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Être et avoir est un film documentaire français réalisé par Nicolas Philibert, sorti en 2002.

Analyse

Un peu partout en France, il existe des écoles à classe unique regroupant des élèves d’âges différents. Celle du film de Nicolas Philibert se situe à Saint-Étienne-sur-Usson (Puy-de-Dôme) et réunit des élèves de 4 à 11 ans. De décembre 2000 à juin 2001, le réalisateur les a filmés pas à pas, au plus près de leur travail, explorant tour à tour leurs doutes, leurs difficultés et leurs enthousiasmes. Et comme pour toute œuvre dramatique, il a fait de Jojo, Marie, Olivier, Nathalie et les autres de vrais personnages, rieurs, tristes ou renfermés. Tous héros d’un émouvant film sur la transmission du savoir.

Le film repose sur une structure dramaturgique linéaire. Comme un bon « metteur en scène » classique, l’auteur prend d’abord soin d’inscrire son histoire dans une géographie rurale bientôt rythmée au gré des saisons et des travaux des champs. Les différents protagonistes sont ensuite hiérarchisés selon un schéma narratif type qui les fait émerger du groupe et les rend parfaitement identifiables : personnages principaux (l’instituteur monsieur Lopez, Jojo...), personnages secondaires, personnages qui émergent (Nathalie) ou qui s’estompent (Axel), ceux qui enfin ne font qu’une apparition. La narration, extrêmement « posée » grâce à son filmage en plan-séquence et à la grande sérénité qui se dégage de l’instituteur, est constituée d’une série de saynètes auxquelles il est amusant de donner un titre (« Axel et ses fantômes », « Deux vilains bagarreurs », « Jojo et son “horizontal” »...).

Les émotions sont nombreuses dans « Être et avoir ». Les « dialogues » puisent souvent à la source de la drôlerie naturelle des enfants et réservent au film de grands moments comiques. Pour autant, la gravité n’en est pas exclue. On se souviendra en particulier de cette scène déchirante de Julien confiant à monsieur Lopez la grave maladie de son père.

Avec sa forme narrative et sa construction, le récit du documentaire se rapproche intensément de la fiction.L’approche du sujet est pourtant d’une discrétion étonnante. Divisé en deux mondes école et monde extérieur, le film est esquissé en quatre saisons, suivant la chronologie du tournage de décembre 2000 à juin 2001. Ces quatre saisons sont quatre ellipses divisant le récit et l’inscrivant dans une temporalité donnée. Mais ce choix de découpage situe constamment la classe face au monde extérieur. L’école trouve son identité comme lieu isolé et protégé de la violence contenue de monde. .

Face au monde, l’école dans sa représentation devient le lieu de réunion, de vie, le centre vital de ses protagonistes. Le plan d’ouverture fait d’ailleurs briller délibérément le lieu par son absence/présence. La séquence suit les élèves en plans généraux, ce sont des petites silhouettes emmitouflées, anonymes qui convergent vers la classe.

Ce n’est qu’une fois à l’école, éclairée et rassurante, que le réalisateur s’autorise les présentations avec les protagonistes. Quelques plans rapprochés dessinent quelques visages, le son capte quelques bribes de phrase et la vie semble reprendre alors son cours. La mise en scène laisse son film et son sujet encore dessiné en filigrane, s’incarner, sans pour autant lui donner les codes du documentaire traditionnel invariablement rattaché à la télévision. Il renonce à toute perspective didactique. L’évolution de la petite troupe devient le véritable sujet du film. Le film affirme d’emblée la subjectivité de son regard dans ses choix futurs.

Le regard de Nicolas Philibert ne se limite pas au petit théâtre de l’école. Pour lui, la vie de famille, moment privilégié des devoirs à la maison, des travaux à la ferme ou de la détente sur un vélo, est importante. Aussi occupe-t-elle une place discrète mais récurrente à l’écran. Sa présence permet d’étendre l’espace de la représentation de la vie des enfants et d’en renforcer considérablement la richesse psychologique.

En privilégiant le rapport étroit maître-élève (grande intimité physique) ou la solitude de l’élève face à son travail et ses difficultés, Nicolas Philibert souligne évidemment les expressions de visage qui, chez l’enfant, épuisent toute la palette émotionnelle. En cela, la caméra adopte la bonne distance et fait quasiment corps avec lui ou avec les différents petits groupes. Elle montre un réel effort pour dépasser les apparences physiques, souligner le travail de la réflexion ou capter l’illumination de la découverte comme une façon de rendre visible ce qui se passe dans la tête de l’enfant.

Distribution

Remarque:Une procédure judiciaire a opposé l'instituteur, personnage principal du documentaire, à la production du film. Georges Lopez revendiquait un droit d'auteur sur le cours donné à ses élèves tel qu'il est reproduit dans le documentaire, un droit d'auteur sur le documentaire lui-même en tant qu'auteur du texte parlé et des droits en tant qu'artiste-interprète du film. Il affirmait aussi que son droit à l'image avait été atteint. Le tribunal de grande instance de Paris a rejeté ses demandes le 27 septembre 2004, car il n'avait pas exprimé ses revendications avant le tournage du documentaire. La cour d'appel de Paris a confirmé ce jugement le 29 mars 2006 en estimant que le cours oral donné à ses élèves ne relevait pas des œuvres de l'esprit protégées par le code de la propriété intellectuelle et que le personnage d'un film documentaire ne peut être considéré ni comme un interprète, ni comme un coauteur car la part de création dans un film documentaire est due aux seuls choix faits par le réalisateur et l'équipe de production. La cour a enfin estimé que l'instituteur avait clairement, quoique tacitement, consenti à l'utilisation de son image dans le film, y compris dans ses utilisations dérivées.

  • Georges Lopez, l'instituteur
  • Alizé, élève
  • Axel, élève
  • Guillaume, élève
  • Jessie, élève
  • Johan ("Jojo"), élève
  • Johann, élève
  • Jonathan, élève
  • Julien, élève
  • Laura, élève
  • Létitia, élève
  • Marie-Elizabeth, élève
  • Nathalie, élève
  • Olivier, élève
  • Franck, élève
  • Kevin, élève
  • Jérome, élève
  • Magali, élève
  • Léa, élève
  • Océane, élève
  • Thomas, élève
  • Valentin, élève
  • Valentin, élève

Fiche technique

  • Réalisation : Nicolas Philibert
  • Production : Gilles Sandoz, Serge Lalou
  • Société de production : Maïa Films, Les Films d'ici
  • Musique originale: Philippe Hersant
  • Photographie : Christian Guy
  • Montage : Nicolas Philibert
  • Pays d'origine : France
  • Durée : 104 minutes
  • Date de sortie : 19 mai 2002
  • Récompense: Prix Louis-Delluc en 2002
Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux