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Alexandre Nikolayevich Sokourov est un réalisateur? russe, né le 14 juin 1951 à Podorvikha dans la région d'Irkoutsk. Filmographie
BiographieAprès des études au V.G.I.K., l'école de cinéma moscovite, vers la fin des années 7O, Sokourov s'est adressé pendant des années à un public imaginaire. Tel un artiste marginal et maudit, encouragé par l'amitié et le soutien de Tarkovski, qui voyait en lui l'un des "rares génies du cinéma". De quoi le maître parlait-il ? De Maria (1975-1988), ou de L'Offrande du soir (1984), documentaires d'un nouveau genre et fictions hantées par une menace irrémédiable. Car Sokourov est l'homme d'une seule et grande idée. Comme un leitmotiv glaçant, il y a la mort qui rôde, la perte à venir d'une présence magnifiée, même frêle et maladive. La pourriture du corps qui rejoint celle de l'âme. Cinéma sensuel et hypnotique, suspendu à un gouffre, tourné vers sa limite, vers l'instant crucial où tout disparaît, tout s'épuise. Comme rarement dans l'histoire du cinéma, la fabrication et l'expérience du film ressemblent ici à un acte préparatoire : un travail de deuil qui viendrait avant l'heure dite. Sokourov a la force d'un condamné lucide, conscient du déroulement tragique du temps, chantre d'une tristesse nécessaire qui autorise tous les lyrismes et toutes les flamboyances. Au coeur d'une partie de son oeuvre, la forme évasive et libre de l'élégie, qui donne leurs titres à quelques films déchirants - notamment Elégie moscovite (1987) et Elégie russe (1992) - et cadre le désir du cinéaste d'évoquer, avec précision et patience, des trajectoires infimes. Sokourov filme rarement des groupes. Les couples, chez lui, ne vivent que dans l'attente d'une inévitable séparation - ceux de Mère et fils (1997) ou de Père, fils. Ne restent que des êtres solitaires accablés par la perte - la mort d'un proche, d'un amour - ou confrontés à l'horreur - le crime et la guerre -; lancés dans l'immensité d'un paysage, d'une ville, de l'Histoire qui les dépasse et dont ils portent seuls la marque. Leur errance est tragique, leurs voyages sans destination, mais leur enfermement n'a rien d'un amour dépité pour le vide. Le dénuement, la pauvreté dans lesquels ils existent sont toujours à la hauteur de l'intensité de leurs expériences sensorielles. Sokourov leur donne, c'est son unique offrande, un cadre,une place entre la nature et l'art qu'ils occupent en aventuriers humbles et fatigués. Au-delà de la séparation insaisissable entre documentaire et fiction, il y a chez Sokourov deux tendances qui s'entrechoquent. L'une attachée à une forme de récit - Le Jour de l'éclipse (1988), Sauve et protège (1989) inspiré de Madame Bovary de Flaubert, Pages cachées (1993), d'après Crime et châtiment de Dostoïevski -, l'autre, plus proche du cinéma expérimental, marquée par d'incessantes recherches plastiques et parfois, un étonnant travail de montage - La Voix solitaire ...notamment, Mère et fils, Père, fils, et la plupart des élégies. Reste enfin le fantôme ultime, le spectre des spectres qui traverse l'ensemble de cette oeuvre, lui donne un souffle épique et une grandiloquence - même dans le plus petit des objets - qui achève d'en démontrer la splendeur. C'est l'amour de "l'âme russe" qui n'est pas la glorification nationaliste d'un mode de vie, mais la célébration de ce que Sokourov appelle "le pays de l'inspiration et de l'embellissement". C'est la force du souvenir, de la douleur imprimée au destin malheureux d'un peuple, au parcours chaotique d'une pensée. Voici un homme au chevet d'un grand malade dont on voit à chaque instant la trace, dans chaque personnage, derrière chaque colline, chaque ombre du ciel. Voici un cinéma unique et ambitieux, qui a la beauté poignante et cruelle d'une immense complainte. |