Recherchez sur ce site

Sommaire (edit)

Le cinéma

Liens

Développé grâce à: pmwiki.org

Changements Récents Version imprimable Edition

Après mai , film français réalisé par Olivier Assayas, sorti en 2012. Le film est présenté en compétition officielle à la Mostra de Venise et y reçoit le prix du meilleur scénario.

Analyse critique

Le film débute en 1971, donc un peu après mai 1968. Jeune étudiant, Gilles est pris dans l’effervescence politique de ces années-là. Il aspire pourtant surtout à peindre et à faire du cinéma, ce que lui reprochent ses camarades, pour qui l’engagement idéologique doit être total.

De rencontres amoureuses en découvertes artistiques, Gilles et ses amis vont devoir faire des choix décisifs pour trouver leur place dans leur époque tumultueuse.

Gilles est trop jeune pour avoir lancé des pavés trois ans plus tôt. Mais pris comme tant d'autres dans la grande affaire de l'époque : la résistance à l'ordre du monde, la foi en un renversement possible, qui passera par une lutte violente. Gilles vit dans une banlieue de Paris qui ressemble encore à une campagne et enfourche sa mobylette pour aller au bahut ou à la manifestation. Le film s'ouvre par celle, historique et durement réprimée, du 9 février 1971, maoïstes et gauchistes unis contre la police de Raymond Marcellin.

Dans ce film largement autobiographique, Olivier Assayas explique d’où il vient, le contexte politique, l’art, la musique. Passionné par la période de la fin des années 60 et du début des années 70 qui l’ont vu grandir et dont il revendique l’héritage culturel, Assayas n’avait pourtant jamais abordé cette période directement. Il lui a fallu d’abord raconter les histoires des autres (L’Eau froide, Carlos) pour enfin oser raconter sa propre histoire, celle d’un jeune étudiant parisien qui va passer du militantisme politique d’extrême gauche à l’apprentissage de l’art et du cinéma, ses véritables passions. Sans oublier l’amour de deux jeunes femmes, amours d’après mai, éveils des sens mais aussi sources d’inspiration artistique.

Le film montre comment un jeune homme impliqué dans le gauchisme va trouver sa voie en allant voir ailleurs, en réagissant contre la fidélité aveugle et stérile à une idéologie marxiste puis maoïste. Il se confronte à la réalité et fait passer ses idées dans l’art, y compris un art industriel et commercial comme le cinéma, sans jamais se vendre ou trahir ses idéaux de jeunesse, qu’ils soient esthétiques ou politiques.

L’avant-dernière scène montre Gilles à Londres assistant sur le tournage en studio d’un film fantastique de série B avec des Nazis, une fille en bikini et un dinosaure en carton. Dans la réalité Assayas débuta sa carrière comme stagiaire sur les plateaux du Riche et le Pauvre de Richard Fleischer avec son ami Laurent Perrin, disparu cette année et auquel le film est dédié. On devine qu’Assayas s’inspire de sa propre expérience et de ses souvenirs, mais la dimension romanesque du film prédomine.

Le film est presque entièrement dénué de dramatisation et avance, à coup de ralentissements et d’accélérations sur le chemin du souvenir et de l’évocation. Nous sommes dans une éducation sentimentale et une comédie humaine parfois déroutante, mais capable d’englober à partir d’un destin personnel toute la société française de l’époque, avec ses différentes classes et ses différents milieux tous parfaitement décrits par Assayas. Et même au-delà de la France, puisque le film offre de très belles digressions en Italie et à Londres, qui témoigne de la curiosité et du goût précoces d’Assayas pour les voyages et la découverte de cultures différentes.

Les reconstitutions des années 1970 sont faites avec amour et même un fétichisme assumé pour les objets, les accessoires, les étoffes, mais surtout les collections de vinyles et les pochettes de 33 tours. Les reconstitutions des années 1970 sont faites avec amour et même un fétichisme assumé pour les objets, les accessoires, les étoffes, mais surtout les collections de vinyles et les pochettes de 33 tours. Puis les journaux engagés et disparus : Tout, vendu à la sortie du lycée, ou Parapluie. Et les livres lus comme des bréviaires, la poésie de Gregory Corso, dont un extrait cité par le jeune héros met le film en question : « Je hais les vieux poètes /qui murmurent leur jeunesse passée ». Ces objets sont comme des repères temporels, des signes extérieurs et poétiques de ce qui nourrit les personnages.

Mais que pense vraiment Gilles ? Bien sûr, il participe aux réunions gauchistes où s'affrontent confusément les factions, et même aux derniers soubresauts du combat politique. Il se pose des questions quand la violence aveugle change de camp et conduit les gauchistes à gravement blesser un ouvrier. Mais il est aussi, à sa façon, absent au monde, flottant au gré des événements, refusant même les mains que lui tendent les filles. L'une fera couler dans ses veines le poison accompagnant souvent la contre-culture, l'autre s'étiolera dans un engagement de plus en plus parodique et aussi misogyne que l'ordre établi.

Gilles n'est lui-même que quand il peint, comme Assayas à l'époque. Cette passion devient vocation lors d'un passage central et lumineux du film, un voyage en Italie où le héros lâche la politique pour l'esthétique : choc visuel devant la beauté des paysages, mais aussi face à l'art du passé, ruines et fresques de Pompéi, notamment. Les militants acharnés transformés en touristes romantiques, Gilles et Christine, celle qui ne cessera jamais de l'aimer, deviennent un instant les archétypes d'une jeunesse française éternelle, bobos et routards mêlés.

En choisissant l'art, le dessin puis le cinéma, Gilles montre que la révolution doit être intime et individuelle. Après Mai touchera tous ceux et celles qui, un jour ou l'autre, se sont interrogés sur leur engagement dans la société, sur leur vie affective et professionnelle, et leur capacité à en modifier le cours.

Distribution

  • Clément Métayer : Gilles
  • Lola Créton : Christine
  • Carole Combes : Laure
  • Nathan Rodrigue : Christophe
  • Mathias Renou : Vincent
  • Hugo Conzelmann : Jean-Pierre
  • Félix Armand : Alain
  • Léa Rougeron : Léa
  • Félix de Givry : Christophe
  • India Salvor Menuez : Leslie
  • Martin Loizillon : Rackam le Rouge
  • Simon-Pierre Boireau : Jean-René
  • Laurent Ramacciotti : Vigile / Coach
  • Philippe Paimblanc : Proviseur
  • Alain Gluckstein : Professeur de français
  • Jean-François Ragot : Professeur de philosophie

Fiche technique

  • Réalisation : Olivier Assayas
  • Scénario : Valérie Mréjen et Bertrand Schefer
  • Directeur de la photographie : Eric Gautier
  • Montage : Luc Barnier
  • Production : MK2 Productions
  • Coproduction : Vortex
  • Durée : 122 minutes
  • Dates de sortie : 14 novembre 2012
  • Prix Osella du meilleur scénario à la Mostra de Venise 2012
Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux