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Un si doux visage ( Angel Face) film américain d' Otto Preminger, sorti en 1952.

Analyse

Frank Jessup, un ambulancier, intervient chez la famille Tremayne à la suite d'un accident étrange dont est victime la maîtresse de maison. Catherine Tremayne, riche héritière, victime d’une asphyxie au gaz est femme d’un écrivain un peu raté qui l’a épousée en secondes noces, et soupçonne une tentative d’assassinat, mais faute de preuves tangibles, la police retient la thèse de l’accident. A cette occasion, Frank fait la connaissance de la fascinante Diane , belle-fille de Catherine. Tombé sous son charme et malgré ses fiançailles engagées avec Mary accepte d’être engagé comme chauffeur au sein de cette famille. Diane lui a promis qu’avec l’aide de sa belle mère, qu’elle déteste, elle pourrait l’aider à concrétiser son rêve de monter un garage spécialisé dans les voitures de sport. Il deviennent alors amants mais Diane ne cesse de semer le trouble dans l’esprit de Frank jusqu’à l’inciter à croire que Catherine, par jalousie de la complicité qui l’unit à son père, a essayé de la tuer. Frank n’est pas dupe et lui laisse entendre qu’il pourrait bien s’agir du contraire. Il décide de rompre toute relation avec Diane pour renouer avec Mary. Mais l’envoûtante et mystérieuse Diane va réussir à lui faire changer d’avis et l'entrainer dans un meurtre tragique.

Otto Preminger, viennois d’origine, exilé aux USA en 1935, est depuis dix ans à Hollywood. Depuis la réalisation de son illustre Laura, et suite au succès inattendu de celui-ci, il s’est plus ou moins cantonné dans le genre qui lui a si bien réussi, le film noir. Il reçoit une proposition de la RKO avec une liberté totale, la seule contrainte étant la durée de tournage, à peine 18 jours ! La préparation est réduite au strict minimum et les scènes sont la plupart du temps écrites durant la nuit précédant leur réalisation. La réalisation donne un film noir sans être un polar puisque les éléments constitutifs de ce dernier genre sont peu présents ici : aucun des personnages principaux n’appartient de près ou de loin à la police. Dès la séquence initiale qui voit une ambulance s’enfoncer à toute allure dans la nuit, le spectateur pénètre en un territoire mouvant et étrange à la limite de l’onirisme, dans une histoire diabolique et fascinante unissant deux êtres que tout sépare. Dès le départ, un sentiment de fatalité pèse de tout son poids sur cette œuvre, la marque des plus grands films noirs.

Robert Mitchum interprète un individu taciturne, assez frustre et désabusé qui traîne sa grande carcasse avec résignation, son seul rêve étant de pouvoir posséder un jour un garage ou de s’adonner au sport automobile. Il est fiancé à la jolie Mary mais nous avons du mal à ressentir de l’amour entre les deux, plutôt une complicité. La rencontre de Franck avec Diane va déclencher chez lui un certain regain d’intérêt au milieu de la grisaille qui a l’air de l’envelopper, l’homme blasé se découvre enfin une véritable passion pour une femme. Cette rencontre participe de l’onirisme étrange et dérangeant qui nimbe le film. C’est la musique qui va révéler l’héroïne aux yeux de Frank et du public, le thème étrange et profondément romantique de Dimitri Tiomkin. La caméra suit Mitchum attiré par cette intrigante mélodie au piano qui sort du salon ; il découvre alors une femme au visage d’ange en train de jouer ce thème obsédant.

Diane prend un ascendant sur son partenaire et le gardera. Mais Frank n’est pas un être faible pour autant, il ne sera jamais dupe du jeu et des mensonges de sa maîtresse. Seulement, il se résigne, impuissant à résister aux attraits de cette femme et privé par la même de toute possibilité de choix ; quand bien même, il souhaite prendre une décision, le charme de Diane vient l’en détourner. C’est une sorte de démission, d’envoûtement plus que de la faiblesse. On peut parler d’un climat fantastique et hypnotique tellement les apparitions de Diane, surtout en début de film, sont fantomatiques. Ceci est dû en grande partie aux ellipses de Preminger et ses scénaristes : on la découvre au bar sans qu’on ait su qu’elle allait s’y rendre et n’est même pas dans le champ de la caméra quand elle y pénètre ; on entend seulement la porte s’ouvrir et on voit le regard du barman la remarquer.

En dehors de ces ellipses, l’exemple le plus flagrant de ce climat d’étrangeté est donné par cette très longue scène muette vers la fin où nous voyons Diane déambuler, perdue dans ses pensées, à travers toute la vaste maison, un vrai fantôme. Diane est réellement amoureuse et son amour est possessif mais aussi très pur, elle est prête à s’accuser pour ne pas que son amant finisse en prison. Ce sont les autres, les avocats, qui la poussent à ne pas le faire. Une femme maléfique mais troublante, son amour pour son père est réel et profond. Devant un personnage aussi fascinant que Diane, il est assez aisé de se mettre dans la peau de Frank et de comprendre comment il se laisse entraîner sans rien faire, dans cette fatale descente aux enfers. Le style délié et élégant de Preminger est là pour forcer le spectateur au trouble délice que procure cette perle noire.

Jacques Lourcelles, journaliste, déclare : "Le style délié, élégant, glacial de Preminger, à la fois très proche et très détaché de son sujet, relève autant de la peinture que de la psychologie des profondeurs. La surface et le fond secret de l’œuvre ne font qu’un, sont appréhendés dans une seule visée qui a quelque chose de diamantaire. Au diamant, les films de Preminger empruntent d’ailleurs plusieurs caractéristiques, le brillant, les multiples facettes, la dureté, le mystère".

Distribution

  • Robert Mitchum : Frank Jessup
  • Jean Simmons : Diane Tremayne
  • Mona Freeman : Mary Wilton

Fiche technique

  • Titre original : Angel Face
  • Titre français alternatif: Infernale Beauté
  • Réalisateur : Otto Preminger
  • Scénariste : Oscar Millard, Frank Nugent et Ben Hecht (non crédité) d'après une histoire originale de Chester Erskine
  • Musique originale : Dimitri Tiomkin
  • Directeur de la photographie : Harry Stradling Sr.
  • Montage : Frederic Knudtson
  • Société de production : RKO Pictures
  • Format : Noir et blanc
  • Durée : 91 minutes
  • Dates de sortie : 11 décembre 1952
    • France : 27 mars 1953
Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux