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The Servant est un film anglais, réalisé en 1963 par Joseph Losey AnalyseTony, un jeune et séduisant aristocrate britannique qui vient d'emménager dans un coquet appartement londonien, prend à son service un valet de chambre, Barrett. Ce dernier, discret, compétent, stylé, entoure son maître de prévenances. mais cette correction cache une perversité diabolique, qui va se révéler peu à peu. il persuade Tony d'engager comme bonne à tout faire sa soeur Vera, en réalité sa maîtresse. Le jeune homme accepte et ne tarde pas à succomber au charme vénéneux du couple, négligeant sa fiancée Susan et se laissant bientôt complètement asservir. L'alcool, la drogue, le vice vont le transformer en épave, à l'entière dévotion de ses bourreaux. Comme presque tous les films de Joseph Losey, celui-ci conte l'histoire d'un échec et d'une destruction humaine. il le fait en des termes d'une élégance raffinée. Joseph Losey s'est toujours complu dans l'équivoque. D'une part, en effet, il affirme une volonté de critique sociale, qui va loin : cela se sent dans Haines (1949), vigoureux plaidoyer antiraciste, dans Accident (1967), peinture acide d'un milieu corrompu. Mais en même temps, il prend un plaisir presque malsain à la description d'êtres dépravés, de l'humiliation physique et morale. La complicité charnelle, souvent de nature homosexuelle, la promiscuité des sentiments obsèdent à l'évidence ce dandy décadent, qui a trouvé en Grande-Bretagne son terroir d'élection. Sa technique, d'une grande virtuosité, traque les êtres dans leurs ultimes retranchements, joue sur les pièges du décor et des objets. Harold Pinter a su relever dans l’œuvre de Robin Maugham tout le caractère subversif qui s’en dégage. Il y avait là matière à écrire un film sur la manipulation, sur le monde du dedans et le monde du dehors, sur la fragile frontière entre l’illusion de la sécurité domestique et le caractère humain de la domesticité anglaise, dès qu’elle se trouve à bonne distance d’un regard « du dessus », qui n’est pas sans rappeler l’esclavage. Ainsi, les rapports de force tendent à s’inverser à mesure que l’humanité si parfaitement dissimulée des protagonistes laisse place à une sexualité débridée et apparemment sans limite, aussi bien physique que morale. Cette constante opposition entre ces deux mondes dépendant l’un de l’autre, les aristocrates ont besoin des domestiques pour les servir, et les domestiques ont besoin des aristocrates pour leur permettre de survivre, est très habilement soulignée par la mise en scène de Joseph Losey, ainsi qu’un travail formidable de Douglas Slocombe, directeur de la photographie, qui gratifie le film d’un noir et blanc impeccable et agrémente de nombreuses séquences de ses jeux d’ombres et de miroirs. Le thème de l’apparence, symbolisé par le personnage de domestique modèle de Barrett, sans cesse en représentation de lui-même opère comme une mise en abyme sur le principe même de la comédie. La performance de Dirk Bogarde est magistrale, tantôt impénétrable, tantôt assailli par une foule d’émotions, sans pour autant laisser au spectateur la possibilité d’en cerner une seule avec certitude. Ce jeu souvent déstabilisant, parfois même inquiétant, en ferait presque oublier le travail très discret mais efficace de Losey sur ses personnages, comme par exemple cette caméra toujours en avance sur le récit, et qui s’écarte à mesure que s’approchent les personnages. Losey développe son récit en augmentant de manière croissante la sensation de malaise qui s’exprime chaque fois qu’une confrontation survient entre les personnages, principalement entre Susan et Barrett. L’érotisme de certaines scènes, notamment celle de la cuisine puis celle du fauteuil, est lui aussi de plus en plus présent, tout comme le côté manipulateur des domestiques, habitués à devoir ruser pour s’en sortir. L’aristocratie britannique en ressort bien naïve et bien affaiblie confrontée à ses propres besoins. La dernière partie du film est aussi la plus osée, puisqu’elle montre un homme et son domestique unis par un esprit de camaraderie, parfois proche de l’homosexualité. Une déviance liée à l’émancipation du personnage de Tony qui trouve son aboutissement et ses limites dans la paroxystique scène de fin.
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