est de la même façon imprégné par l’idéologie nazie. Son frère est un des fondateurs et membre actif du parti national-socialiste suédois. Le traumatisme de la découverte des camps d'extermination par la suite le conduira à prendre ses distances avec la politique.
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Ingmar Bergman s'inscrit en [[1937]] en [[Histoire]] et [[Littérature]] à l'Université de [[Stockholm]]. Il y suit des cours de Martin Lamm, professeur réputé, spécialiste de [[Strindberg]] et d’[[Emanuel Swedenborg]]. Ses études, cependant, sont contrariées par un emploi du temps chargé, quasi entièrement dédié au [[théâtre]]. Il participe en effet bien vite à l’activité théâtrale d’une maison des jeunes, le Mäster Olofsgården, où il mettra en scène des pièces de Strindberg, de [[William Shakespeare|Shakespeare]], de [[Suttone Vane]] et de [[Doris Rönnqvist]]. On lui offre épisodiquement la possibilité de travailler avec des professionnels au sein du Studio dramatique. Un temps acteur, il finit par définitivement se tourner vers la mise en scène. Il assurera aussi la direction de plusieurs pièces données au théâtre des étudiants dont ''Le Pélican'' de Strindberg. Il noue à cette occasion une relation amoureuse avec une jeune actrice érudite. Cette liaison parvient aux oreilles de ses parents, qui réprouvent la vie tumultueuse de leur fils. À la suite d’une explication violente, Ingmar Bergman quitte définitivement le [[presbytère]] pour s’installer avec sa maîtresse. La relation prend néanmoins fin lorsque Ingmar Bergman se voit proposer une tournée en province qui le conduit par la même occasion à précipiter la fin de ses études.
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Au printemps [[1939]], dans la nécessité de trouver un emploi, il tente sans succès de se faire embaucher au [[Théâtre Royal Dramatique]] de Stockholm, et doit se rabattre sur un emploi d’assistant à la mise en scène à l’[[Opéra (bâtiment)|Opéra]] où il est occasionnellement [[Souffleur (théâtre)|souffleur]]. Son insertion dans le milieu lyrique s'avère difficile. Il fait néanmoins ses armes, notamment aux côtés de [[Ragnar Hyltén-Cavallius]], à la fois [[cinéaste]] et [[metteur en scène]] reconnu. Lorsque la [[Seconde Guerre mondiale]] commence, Ingmar Bergman doit accomplir son service national mais il est aussitôt démobilisé suite à un ulcère<ref>[[Olivier Assayas]] et [[Stig Björkman]], ''Conversation avec Bergman'', Petite bibliothèque des Cahiers du cinéma, [[2006]], p. 16.</ref>. En repos chez sa grand-mère en [[Dalécarlie]], il écrit une douzaine de pièces de théâtre et un opéra. Il met en scène l’une d’elles, ''La Mort de polichinelle'', largement inspirée de pièces de Strindberg. À la fin de la représentation, il est approché par [[Carl Anders Dymling]], directeur de la ''[[Svensk Filmindustri]]'', et [[Stina Bergman]], directrice du service des [[scénario]]s, qui lui proposent un emploi pour un an pour écrire et revoir les scénarios produits par la société.
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Ingmar Bergman s'inscrit en 1937 en Histoire et Littérature à l'université de Stockholm. Il y suit des cours de Martin Lamm, professeur réputé, spécialiste de Strindberg et d’Emanuel Swedenborg. Ses études, cependant, sont contrariées par un emploi du temps chargé, quasi entièrement consacré au théâtre.  
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=== Débuts de carrière ===
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Au printemps 1939, dans la nécessité de trouver un emploi, il tente sans succès de se faire embaucher au Théâtre dramatique royal de Stockholm, et doit se rabattre sur un poste d’assistant à la mise en scène à l’Opéra royal où il est occasionnellement souffleur. La Seconde Guerre mondiale éclate quand Ingmar Bergman doit accomplir son service national mais il est aussitôt démobilisé à cause d'un ulcère. En repos chez sa grand-mère en Dalécarlie, il écrit une douzaine de pièces de théâtre et un opéra. Il met en scène l’une d’elles, La Mort de Polichinelle, largement inspirée de pièces de Strindberg. À la fin de la représentation, il est approché par Carl Anders Dymling, directeur de la Svensk Filmindustri, et Stina Bergman, directrice du service des scénarios, qui lui proposent un emploi pour écrire et revoir les scénarios produits par la société.
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Intégré dans une équipe de six [[scénariste]]s, parfois appelé en urgence, il est envoyé sur des [[Tournage (audiovisuel)|tournages]] pour corriger des [[Dialogue (genre)|dialogues]]. Les méthodes d’[[écriture]] sont empruntées aux méthodes [[États-Unis|américaines]] alors en vogue. Ingmar Bergman leur préfère pourtant les [[films français]] de l’époque : [[Jean Renoir]], [[Marcel Carné]], [[Julien Duvivier]]<ref>Ibid., p. 25-28.</ref>. Il fait la connaissance de [[Gustaf Molander]] à qui il fait lire un [[scénario]] inspiré de ses années d’études. Le [[réalisateur]] recommande son adaptation à la production qui confie la réalisation à [[Alf Sjöberg]]. Ingmar Bergman fait des pieds et des mains pour assister au tournage ; il obtient finalement un poste de ''script-boy''. Impatient d’en découdre et audacieux, il tente à plusieurs reprises de s’immiscer dans le travail du réalisateur. En vain. Le jeune scénariste est remis à sa place. Le [[film]], ''[[Tourments]]'' (''Hets'', [[1944]]) est sélectionné à la [[Mostra de Venise]].
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Intégré dans une équipe de six scénaristes, il est parfois envoyé sur des tournages pour corriger des dialogues. Les méthodes d’écriture sont empruntées aux méthodes américaines alors en vogue. Ingmar Bergman leur préfère pourtant les films français de l’époque : Jean Renoir, Marcel Carné, Julien Duvivier. Il fait la connaissance de Gustaf Molander à qui il fait lire un scénario inspiré de ses années d’études. Celui-ci en recommande l'adaptation à la production qui confie la réalisation à Alf Sjöberg.  
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Dans le même temps, la commune de [[Helsingborg]] cherche à sauver son [[théâtre]] municipal et propose sa direction à Ingmar Bergman. Le théâtre est en piteux état mais il accepte. Il est alors marié à une jeune [[danse]]use et [[chorégraphe]], Else Fischer, qui a accouché d’une enfant à la fin de l’année [[1943]]. Le bébé et sa mère sont atteints de la [[tuberculose]] et Ingmar Bergman enchaîne mises en scène et scénarios pour faire face aux frais d’hospitalisation. En [[1945]], la ''Svensk Filmindustri'' lui commande l’adaptation et la réalisation d’une pièce de théâtre. Ingmar Bergman est enthousiaste mais il pèche par orgueil et néglige son manque d'expérience. Le tournage a lieu en été dans des conditions catastrophiques. Il se fait un ennemi du chef opérateur, davantage porté sur le [[documentaire]], il peine à maîtriser ses troupes, le mauvais temps se met de la partie lors des extérieurs, le [[laboratoire]] gâche les [[Pellicule photographique|pellicules]] et la production du film doit souffrir d’un accident du travail lors d’une prise en studio. Tout au long de l’épreuve, il recueille les conseils du [[cinéaste]] [[Victor Sjöström]] et ceux, avisés, de son [[monteur]] expérimenté, [[Oscar Rosander]] qui l’aide à remettre le film sur pied - il collaborera par la suite à tous les films d’Ingmar Bergman jusqu’au ''[[Le Visage|Visage]]''. ''[[Crise (1946)|Crise]]'' (''Kris''), premier film réalisé par Ingmar Bergman, sort en [[1946]].
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Dans le même temps, la commune de Helsingborg cherche à sauver son théâtre municipal et propose sa direction à Ingmar Bergman. Le théâtre est en piteux état mais il accepte. Il est alors marié à une jeune danseuse et chorégraphe, Else Fischer, qui a accouché d’une enfant à la fin de l’année 1943. Le bébé et sa mère sont atteints de la tuberculose et Ingmar Bergman enchaîne mises en scène et scénarios pour faire face aux frais d’hospitalisation. En 1945, la Svensk Filmindustri lui commande l’adaptation et la réalisation d’une pièce de théâtre. Ingmar Bergman est enthousiaste mais il pèche par orgueil et néglige son manque d'expérience. Le tournage a lieu en été dans des conditions catastrophiques. Il se fait un ennemi du chef opérateur, davantage porté sur le documentaire, il peine à maîtriser ses troupes, le mauvais temps se met de la partie lors des extérieurs, le laboratoire gâche les pellicules et la production du film doit souffrir d’un accident du travail lors d’une prise en studio. Tout au long de l’épreuve, il recueille les conseils du cinéaste Victor Sjöström et ceux, avisés, de son monteur expérimenté, Oscar Rosander, qui l’aide à remettre le film sur pied. Crise (Kris), premier film réalisé par Ingmar Bergman, sort en 1946.
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Ingmar Bergman poursuit son travail au théâtre municipal de Helsingborg et continue à écrire des scénarios pour la ''Svensk Filmindustri''. Il monte l’une de ses pièces, ''Rachel et l’ouvreuse de cinéma'', qu’il adaptera plus tard pour ''[[L'Attente des femmes]]''. Sa femme qui devait initialement pourvoir un poste de chorégraphe au sein du théâtre doit être remplacée en raison de sa maladie. Elle lui recommande une amie : Ellen Lundström. Ingmar Bergman noue avec celle-ci une liaison et décide de divorcer d’Else Fischer. À l’automne 1946, le nouveau couple déménage pour [[Göteborg]] où Ingmar Bergman obtient un poste de [[metteur en scène]] au théâtre municipal. L’endroit est sous la coupe de son directeur [[Torsten Hammarén]] qui devient son mentor et lui enseigne des techniques de mise en scène pour une pièce d’[[Albert Camus]], ''[[Caligula (Camus)|Caligula]]'', avec le comédien [[Anders Ek]].  
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Ingmar Bergman poursuit son travail au théâtre municipal de Helsingborg et continue à écrire des scénarios pour la Svensk Filmindustri. Il monte l’une de ses pièces, Rachel et l’ouvreuse de cinéma, qu’il adaptera plus tard pour L'Attente des femmes. Sa femme qui devait initialement pourvoir un poste de chorégraphe au sein du théâtre doit être remplacée en raison de sa maladie. Elle lui recommande une amie : Ellen Lundström avec laquelle il noue une liaison qui conduit les époux à divorcer. À l’automne 1946, le jeune couple déménage pour Göteborg où Ingmar Bergman obtient un poste de metteur en scène au théâtre municipal. L’endroit est sous la coupe de son directeur Torsten Hammarén qui devient son mentor et lui enseigne des techniques de mise en scène pour une pièce d’Albert Camus, Caligula, avec le comédien Anders Ek.
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Après l’échec de ''Crise'', la ''Svensk Filmindustri'' rechigne à renouveler l’expérience de la réalisation avec Ingmar Bergman. C’est donc avec le producteur [[Lorens Marmstedt]], qu’il dirige ses trois prochains films : ''[[Il pleut sur notre amour]]'' (''Det regnar på vår kärlek'', 1946), ''[[L'Éternel mirage]]'' (''Skepp till India land'', [[1947]]) et ''[[Musique dans les ténèbres]]'' (''Musik i mörker'', [[1948]]). Ses premiers films sont très empreints de l’influence du [[cinéma français]] des [[années 1930]] et notamment de [[Marcel Carné]]<ref>[[Marcel Martin]], ''Histoire du cinéma en 120 films'', Cinéma 62, n°66, p. 108.</ref>. Il s’en dégage une violente révolte contre la [[religion]] et la [[famille]]<ref>[[Georges Sadoul]], ''Histoire du cinéma'', [[J'ai lu]], [[1962]], p. 371.</ref>. À l’exception de ''Musique dans les ténèbres'', son cinéma est éreinté par la [[Critique cinématographique|critique]] qui le trouve volontiers subversif et immature<ref>[[François Truffaut]], ''L'œuvre d'Ingmar Bergman'' ''in'' ''Les films de ma vie'', [[Flammarion]], coll. Champs contre-champs, [[1975]], p. 264.</ref>. Il écrit encore le scénario de ''[[La Femme sans visage]]'' (''Kvinna utan ansikte'', 1947), pour [[Gustaf Molander]] et entame une activité de metteur en scène à la radio avec un texte original, La Ville ([[1951]]), inspiré d’une dérive dans [[Berlin]], lors de son séjour en [[Allemagne]]<ref>Ingmar Bergman, ''Laterna magica'', op. cit., p. 179-180</ref>.
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Après l’échec de Crise, la Svensk Filmindustri rechigne à renouveler l’expérience de la réalisation avec Ingmar Bergman. C’est donc avec le producteur Lorens Marmstedt, qu’il dirige ses trois prochains films : Il pleut sur notre amour (Det regnar på vår kärlek, 1946), L'Éternel Mirage (Skepp till India land, 1947) et Musique dans les ténèbres (Musik i mörker, 1948). Ces premiers films sont très empreints de l’influence du cinéma français des années 1930 et notamment de Marcel Carné.  
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=== Maturité ===
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Durant l’été 1950, Ingmar Bergman traverse alors de graves difficultés financières et doit solliciter un important prêt à la Svensk Filmindustri qui le lui consent en échange d’une exclusivité sur plusieurs scénarios et des honoraires à la baisse. Il accepte de réaliser des films publicitaires pour des savons et une œuvre de commande, Une telle chose ne se produirait pas ici.
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[[Image:Filmstaden Solna Sweden.jpg|thumb|left|Entrée des studios de [[Råsunda]], en banlieue de [[Stockholm]]. Ingmar Bergman tourne une grande partie de ses films dans les studios suédois.]]
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En [[1949]], Ingmar Bergman part à [[Cagnes-sur-Mer]] avec le comédien [[Birger Malmsten]] pour y écrire un [[scénario]] dans le cadre d’un nouveau contrat avec la ''Svensk Filmindustri''. Le [[réalisateur]] est parvenu à réintégrer le giron de la célèbre société. Il a pour la première fois signé la réalisation ainsi que le scénario d’un [[film]] avec ''[[La Prison]]'' (''Fängelse'', 1949) et gagne en assurance<ref>Olivier Assayas et Stig Björkman, ''Conversation avec Bergman'', op. cit., p. 45-46.</ref>. Son activité artistique est débordante, alternant mises en scène théâtrales et cinématographiques ainsi que des allers-retours constants entre [[Stockholm]] et [[Göteborg]], aux dépens de son ménage avec Ellen Lundström qui, lui, bat de l’aile. Le séjour dans la ville de la [[Côte d'Azur]] est solitaire ; Birger Malmsten est aussitôt absorbé par une relation sentimentale. Ingmar Bergman écrit donc seul son scénario. ''[[Vers la joie]]'' (''Till glädje'', [[1950]]) est tourné durant l’été. Au cours du [[Tournage (audiovisuel)|tournage]], il reçoit la visite de Gun Hagberg, [[Critique cinématographique|critique]] d’une revue cinématographique. Immédiatement séduit, le réalisateur entame une liaison et, sitôt le film achevé, s’envole avec elle à Paris, rompant avec son épouse. Lors de ce séjour, il découvre le [[théâtre]] de [[Molière]] lors d’une représentation du ''[[Le Misanthrope ou l'Atrabilaire amoureux|Misanthrope]]'' à la [[Comédie française]]. À son retour, il s’installe avec sa nouvelle maîtresse à Stockholm. La vie du couple connaît des hauts et des bas. En définitive, les enfants que Gun Hagberg a eu de son précédent mariage les rejoignent à la fin de l’année [[1950]] tandis qu’un autre naît de leur union. Ingmar Bergman se retrouve à devoir entretenir trois familles. Or, les engagements manquent.
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Durant l’été 1950, l’industrie cinématographique suédoise se met en grève dans le but d’obtenir de meilleures conditions de travail. Le mouvement s’éternise. Ingmar Bergman traverse alors de graves difficultés financières et doit solliciter un important prêt à la ''Svensk Filmindustri'' qui le lui consent en échange d’une exclusivité sur plusieurs scénarios et des honoraires à la baisse. Il accepte de réaliser des films publicitaires pour des savons et une œuvre de commande, [[Une telle chose ne se produirait pas ici]]. Ce n’est qu’au printemps [[1951]] que la grève cesse. Le réalisateur enchaîne alors deux tournages, celui de ''[[L'Attente des femmes]]'' (''Kvinnors väntan'', [[1952]]) qui comprend des extérieurs à Paris et ''[[Un été avec Monika]]'' (''Sommaren med Monika'', [[1953]]) qui se déroule dans l’[[archipel de Stockholm]]. Le premier rôle de ce dernier film est confié à [[Harriet Andersson]], une jeune [[danse]]use de [[Revue (théâtre)|revue]]. Le tournage se prolonge à cause d’ennuis techniques et Ingmar Bergman tombe sous le charme de l’actrice. La liaison ne dure pas mais suffit à briser son ménage. Il doit quitter le foyer familial et se retrouve célibataire.
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Ingmar Bergman est nommé directeur artistique du Théâtre municipal de Malmö en 1952. Il exécute plusieurs mises en scène, certaines puisant dans le répertoire classique (Peer Gynt, Le Misanthrope), des opérettes (La Veuve joyeuse) ainsi que deux de ses propres pièces : Peinture sur bois et Meurtre à Bajärna. Le travail théâtral de l’auteur se double d’une intense activité cinématographique. Il sort successivement La Nuit des forains (Gycklarnas afton, 1953), Une leçon d'amour (En Lektion i kärlek, 1954) et Rêve de femmes (Kvinnodröm). À l’automne 1955, après le tournage de Sourires d'une nuit d'été (Sommarnattens leende, 1955), victime du surmenage et d’un ulcère qu’il traîne déjà depuis de nombreuses années, il est hospitalisé.
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Pour le théâtre, Ingmar Bergman est nommé directeur artistique du théâtre municipal de [[Malmö]] en 1952. Il exécute plusieurs mises en scène, certaines puisant dans le répertoire classique (''[[Peer Gynt]]'', ''le Misanthrope''), des [[opérette]]s (''[[La Veuve joyeuse]]'') ainsi que deux de ses propres pièces : ''Peinture sur bois'' et ''Meurtre à Bajärna''. Il poursuit aussi ses adaptations radiophoniques avec des pièces de [[Strindberg]] et les ''[[Noces de sang (Lorca)|Noces de sang]]'' de [[Federico García Lorca]] (1952). Le travail théâtral de l’[[auteur]] se double d’une intense activité cinématographique. Il sort successivement ''[[La Nuit des forains]]'' (''Gycklarnas afton'', 1953), ''[[Une leçon d'amour]]'' (''En Lektion i kärlek'', [[1954]]) et ''[[Rêve de femmes]]'' (''Kvinnodröm''). À l’automne [[1955]], après le tournage de ''[[Sourires d'une nuit d'été]]'' (''Sommarnattens leende'', 1955), victime du surmenage et d’un ulcère qu’il traîne déjà depuis de nombreuses années, il est hospitalisé.
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Déjà amorcée avec La Prison, la maturation du cinéma de Bergman est, à la veille de la réalisation du ''Septième Sceau'', déjà accomplie. L’influence du cinéma français de l’avant-guerre s’est effacée au profit d’un style plus personnel. ''Ville portuaire'' (''Hamnstad'', 1948) ou ''Monika'', sont encore influencés par le cinéma italien néoréaliste mais son style personnel s’affirme. On trouve dans les films qu’il dirige entre 1948 et 1955, nombre de caractéristiques de l’empreinte personnelle du réalisateur : interrogations métaphysiques sur la vie et la mort , érotisme prégnant, désillusion conjugale , le spectacle. Sa vision de la féminité notamment détonne. Dans cette thématique, son langage cinématographique se positionne davantage du côté de la femme ; c’est au travers de leur regard que l’attitude des hommes est brocardée : les personnages féminins sont nuancés quand les personnages masculins sont au contraire typés.
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Déjà amorcée avec ''La Prison'', la maturation du [[cinéma]] de Bergman est à la veille de la réalisation du ''[[Le Septième Sceau|Septième Sceau]]'', déjà accomplie<ref>[[Roger Boussinot]], ''L’Encyclopédie du cinéma'', [[Bordas]], [[1989]], p. 184 ; Georges Sadoul, ''Histoire du cinéma'', op. cit., p. 371.</ref>. L’influence du [[cinéma français]] de l’avant-guerre s’est effacée au profit d’un style plus personnel. ''[[Ville portuaire]]'' (''Hamnstad'', [[1948]]) ou ''Monika'', sont encore influencés par le [[cinéma italien]] [[néoréalisme (cinéma)|néoréaliste]]<ref>Olivier Assayas et Stig Björkman, ''Conversation avec Bergman'', op. cit., p. 58 ; V. aussi : Roger Boussinot, ''L’Encyclopédie du cinéma'', op. cit., p. 183-184.</ref> mais son style personnel s’affirme. On trouve dans les films qu’il dirige entre 1948 et 1955, nombre de caractéristiques de l’empreinte personnelle du réalisateur : interrogations [[métaphysique]]s sur la vie et la mort (''La Prison''), érotisme prégnant (''Monika'', ''L’Attente des femmes'', ''La Nuit des forains''), désillusion conjugale (''L’Attente des femmes'', ''Une leçon d’amour'', ''Sourires d’une nuit d’été''), le spectacle (''La Prison'', ''Vers la joie'', ''La Nuit des forains'')<ref>[[Raymond Lefèvre]], ''Ingmar Bergman, La Nuit des forains'', ''in'' ''Regards neufs sur le cinéma'', [[Éditions du Seuil|Le Seuil]], coll. Peuple et culture, p. 199.</ref> … Sa vision de la féminité notamment détonne. Dans cette thématique, son langage cinématographique se positionne davantage du côté de la femme ; c’est au travers de leur regard que l’attitude des hommes est brocardée : les personnages féminins sont nuancés quand les personnages masculins sont au contraire typés<ref>François Truffaut, ''L’œuvre d’Ingmar Bergman'', op. cit., p. 265.</ref>.
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La réputation d’Ingmar Bergman passe les frontières suédoises avec ''Sourires d’une nuit d’été'' qui est sélectionné au Festival de Cannes en 1956. Le film, dont l'accouchement s'est fait dans la douleur, y fait figure d'une surprise appréciable et obtient d'ailleurs un « prix de l'humour poétique » (sic). Mais c’est lors de la sélection de l’année suivante, avec ''Le Septième Sceau'', qu’il fait sensation. Le film, plus grave, est adapté de l’une de ses propres pièces en un seul acte (''Peinture sur bois''). L’intrigue sous forme d’allégorie tourne autour de la mort et du jugement dernier. L’accueil critique est enthousiaste. Le clou est enfoncé avec ''Les Fraises sauvages'' dans lequel il fait jouer l’un des pionniers du cinéma suédois, Victor Sjöström  qui jouait déjà dans ''Vers la joie''. Il décroche à cette occasion l’[[Ours d'or]] du meilleur film au Festival de Berlin.
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=== Reconnaissance ===
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La critique suédoise, jusque-là très réservée, se fait dorénavant moins sévère qu’elle n’était à l’égard de ses œuvres. Les studios suédois lui laissent les coudées franches et une pleine liberté de création. Le réalisateur reçoit aussi plusieurs sollicitations et de plusieurs pays pour tourner des films. Néanmoins, il préférera continuer à tourner en Suède. Ingmar Bergman a désormais l’habitude d’alterner théâtre, le courant de l’année, et cinéma, l’été. Il aime s’entourer de sa propre équipe et redoute le sort de certains de ses compatriotes, tels Victor Sjöström ou Mauritz Stiller qui s’expatrièrent aux États-Unis pour finalement tomber dans l'oubli.
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[[Image:Ingmar Bergman & Sven Nykvist.jpg|thumb|right|Ingmar Bergman et Sven Nykvist lors du tournage de ''À travers le miroir'']]
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La réputation d’Ingmar Bergman passe les frontières [[Suède|suédoises]] avec ''Sourires d’une nuit d’été'' qui est sélectionné au [[festival de Cannes]] en [[1956 au cinéma|1956]]. Le [[film]] y fait figure d'une surprise appréciable<ref>[[Max Favalelli]], ''Le silence de la honte'', Paris-presse, avril-mai [[1956]], ''in'' Cahiers du cinéma, ''Histoires de Cannes'', numéro spécial, avril [[1997]], p. 46-47.</ref> et obtient d'ailleurs un « prix de l'humour poétique » (sic). Mais c’est lors de la sélection de l’année suivante, avec ''Le Septième Sceau'' qu’il fait sensation. Le film, plus grave, est adapté de l’une de ses propres pièces en un seul acte (''Peinture sur bois''). L’intrigue sous forme d’[[allégorie]] tourne autour de la [[mort]] et du [[jugement dernier]]. L’accueil [[Critique cinématographique|critique]] est enthousiaste. Il en est de même avec ''[[Les Fraises sauvages]]'' dans lequel il fait jouer l’un des pionniers du [[cinéma]] suédois, [[Victor Sjöström]] - qui jouait déjà dans ''Vers la joie''. Il décroche à cette occasion l’[[Ours d'or du Meilleur film|Ours d'or]] du meilleur film au [[Berlinale|Festival de Berlin]].
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La reconnaissance montante d’Ingmar Bergman aura plusieurs conséquences. La critique suédoise, jusque-là très réservée, se fera dorénavant moins sévère qu’elle n’était à l’égard de ses œuvres<ref>Stig Björkman, Torsten Manns et Jonas Sima, ''La mort à chaque aube, entretien avec Ingmar Bergman sur l’Heure du loup'', trad. Kerstin L. Bitsch, Cahiers du cinéma, août [[1968]], n°203, p. 55-56</ref>. Les studios suédois lui laissent les coudées franches et une pleine liberté de création. Le [[réalisateur]] recevra plusieurs propositions et de plusieurs pays pour tourner des films. Néanmoins, il préfèrera continuer à tourner en [[Suède]]. Ingmar Bergman a désormais l’habitude d’alterner [[théâtre]], le courant de l’année, et cinéma, l’été. Il aime s’entourer de sa propre équipe et redoute le sort de certains de ses compatriotes, tels [[Victor Sjöström]] ou [[Mauritz Stiller]] qui s’expatrièrent aux États-Unis pour finalement tomber en désuétude<ref>[[Jean Béranger]], ''Rencontre avec Ingmar Bergman'', Cahiers du cinéma, octobre [[1958]], n°88, p. 18-20</ref>.
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Ingmar Bergman tombe sous le charme de l'île de Fårö. Il y bâtit une maison et y tourne plusieurs de ses films dont Persona. L'île sera aussi le sujet de deux documentaires qu'il lui consacre à dix ans d'intervalle, intitulés tous deux Mon île Faro (Fårö-dokument), en 1969 puis en 1979.
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[[Image:Ingmar Bergman and Ingrid Thulin -Tystnaden.jpg|thumb|left|Ingmar Bergman et Ingrid Thulin durant le tournage du ''Silence'']]
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Ingmar Bergman épouse Ingrid von Rosen en novembre 1971,  elle reste sa femme jusqu’à sa mort en 1995. Il fait un séjour avec elle à Los Angeles pour diriger un séminaire sur le cinéma. Il y rencontre des cinéastes comme [[William Wyler]] et [[Billy Wilder]]. Cependant, un contrôle fiscal de l'entreprise met un terme brutal à ses projets, et va jusqu'à entraîner l'arrestation du cinéaste le 30 janvier 1976. Inculpé de fraude fiscale, le metteur en scène alors en pleines répétitions d'un spectacle, est emmené par la police pour un interrogatoire. Il est relâché une fois l'entretien terminé. L'événement fait la une des journaux et engendre un véritable battage médiatique. Empreint d'une vive émotion, le cinéaste se cloître chez lui ; sous l'impulsion de sa femme, il est conduit à l'hôpital psychiatrique quelques jours après. Ingmar Bergman apprend que les poursuites à son encontre sont finalement abandonnées un mois plus tard, tandis qu'il se repose dans sa maison sur l'île de Fårö. Le 22 avril, il publie par voie de presse une lettre ouverte dans laquelle il s'explique de ses démêlés avec le Trésor public et annonce qu'il quitte la Suède. Il se rend d'abord à Paris, mais la pression médiatique dont il y fait l'objet l'engage à changer ses plans. Il s'installe finalement à Munich.  
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En août [[1958]], dans les studios suédois de [[Råsunda]], Ingmar Bergman tourne son vingtième film, ''[[Le Visage]]'' (''Ansiktet'', 1958) dans lequel il explore à nouveau le monde de la représentation. En dépit du talent qui lui est désormais reconnu<ref>François Truffaut, ''L’œuvre d’Ingmar Bergman'', op. cit., p. 263-268 ; [[Jean-Luc Godard]], ''Bergmanorama'' ''in'' ''Ingmar Bergman, le cinéma, le théâtre, le livre'', Gremese, [[1999]], p. 58-64.</ref>, les films suivants, ''[[La Source]]'' (''Jungfrukällan'', [[1960]]) et ''[[L'Œil du diable]]'' (''Djävulens öga'', 1960) sont peu appréciés par la critique<ref>À propos de ''La Source'' : [[Jean Domarchi]], ''Cannes 1960'', Cahiers du cinéma, juin [[1960]], n° 108, p.42, et [[Louis Marcorelles]], ''Au pied du mur'', Cahiers du cinéma, février [[1961]], n° 116 p. 51-53 ; à propos de ''l’Œil du diable'' : [[Pierre Billard]], ''L’Œil du diable'', Cinéma 62, Février [[1962]], n°63, p. 102-103.</ref>. Il faut attendre ''[[À travers le miroir]]'' (''Såsom i en spegel'', 1961), pour que le [[cinéaste]] regagne ses lauriers<ref>[[Jacques Doniol-Valcroze]], ''Ouvert sur ces oiseaux uniques'', Cahiers du cinéma, novembre [[1962]], n°137, p. 48-50 ; Jean Béranger, ''Ouverture pour le cinéma de chambre'', Cinéma 62, n°69, septembre-octobre 1962, p. 41-45 ; [[Gilbert Salachas]], ''À travers le miroir'', Téléciné, Octobre-Novembre 1962, n°107</ref>. Le film a des résonances [[métaphysique]]s, cherchant l'existence de Dieu par le truchement de la folie de son personnage principal, Karin, interprété par Harriet Andersson<ref>Jacques Doniol-Valcroze, ''Ouvert sur ces oiseaux uniques'', [[op.cit.]], p. 48</ref>. Il est aussi initialement annoncé par Ingmar Bergman comme le premier opus d'un triptyque de « films de chambre », complété par ses deux films suivants : ''[[Les Communiants]]'' (''Nattvardsgästerna'', [[1963]]) et ''[[Le Silence (film, 1963)|Le Silence]]'' (''Tystnaden'', 1963)<ref>Jean Béranger, ''Ouverture pour le cinéma de chambre'', [[op.cit.]].</ref>. Mais le cinéaste revient plus tard sur cette intention de constituer une trilogie. ''À travers le miroir'' marque selon lui la fin d'un cycle et ''Les Communiants'', une rupture<ref>Olivier Assayas et Stig Björkman, ''Conversation avec Bergman'', op. cit., p. 90-92.</ref>. Ce dernier film, très inspiré de la figure de son père<ref>Ibid.</ref>, règle ses comptes avec Dieu au travers d’un pasteur qui perd la foi ; l’existence de Dieu se trouve brusquement ébranlée et le monde apparaît aux yeux du personnage dans toute sa crudité<ref>[[Patrick Bureau]], ''Il fait froid sur Mars'', ''Les Communiants'', Cinéma 65, n°97, p. 114.</ref>. ''Le Silence'' ne contient aucune thématique religieuse, contrairement aux deux précédents films. Il traite de la relation trouble qu’entretiennent deux sœurs sur fond d’état de siège dans un pays inconnu. Si, par ailleurs, le film choque une partie de l’opinion à cause de scènes explicites<ref>''Des ciseaux en acier suédois'', Cinéma 64, n° 82, p. 25</ref>, il reçoit les éloges de la critique et fait figure de chef d’œuvre<ref>''Un éloquent silence'', Cinéma 63, n°81, p. 17.</ref>.
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Ingmar Bergman se trouve alors dans une bonne situation financière. Il épouse une [[pianiste]] professionnelle, Käbi Laretei, dont il a un enfant ([[Daniel Bergman|Daniel]]) et s’installe à [[Djursholm]]. Après l’échec d’une mise en scène théâtrale, il consacre davantage son temps au cinéma.  
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Le séjour allemand dure  neuf années. Ingmar Bergman retisse progressivement des liens avec la Suède. Il y retourne passer des vacances et effectue notamment une mise en scène du ''Roi Lear'' au Théâtre dramatique de Stockholm en 1983. Il est contraint d'y poser sa caméra pour le film ''Fanny et Alexandre'' (''Fanny och Alexander'', 1982) inspiré en partie de souvenirs d'enfance.  
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En [[1963]], il est nommé directeur du [[Théâtre royal dramatique]] de [[Stockholm]].
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Ingmar Bergman prend sa décision de se retirer du cinéma en 1982. La retraite annoncée reste pourtant active. La suite de sa carrière depuis lors se concentre, certes à un rythme moins soutenu qu'auparavant, au théâtre et à la réalisation de téléfilms. Une partie des téléfilms vont encore faire l'objet de sortie en salle, mais contre la volonté du réalisateur, pour qui ces œuvres audiovisuelles sont uniquement destinées au petit écran.
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En [[1976]], suite à des ennuis avec la police [[fisc]]ale, il part s'installer à [[Munich]].
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Le cinéaste s'attache très nettement à distinguer son œuvre cinématographique qu'il estime achevée avec ''Fanny et Alexandre'', de son œuvre télévisuelle qui perdure. Reste que cette dernière emprunte les mêmes thématiques et questionnements et, à cet égard, il est difficile de s'empêcher de les mettre en perspective. Les téléfilms qu'Ingmar Bergman réalise, évoquent par exemple, comme d'autres films, le processus créatif et s'inspirent de sa propre histoire. Si l'on exclut l'idée d'une continuité, ils peuvent sans doute être vus comme une forme de résonance des thèmes et intrigues de ses films, comme une réflexion sur son œuvre cinématographique.  
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En [[1983]], à la sortie de ''[[Fanny et Alexandre]]'', il annonce qu'il prend sa [[retraite]] (mais il tournera quelques [[téléfilm]]s, dont certains seront malgré tout présentés en salles).
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Depuis 1995, l'année où sa femme Ingrid décède d'un cancer de l'estomac, le cinéaste estime avoir perdu le goût de la vie. Il en fait l'aveu en 2000, lors d'un entretien télévisé en compagnie d'Erland Josephson : « Continuer à vivre me laisse indifférent. Je tente de maintenir ma vie en ordre, de respecter un schéma. Je me lève à six heures, je travaille méthodiquement le matin. Ensuite il y a le théâtre. Mais le fait même de vivre est lourd. »  Après la sortie de ''Sarabande'', Ingmar Bergman cesse toute activité artistique. Il meurt le 30 juillet 2007 à l’âge de 89 ans dans sa maison sur l’île de Fårö, le même jour que [[Michelangelo Antonioni]].
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Il meurt le {{date|30|juillet|2007}} à l’âge de 89 ans dans sa maison suédoise de l’île de [[Fårö]], le même jour que [[Michelangelo Antonioni]].
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=== Filmographie ===
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( Réalisateur et scénariste)
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== Collaboration avec [[Liv Ullmann]] ==
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Frappé par la ressemblance de [[Liv Ullmann]] avec [[Bibi Andersson]], il écrit le scénario de ''[[Persona (film)|Persona]]'' dans lequel il dirige les deux actrices. Ce film marque le début d'une longue et fructueuse collaboration entre le réalisateur suédois et Liv Ullmann. ''[[L'Heure du loup (film)|L'Heure du loup]]'', ''[[Une passion]]'', ''[[Scènes de la vie conjugale]]'' et surtout ''[[Cris et chuchotements]]'' sont à cet égard les films où les talents conjugués du réalisateur et l'interprétation de Liv Ullmann sont les plus notables. Cette collaboration se poursuit dans le temps, puisque le réalisateur la sollicite encore en [[2003 à la télévision|2003]], avec ''[[Sarabande (film, 2003)|Sarabande]]''. Liv Ullmann et Ingmar Bergman ont aussi vécu ensemble pendant plusieurs années et ont eu une fille, Linn Ullmann qui jouera d'ailleurs, enfant, dans certains des films de son père. Il offre le scénario d' ''[[Infidèle (film, 2000)|Infidèle]]'' à Liv Ulmann, qui réalisera en [[2000 au cinéma|2000]] ce film dédié à leur couple, décrit avec franchise.
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== Filmographie ==
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=== Réalisateur et scénariste ===
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* [[1946 au cinéma|1946]] : ''[[Crise (1946)|Crise]]'' (''Kris'')
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* 1946 : ''Crise'' (''Kris'')
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* [[1946 au cinéma|1946]] : ''[[Il pleut sur notre amour]]'' (''Det regnar på vår kärlek'')
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* 1946 : ''Il pleut sur notre amour'' (''Det regnar på vår kärlek'')
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* [[1947 au cinéma|1947]] : ''[[L'Éternel mirage]]'' (''Skepp till India land'')
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* 1947 : ''L'Éternel mirage'' (''Skepp till India land'')
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* [[1948 au cinéma|1948]] : ''[[Musique dans les ténèbres]]'' (''Musik i mörker'')
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* 1948 : ''[[Musique dans les ténèbres]]'' (''Musik i mörker'')
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* [[1948 au cinéma|1948]] : ''[[Ville portuaire]]'' (''Hamnstad'')
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* 1948 : ''Ville portuaire'' (''Hamnstad'')
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* [[1949 au cinéma|1949]] : ''[[La Prison]]'' (''Fängelse'')
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* 1949 : ''[[La Prison]]'' (''Fängelse'')
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* [[1949 au cinéma|1949]] : ''[[La Fontaine d'Aréthuse]]'' ou ''[[La Soif]]'' (''Törst'')
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* 1949 : ''La Fontaine d'Aréthuse'' ou ''La Soif'' (''Törst'')
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* [[1950 au cinéma|1950]] : ''[[Vers la joie]]'' (''Till glädje'')
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* 1950 : ''Vers la joie (Till glädje)''
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* [[1950 au cinéma|1950]] : ''[[Cela ne se produirait pas ici]]'' (''Sånt händer inte här'')
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* 1950 : ''Cela ne se produirait pas ici'' (Sånt händer inte här)
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* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Jeux d'été]]'' (''Sommarlek'')
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* 1951 : ''[[Jeux d'été]]'' (Sommarlek)
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* [[1952 au cinéma|1952]] : ''[[L'Attente des femmes]]'' (''Kvinnors väntan'')
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* 1952 : ''L'Attente des femme''s (Kvinnors väntan)
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* [[1953 au cinéma|1953]] : ''[[Un été avec Monika]]'' ou ''[[Monika et le désir]]'' (''Sommaren med Monika'')
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* 1953 : ''Un été avec Monika ou [[Monika et le désir]] (Sommaren med Monika)''
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* [[1953 au cinéma|1953]] : ''[[La Nuit des forains]]'' (''Gycklarnas afton'')
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* 1953 : ''La Nuit des forains (Gycklarnas afton)''
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* [[1954 au cinéma|1954]] : ''[[Une leçon d'amour]]'' (''En Lektion i kärlek'')
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* 1954 : ''Une leçon d'amour (En Lektion i kärlek)''
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* [[1955 au cinéma|1955]] : ''[[Rêve de femmes]]'' (''Kvinnodröm'')
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* 1955 : ''Rêve de femmes'' (Kvinnodröm)
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* [[1955 au cinéma|1955]] : ''[[Sourires d'une nuit d'été]]'' (''Sommarnattens leende'')
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* 1955 : ''{{Pmw|SouriresDuneNuitD%e9t%e9|Sourires d'une nuit d'été}}'' (Sommarnattens leende)
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* [[1957 au cinéma|1957]] : ''[[Le Septième Sceau|Le Septième sceau]]'' (''Sjunde inseglet, Det'')
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* 1957 : ''{{Pmw|Le Septième Sceau}}'' (Det sjunde inseglet)
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* [[1957 à la télévision|1957]] : ''[[Herr Sleeman kommer]]'' (TV)
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* 1957 : ''Herr Sleeman kommer''
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* [[1957 au cinéma|1957]] : ''[[Les Fraises sauvages]]'' (''Smultronstället'')
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* 1957 : ''{{Pmw|Les Fraises sauvages}}'' (Smultronstället)
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* [[1958 au cinéma|1958]] : ''[[Au seuil de la vie]]'' (''Nära livet'')
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* 1958 : ''Au seuil de la vie'' (Nära livet)
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* [[1958 à la télévision|1958]] : ''[[Venetianskan]]'' (TV)
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* 1958 : ''Venetianskan''
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* [[1958 au cinéma|1958]] : ''[[Rabies]]''
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* 1958 : ''Rabies''
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* [[1958 au cinéma|1958]] : ''[[Le Visage]]'' (''Ansiktet'')
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* 1958 : ''Le Visage'' (Ansiktet)
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* [[1960 au cinéma|1960]] : ''[[La Source]]'' (''Jungfrukällan'')
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* 1960 : ''[[La Source]]'' (Jungfrukällan)
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* [[1960 au cinéma|1960]] : ''[[L'Œil du diable]]'' (''Djävulens öga'')
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* 1960 : ''L'Œil du diable'' (Djävulens öga)
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* [[1961 au cinéma|1961]] : ''[[À travers le miroir]]'' (''Såsom i en spegel'')
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* 1961 : ''[[À travers le miroir]]'' (Såsom i en spegel)
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* [[1963 au cinéma|1963]] : ''[[Les Communiants]]'' (''Nattvardsgästerna'')
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* 1963 : [[Les Communiants]] (Nattvardsgästerna)
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* [[1963 au cinéma|1963]] : ''[[Le Silence (film, 1963)|Le Silence]]'' (''Tystnaden'')
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* 1963 : [[Le Silence]] (Tystnaden)
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* [[1964 au cinéma|1964]] : ''[[Toutes ses femmes]]'' (''För att inte tala om alla dessa kvinnor'')
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* [[1965 à la télévision|1965]] : ''[[Don Juan (téléfilm)|Don Juan]]'' (feuilleton TV)
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* 1964 : ''Toutes ses femmes'' (För att inte tala om alla dessa kvinnor)
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* [[1966 au cinéma|1966]] : ''[[Persona (film)|Persona]]''
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* 1965 : ''Don Juan'' (feuilleton TV)
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* [[1967 au cinéma|1967]] : ''Daniel'' sketch pour ''[[Stimulantia]]''
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* 1966 : ''{{Pmw|Persona}}''
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* [[1968 au cinéma|1968]] : ''[[L'Heure du loup (film)|L'Heure du loup]]'' (''Vargtimmen'')
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* 1968 : ''L'Heure du loup'' (Vargtimmen)
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* [[1968 au cinéma|1968]] : ''[[La Honte (film, 1968)|La Honte]]'' (''Skammen'')
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* 1968 : ''La Honte'' (Skammen)
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* [[1969 à la télévision|1969]] : ''[[Le Rite]]'' (''Riten'') (TV)
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* 1969 : ''Le Rite'' (Riten)
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* [[1969 au cinéma|1969]] : ''[[Une passion]]'' (''En Passion'')
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* 1969 : ''Une passion'' (En Passion)
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* [[1971 au cinéma|1971]] : ''[[Le Lien]]'' (''Beröringen'')
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* 1971 : ''Le Lien'' (Beröringen)
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* [[1972 au cinéma|1972]] : ''[[Cris et chuchotements]]'' (''Viskningar och rop'')
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* 1972 : ''{{Pmw|Cris et chuchotements}}'' (Viskningar och rop)
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* [[1973 au cinéma|1973]] : ''[[Scènes de la vie conjugale]]'' (''Scener ur ett äktenskap'')
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* 1973 : ''[[Scènes de la vie conjugale]]'' (Scener ur ett äktenskap)
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* [[1974 au cinéma|1974]] : ''[[Misantropen]]'' (TV)
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* 1974 : ''Misantropen'' (TV)
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* [[1975 au cinéma|1975]] : ''[[La Flûte enchantée (film, 1975)|La Flûte enchantée]]'' (''Trollflöjten'')
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* 1975 : ''La Flûte enchantée'' (Trollflöjten)
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* [[1976 au cinéma|1976]] : ''[[Face à face]]'' (''Ansikte mot ansikte'')
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* 1976 : ''Face à face'' (Ansikte mot ansikte)
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* [[1977 au cinéma|1977]] : ''[[L'Œuf du serpent]]'' (''The Serpent's Egg'')
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* 1977 : ''[[L'Œuf du serpent]]'' (The Serpent's Egg)
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* [[1978 au cinéma|1978]] : ''[[Sonate d'automne]]'' (''Höstsonaten'')
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* 1978 : ''{{Pmw|SonateDautomne|Sonate d'automne}}'' (Höstsonaten)
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* [[1979 au cinéma|1979]] : ''[[Mon île Faro]]'' (''Fårö-dokument'')
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* 1979 : ''Mon île Faro'' (Fårö-dokument)
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* [[1980 au cinéma|1980]] : ''[[De la vie des marionnettes]]'' (''Aus dem Leben der Marionetten'')
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* 1980 : ''[[De la vie des marionnettes]]'' (Aus dem Leben der Marionetten)
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* [[1982 au cinéma|1982]] : ''[[Fanny et Alexandre]]'' (''Fanny och Alexander'')
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* 1982 : ''{{Pmw|Fanny et Alexandre}}'' (Fanny och Alexander)
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* [[1983 au cinéma|1983]] : ''[[Hustruskolan]]'' (TV)
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* 1983 : ''Hustruskolan'' (TV)
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* [[1984 au cinéma|1984]] : ''[[Karins ansikte]]'' (court-métrage)
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* 1984 : ''{{Pmw|Après la répétition}}'' (''Efter repetitionen'') (TV)
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* [[1984 au cinéma|1984]] : ''[[Après la répétition]]'' (''Efter repetitionen'') (TV)
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* 1986 : ''Två saliga, De'' (TV)
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* [[1986 au cinéma|1986]] : ''[[Dokument Fanny och Alexander]]''
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* 1992 : ''La Marquise de Sade (Markisinnan de Sade)''
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* [[1986 au cinéma|1986]] : ''[[De Två saliga]]'' (TV)
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* 1993 : ''Backanterna''
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* [[1992 au cinéma|1992]] : ''[[La Marquise de Sade]]'' (''Markisinnan de Sade'') (TV)
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* 1995 : ''Sista skriket''
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* [[1993 au cinéma|1993]] : ''[[Backanterna]]'' (TV)
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* 1997 : ''En présence d'un clown (Larmar och gör sig till)''
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* [[1995 au cinéma|1995]] : ''[[Sista skriket]]'' (TV)
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* 2000 : ''Bildmakarna''
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* [[1997 au cinéma|1997]] : ''[[En présence d'un clown]]'' (''Larmar och gör sig till'') (TV)
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* 2003 : ''{{Passion|f2/sarabande.htm|Sarabande}}'' (Saraband)
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* [[2000 au cinéma|2000]] : ''[[Bildmakarna]]'' (TV)
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* [[2003 au cinéma|2003]] : ''[[Sarabande (film, 2003)|Sarabande]]'' (Saraband) (TV)
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[[Image:Filmstaden.jpg|thumb|right|Studios de la Filmstaden, en [[Suède]]]]
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''' Distinctions'''
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; Oscar du cinéma : 6 nominations
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=== Scénariste ===
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{{liste scénaristes}}
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* [[1944 au cinéma|1944]] : ''[[Tourments (film, 1944)|Tourments]]'' (''Hets'')
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* [[1947 au cinéma|1947]] : ''[[Kvinna utan ansikte]]'' de [[Gustaf Molander]]
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* [[1948 au cinéma|1948]] : ''[[Eva (film, 1948)|Eva]]'' (ou ''Sensualité'') de Gustaf Molander
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* [[1950 au cinéma|1950]] : ''[[Medan staden sover]]'' de [[Lars-Eric Kjellgren]]
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* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Frånskild]]'' de Gustaf Molander
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* [[1956 au cinéma|1956]] : ''[[Sista paret ut]]'' de [[Alf Sjöberg]]
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* [[1957 au cinéma|1957]] : ''[[Nattens ljus]]'' de Lars-Eric Kjellgren
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* [[1990 à la télévision|1990]] : ''[[A Little Night Music]]'' de [[Scott Ellis]] (TV)
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* [[1992 au cinéma|1992]] : ''[[Les Meilleures Intentions]]'' (''Den Goda viljan'') de [[Bille August]]
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* [[1992 au cinéma|1992]] : ''[[Söndagsbarn]]'' de [[Daniel Bergman]]
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* [[1996 à la télévision|1996]] : ''[[Entretiens Privés]]'' (''Enskilda samtal'') de [[Liv Ullmann]] (TV)
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* [[2000 au cinéma|2000]] : ''[[Infidèle (film, 2000)|Infidèle]]'' (''Trolösa'') de Liv Ullmann
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== Citations ==
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=== D’Ingmar Bergman ===
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*{{Citation|Il faut tourner chaque film comme si c’était le dernier}}<ref name="Citation">Citations tirées du site [http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=ingmar-bergman]</ref>
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*{{Citation|C’est l’ombre de la mort qui donne relief à la vie}}<ref name="Citation" />
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*{{Citation|On naît sans but, on vit sans comprendre, et on meurt anéanti}}<ref name="Citation" />
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*{{Citation|C’est quand je prie que je crois être croyant}}<ref name="Citation" />
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*{{Citation|La vieillesse est comparable à l’ascension d'une montagne. Plus vous montez, plus vous êtes fatigué et hors d’haleine, mais combien votre vision s’est élargie !}}<ref name="Citation" />
+
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*{{Citation|La première chose que doivent apprendre les jeunes élèves d’art dramatique, ce n’est pas l’ivresse du théâtre mais bien ses exigences}}<ref name="Citation" />
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*{{Citation|Rien de plus facile que d’effrayer un spectateur. On peut littéralement l’affoler, car la plupart des gens ont dans quelque partie de leur être une peur toute prête à éclore}}<ref name="Citation" />
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*{{Citation|Le cinéma en tant que rêve, le cinéma en tant que musique. Aucun art ne traverse, comme le cinéma, directement notre conscience diurne pour toucher à nos sentiments, au fond de la chambre crépusculaire de notre âme}}<ref>Ingmar Bergman, ''Laterna Magica'', édition Gallimard 1987, p 91</ref>
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=== Sur Ingmar Bergman ===
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*{{Citation|Bergman est réellement l’exemple vivant de ce que j’entends par spectacle, c’est-à-dire qu'il démontre qu'en art tous les moyens sont licites… Sa façon de raconter, la richesse de son tempérament sont exactement ce qui convient à un homme de spectacle, c’est-à-dire un mélange de magicien et de prestidigateur, de prophète et de clown, de vendeur de cravates et de prêtre…}} de [[Federico Fellini]]<ref>[[Federico Fellini]], [[Les Nouvelles Littéraires]] du {{date|10|février|1983}}</ref>
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== Distinctions ==
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; [[Oscar du cinéma]] :
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* [[1960 au cinéma|1960]] : Nommé à l'[[Oscar du meilleur scénario original]] pour ''[[Les Fraises sauvages]] (Smultronstället)''
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* [[1963 au cinéma|1963]] : Nommé à l’Oscar du meilleur scénario original pour ''[[À travers le miroir]] (Såsom i en spegel)''
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* [[1974 au cinéma|1974]] : Nommé à l’[[Oscar du meilleur réalisateur]], du meilleur scénario original, et du [[Oscar du meilleur film|meilleur film]] pour ''[[Cris et chuchotements]] (Viskningar och rop)''
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* [[1977 au cinéma|1977]] : Nommé à l’Oscar du meilleur réalisateur pour ''[[Face à face]] (Ansikte mot ansikte)''
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* [[1979 au cinéma|1979]] : Nommé à l’Oscar du meilleur scénario original pour ''[[Sonate d'automne]] (Höstsonaten)''
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* 1960 : Mention spéciale pour ''La Source (Jungfrukällan)''
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== Notes et références ==
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=== Bibliographie ===
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==== Écrits de Bergman ====
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*''Images'', [[Gallimard]], Paris, 1992
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*''Les meilleures intentions'', [[Gallimard]], Paris, 1992
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*''Laterna Magica'', [[Gallimard]], Paris, 1987
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==== Scénarios ====
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; Mostra de Venise :
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Ingmar Bergman, Œuvres 1 (la typographie du 1 est en fait une "étoile"), trad. et adapt. du suédois par C. G. Bjurström et Maurice Pons (avec une introduction d'Ingmar Bergman), 453 pages, Robert Laffont, 1962. <br /> Ouvrage regoupant les scénarios de "Sommarlek", "La nuit des forains", Sourires d'une nuit d'été", Le septième sceau", "Les fraises sauvages" et "Le visage".
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*Ingmar Bergman, ''Une trilogie'', trad. et adapt. J. Robnard, 271 pages, Robert Laffont, 1964.<br /> Ouvrage regroupant les scénarios de ''[[Comme dans un miroir]]'', ''[[Les Communiants]]'' et ''[[Le Silence (film, 1963)|Le Silence]]''
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* Ingmar Bergman, ''L'œuf du serpent'', trad. par C. G. Bjurström et Lucie Albertini, Gallimard, 1978
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*Ingmar Bergman, ''Les meilleurs intentions'' {{ISBN|2070389502}}, édité par [[Gallimard]], 496 pages, 1994
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*Ingmar Bergman, ''Fanny et Alexandre'' {{ISBN|2070405648}}, édité par [[Gallimard]], 274 pages, 1998
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* 1971 : [[Lion d'or]] pour sa carrière
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[[Catégorie:Naissance en 1918]]
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Ernst Ingmar Bergman , metteur en scène, scénariste et réalisateur suédois, né à Uppsala le 14 juillet 1918 et mort le 30 juillet 2007 sur l'île de Fårö.

Biographie

Ingmar Bergman naît en 1918. Il est le fils cadet d'une famille de trois enfants : un frère aîné, Dag, et une sœur plus jeune, Margareta, qui vient au monde quatre ans plus tard. Le jeune Ingmar Bergman vit une enfance tourmentée ; ses relations avec sa mère et son frère sont contrariées par les manipulations et les chantages affectifs. Le père est un pasteur luthérien ambitieux. Le presbytère où vit la famille est ouvert à tous les paroissiens et se doit d'être modèle. Sans doute cédant à cette pression sociale, le père soumet sa famille à une discipline extrêmement rigide. Les enfants sont élevés dans la traque obsessionnelle du péché et du repentir. Les punitions corporelles sont courantes et ritualisées. L’auteur conserve un traumatisme de cette éducation rigide qui affleure dans certaines de ses œuvres.

C’est au sein des proches de la famille qu’il s’épanouit. Il passe le meilleur de son enfance chez sa grand-mère à Uppsala qui l'emmène au cinéma. Ingmar Bergman se découvre pour cet art une passion précoce. Lors d'un Noël, une riche parente fait cadeau aux enfants d'un cinématographe. L'appareil est doté de lentilles et d'un système de projection.

Il se rend régulièrement au théâtre depuis tout jeune. Ingmar Bergman a l’occasion de l’observer en coulisse grâce à un musicien qui joue derrière la scène pour une mise en scène du Songe d’August Strindberg.

Dans le cadre d’un programme d’échange, il part pour l’Allemagne, dans la région de Thuringe, en 1934. Le pays est alors plongé dans la tourmente nazie. Sa famille d’accueil l'emmène assister à une prestation d'Adolf Hitler dans un stade sportif à Weimar. Il se retrouve fasciné par le discours du Führer. De retour en Suède, le milieu dans lequel il vit, essentiellement germanophile, est de la même façon imprégné par l’idéologie nazie. Son frère est un des fondateurs et membre actif du parti national-socialiste suédois. Le traumatisme de la découverte des camps d'extermination par la suite le conduira à prendre ses distances avec la politique.

Ingmar Bergman s'inscrit en 1937 en Histoire et Littérature à l'université de Stockholm. Il y suit des cours de Martin Lamm, professeur réputé, spécialiste de Strindberg et d’Emanuel Swedenborg. Ses études, cependant, sont contrariées par un emploi du temps chargé, quasi entièrement consacré au théâtre.

Au printemps 1939, dans la nécessité de trouver un emploi, il tente sans succès de se faire embaucher au Théâtre dramatique royal de Stockholm, et doit se rabattre sur un poste d’assistant à la mise en scène à l’Opéra royal où il est occasionnellement souffleur. La Seconde Guerre mondiale éclate quand Ingmar Bergman doit accomplir son service national mais il est aussitôt démobilisé à cause d'un ulcère. En repos chez sa grand-mère en Dalécarlie, il écrit une douzaine de pièces de théâtre et un opéra. Il met en scène l’une d’elles, La Mort de Polichinelle, largement inspirée de pièces de Strindberg. À la fin de la représentation, il est approché par Carl Anders Dymling, directeur de la Svensk Filmindustri, et Stina Bergman, directrice du service des scénarios, qui lui proposent un emploi pour écrire et revoir les scénarios produits par la société.

Intégré dans une équipe de six scénaristes, il est parfois envoyé sur des tournages pour corriger des dialogues. Les méthodes d’écriture sont empruntées aux méthodes américaines alors en vogue. Ingmar Bergman leur préfère pourtant les films français de l’époque : Jean Renoir, Marcel Carné, Julien Duvivier. Il fait la connaissance de Gustaf Molander à qui il fait lire un scénario inspiré de ses années d’études. Celui-ci en recommande l'adaptation à la production qui confie la réalisation à Alf Sjöberg.

Dans le même temps, la commune de Helsingborg cherche à sauver son théâtre municipal et propose sa direction à Ingmar Bergman. Le théâtre est en piteux état mais il accepte. Il est alors marié à une jeune danseuse et chorégraphe, Else Fischer, qui a accouché d’une enfant à la fin de l’année 1943. Le bébé et sa mère sont atteints de la tuberculose et Ingmar Bergman enchaîne mises en scène et scénarios pour faire face aux frais d’hospitalisation. En 1945, la Svensk Filmindustri lui commande l’adaptation et la réalisation d’une pièce de théâtre. Ingmar Bergman est enthousiaste mais il pèche par orgueil et néglige son manque d'expérience. Le tournage a lieu en été dans des conditions catastrophiques. Il se fait un ennemi du chef opérateur, davantage porté sur le documentaire, il peine à maîtriser ses troupes, le mauvais temps se met de la partie lors des extérieurs, le laboratoire gâche les pellicules et la production du film doit souffrir d’un accident du travail lors d’une prise en studio. Tout au long de l’épreuve, il recueille les conseils du cinéaste Victor Sjöström et ceux, avisés, de son monteur expérimenté, Oscar Rosander, qui l’aide à remettre le film sur pied. Crise (Kris), premier film réalisé par Ingmar Bergman, sort en 1946.

Ingmar Bergman poursuit son travail au théâtre municipal de Helsingborg et continue à écrire des scénarios pour la Svensk Filmindustri. Il monte l’une de ses pièces, Rachel et l’ouvreuse de cinéma, qu’il adaptera plus tard pour L'Attente des femmes. Sa femme qui devait initialement pourvoir un poste de chorégraphe au sein du théâtre doit être remplacée en raison de sa maladie. Elle lui recommande une amie : Ellen Lundström avec laquelle il noue une liaison qui conduit les époux à divorcer. À l’automne 1946, le jeune couple déménage pour Göteborg où Ingmar Bergman obtient un poste de metteur en scène au théâtre municipal. L’endroit est sous la coupe de son directeur Torsten Hammarén qui devient son mentor et lui enseigne des techniques de mise en scène pour une pièce d’Albert Camus, Caligula, avec le comédien Anders Ek.

Après l’échec de Crise, la Svensk Filmindustri rechigne à renouveler l’expérience de la réalisation avec Ingmar Bergman. C’est donc avec le producteur Lorens Marmstedt, qu’il dirige ses trois prochains films : Il pleut sur notre amour (Det regnar på vår kärlek, 1946), L'Éternel Mirage (Skepp till India land, 1947) et Musique dans les ténèbres (Musik i mörker, 1948). Ces premiers films sont très empreints de l’influence du cinéma français des années 1930 et notamment de Marcel Carné.

Durant l’été 1950, Ingmar Bergman traverse alors de graves difficultés financières et doit solliciter un important prêt à la Svensk Filmindustri qui le lui consent en échange d’une exclusivité sur plusieurs scénarios et des honoraires à la baisse. Il accepte de réaliser des films publicitaires pour des savons et une œuvre de commande, Une telle chose ne se produirait pas ici.

Ingmar Bergman est nommé directeur artistique du Théâtre municipal de Malmö en 1952. Il exécute plusieurs mises en scène, certaines puisant dans le répertoire classique (Peer Gynt, Le Misanthrope), des opérettes (La Veuve joyeuse) ainsi que deux de ses propres pièces : Peinture sur bois et Meurtre à Bajärna. Le travail théâtral de l’auteur se double d’une intense activité cinématographique. Il sort successivement La Nuit des forains (Gycklarnas afton, 1953), Une leçon d'amour (En Lektion i kärlek, 1954) et Rêve de femmes (Kvinnodröm). À l’automne 1955, après le tournage de Sourires d'une nuit d'été (Sommarnattens leende, 1955), victime du surmenage et d’un ulcère qu’il traîne déjà depuis de nombreuses années, il est hospitalisé.

Déjà amorcée avec La Prison, la maturation du cinéma de Bergman est, à la veille de la réalisation du Septième Sceau, déjà accomplie. L’influence du cinéma français de l’avant-guerre s’est effacée au profit d’un style plus personnel. Ville portuaire (Hamnstad, 1948) ou Monika, sont encore influencés par le cinéma italien néoréaliste mais son style personnel s’affirme. On trouve dans les films qu’il dirige entre 1948 et 1955, nombre de caractéristiques de l’empreinte personnelle du réalisateur : interrogations métaphysiques sur la vie et la mort , érotisme prégnant, désillusion conjugale , le spectacle. Sa vision de la féminité notamment détonne. Dans cette thématique, son langage cinématographique se positionne davantage du côté de la femme ; c’est au travers de leur regard que l’attitude des hommes est brocardée : les personnages féminins sont nuancés quand les personnages masculins sont au contraire typés.

La réputation d’Ingmar Bergman passe les frontières suédoises avec Sourires d’une nuit d’été qui est sélectionné au Festival de Cannes en 1956. Le film, dont l'accouchement s'est fait dans la douleur, y fait figure d'une surprise appréciable et obtient d'ailleurs un « prix de l'humour poétique » (sic). Mais c’est lors de la sélection de l’année suivante, avec Le Septième Sceau, qu’il fait sensation. Le film, plus grave, est adapté de l’une de ses propres pièces en un seul acte (Peinture sur bois). L’intrigue sous forme d’allégorie tourne autour de la mort et du jugement dernier. L’accueil critique est enthousiaste. Le clou est enfoncé avec Les Fraises sauvages dans lequel il fait jouer l’un des pionniers du cinéma suédois, Victor Sjöström qui jouait déjà dans Vers la joie. Il décroche à cette occasion l’Ours d'or du meilleur film au Festival de Berlin.

La critique suédoise, jusque-là très réservée, se fait dorénavant moins sévère qu’elle n’était à l’égard de ses œuvres. Les studios suédois lui laissent les coudées franches et une pleine liberté de création. Le réalisateur reçoit aussi plusieurs sollicitations et de plusieurs pays pour tourner des films. Néanmoins, il préférera continuer à tourner en Suède. Ingmar Bergman a désormais l’habitude d’alterner théâtre, le courant de l’année, et cinéma, l’été. Il aime s’entourer de sa propre équipe et redoute le sort de certains de ses compatriotes, tels Victor Sjöström ou Mauritz Stiller qui s’expatrièrent aux États-Unis pour finalement tomber dans l'oubli.

Ingmar Bergman tombe sous le charme de l'île de Fårö. Il y bâtit une maison et y tourne plusieurs de ses films dont Persona. L'île sera aussi le sujet de deux documentaires qu'il lui consacre à dix ans d'intervalle, intitulés tous deux Mon île Faro (Fårö-dokument), en 1969 puis en 1979.

Ingmar Bergman épouse Ingrid von Rosen en novembre 1971, elle reste sa femme jusqu’à sa mort en 1995. Il fait un séjour avec elle à Los Angeles pour diriger un séminaire sur le cinéma. Il y rencontre des cinéastes comme William Wyler et Billy Wilder. Cependant, un contrôle fiscal de l'entreprise met un terme brutal à ses projets, et va jusqu'à entraîner l'arrestation du cinéaste le 30 janvier 1976. Inculpé de fraude fiscale, le metteur en scène alors en pleines répétitions d'un spectacle, est emmené par la police pour un interrogatoire. Il est relâché une fois l'entretien terminé. L'événement fait la une des journaux et engendre un véritable battage médiatique. Empreint d'une vive émotion, le cinéaste se cloître chez lui ; sous l'impulsion de sa femme, il est conduit à l'hôpital psychiatrique quelques jours après. Ingmar Bergman apprend que les poursuites à son encontre sont finalement abandonnées un mois plus tard, tandis qu'il se repose dans sa maison sur l'île de Fårö. Le 22 avril, il publie par voie de presse une lettre ouverte dans laquelle il s'explique de ses démêlés avec le Trésor public et annonce qu'il quitte la Suède. Il se rend d'abord à Paris, mais la pression médiatique dont il y fait l'objet l'engage à changer ses plans. Il s'installe finalement à Munich.

Le séjour allemand dure neuf années. Ingmar Bergman retisse progressivement des liens avec la Suède. Il y retourne passer des vacances et effectue notamment une mise en scène du Roi Lear au Théâtre dramatique de Stockholm en 1983. Il est contraint d'y poser sa caméra pour le film Fanny et Alexandre (Fanny och Alexander, 1982) inspiré en partie de souvenirs d'enfance.

Ingmar Bergman prend sa décision de se retirer du cinéma en 1982. La retraite annoncée reste pourtant active. La suite de sa carrière depuis lors se concentre, certes à un rythme moins soutenu qu'auparavant, au théâtre et à la réalisation de téléfilms. Une partie des téléfilms vont encore faire l'objet de sortie en salle, mais contre la volonté du réalisateur, pour qui ces œuvres audiovisuelles sont uniquement destinées au petit écran.

Le cinéaste s'attache très nettement à distinguer son œuvre cinématographique qu'il estime achevée avec Fanny et Alexandre, de son œuvre télévisuelle qui perdure. Reste que cette dernière emprunte les mêmes thématiques et questionnements et, à cet égard, il est difficile de s'empêcher de les mettre en perspective. Les téléfilms qu'Ingmar Bergman réalise, évoquent par exemple, comme d'autres films, le processus créatif et s'inspirent de sa propre histoire. Si l'on exclut l'idée d'une continuité, ils peuvent sans doute être vus comme une forme de résonance des thèmes et intrigues de ses films, comme une réflexion sur son œuvre cinématographique.

Depuis 1995, l'année où sa femme Ingrid décède d'un cancer de l'estomac, le cinéaste estime avoir perdu le goût de la vie. Il en fait l'aveu en 2000, lors d'un entretien télévisé en compagnie d'Erland Josephson : « Continuer à vivre me laisse indifférent. Je tente de maintenir ma vie en ordre, de respecter un schéma. Je me lève à six heures, je travaille méthodiquement le matin. Ensuite il y a le théâtre. Mais le fait même de vivre est lourd. » Après la sortie de Sarabande, Ingmar Bergman cesse toute activité artistique. Il meurt le 30 juillet 2007 à l’âge de 89 ans dans sa maison sur l’île de Fårö, le même jour que Michelangelo Antonioni.

Filmographie

( Réalisateur et scénariste)

  • 1946 : Crise (Kris)
  • 1946 : Il pleut sur notre amour (Det regnar på vår kärlek)
  • 1947 : L'Éternel mirage (Skepp till India land)
  • 1948 : Musique dans les ténèbres (Musik i mörker)
  • 1948 : Ville portuaire (Hamnstad)
  • 1949 : La Prison (Fängelse)
  • 1949 : La Fontaine d'Aréthuse ou La Soif (Törst)
  • 1950 : Vers la joie (Till glädje)
  • 1950 : Cela ne se produirait pas ici (Sånt händer inte här)
  • 1951 : Jeux d'été (Sommarlek)
  • 1952 : L'Attente des femmes (Kvinnors väntan)
  • 1953 : Un été avec Monika ou Monika et le désir (Sommaren med Monika)
  • 1953 : La Nuit des forains (Gycklarnas afton)
  • 1954 : Une leçon d'amour (En Lektion i kärlek)
  • 1955 : Rêve de femmes (Kvinnodröm)
  • 1955 : Sourires d'une nuit d'été (Sommarnattens leende)
  • 1957 : Le Septième Sceau (Det sjunde inseglet)
  • 1957 : Herr Sleeman kommer
  • 1957 : Les Fraises sauvages (Smultronstället)
  • 1958 : Au seuil de la vie (Nära livet)
  • 1958 : Venetianskan
  • 1958 : Rabies
  • 1958 : Le Visage (Ansiktet)
  • 1960 : La Source (Jungfrukällan)
  • 1960 : L'Œil du diable (Djävulens öga)
  • 1961 : À travers le miroir (Såsom i en spegel)
  • 1963 : Les Communiants (Nattvardsgästerna)
  • 1963 : Le Silence (Tystnaden)
  • 1964 : Toutes ses femmes (För att inte tala om alla dessa kvinnor)
  • 1965 : Don Juan (feuilleton TV)
  • 1966 : Persona
  • 1968 : L'Heure du loup (Vargtimmen)
  • 1968 : La Honte (Skammen)
  • 1969 : Le Rite (Riten)
  • 1969 : Une passion (En Passion)
  • 1971 : Le Lien (Beröringen)
  • 1972 : Cris et chuchotements (Viskningar och rop)
  • 1973 : Scènes de la vie conjugale (Scener ur ett äktenskap)
  • 1974 : Misantropen (TV)
  • 1975 : La Flûte enchantée (Trollflöjten)
  • 1976 : Face à face (Ansikte mot ansikte)
  • 1977 : L'Œuf du serpent (The Serpent's Egg)
  • 1978 : Sonate d'automne (Höstsonaten)
  • 1979 : Mon île Faro (Fårö-dokument)
  • 1980 : De la vie des marionnettes (Aus dem Leben der Marionetten)
  • 1982 : Fanny et Alexandre (Fanny och Alexander)
  • 1983 : Hustruskolan (TV)
  • 1984 : Après la répétition (Efter repetitionen) (TV)
  • 1986 : Två saliga, De (TV)
  • 1992 : La Marquise de Sade (Markisinnan de Sade)
  • 1993 : Backanterna
  • 1995 : Sista skriket
  • 1997 : En présence d'un clown (Larmar och gör sig till)
  • 2000 : Bildmakarna
  • 2003 : Sarabande (Saraband)

Distinctions

Oscar du cinéma 
6 nominations
Berlinale 
Festival de Cannes 
  • 1957 : Prix du jury pour Le Septième Sceau (Det sjunde inseglet)
  • 1958 : Prix du meilleur réalisateur pour Au seuil de la vie (Nära livet)
  • 1960 : Mention spéciale pour La Source (Jungfrukällan)
  • 1973 : Grand prix pour Cris et chuchotements (Viskningar och rop)
César du cinéma 
  • 1984 : César du meilleur film étranger pour Fanny et Alexandre (Fanny och Alexander)
Mostra de Venise 


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