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La Jetée est un film expérimental de science-fiction de Chris Marker, sorti en 1962? et d'une durée de 29 minutes. Ce film est emblématique des débuts de la Nouvelle Vague. Analyse
Pour beaucoup de cinéphiles, ce court-métrage de Chris Marker symbolise un moment crucial dans l’histoire d’un genre finalement très peu représenté, la science-fiction. La Jetée se distingue à plusieurs niveaux. Tout d’abord son esthétique, puisque le film n’est rien d’autre qu’un photo-roman, une succession d’images toutes aussi saisissantes les unes que les autres, à l’éclairage savamment travaillé (notamment l’emploi de la surexposition pour creuser les visages et faire disparaître les regards dans l’ombre), et à la pertinence jamais mise en doute. La voix du narrateur, même si elle en dit parfois un peu trop, renforce le côté réaliste du récit, tandis que la musique de Trevor Duncan contribue à l’atmosphère de tristesse généralisée qui se dégage de ces photos. Nous sommes frappés par une présence forte, sonore et visuelle, telle qu'est l'image du visage de la femme pour le héros. Cette mise en abyme renforce le propos du film : ce qui arrive au héros nous arrive aussi en tant que spectateur et nous interroge encore plus intensément sur le pouvoir de nos propres images fondatrices, picturales, cinématographiques et sonores. La bande-son, signée Trevor Duncan habite l'espace-temps du film mais déborde largement de celui-ci, souligne le très riche texte de Marker, et les deux fondus avec les images, par la précision et la sécheresse du montage, forment un autre souvenir qui hante le spectateur. Mais surtout ce film reste la plus sûre illustration du thème de l'évanescence ou de la rémanence des images : quelle est la place de l'image filmique dans notre mémoire personnelle, collective ? C'est aussi une interrogation profondément cinématographique sur la qualité de vision et d'analyse du spectateur, un thème cher à Dario Argento, certes, mais qui est la marque d'un cinéma à la recherche de ses fantômes, de ses doutes et de son histoire. Pour preuve le seul instant en mouvement du film, introduisant une extraordinaire tension dans le flot d'images fixes : le héros vit quelques moments aux côtés de la femme dont le souvenir du visage le hante depuis son enfance. Juste avant leur dernière rencontre, ils vivent l'amour et la femme entre en un mouvement presque imperceptible soutenu par un bruit violemment strident : c'est un pur moment de suspension dans le temps, un moment de rupture dans le temps du film, un passage : Chris Marker arrive avec des outils cinématographiques simples (montage, fixité, mouvement, bande-son) à tirer au plus haut le propos de son film, sans débauche d'effet. Mais la véritable innovation, hormis l’esthétisme très poussé, c’est que le film est avant tout fait pour faire réfléchir. On s’interroge bien évidemment sur ce qui a pu amener cette troisième guerre mondiale, fatale à la planète, mais surtout sur le passé de ce prisonnier, ou serait-ce son avenir ? Qui est cette femme qui l’obsède ? Que symbolise cette jetée qu’il revoit constamment en rêve ? Peut-être la fin de ses rêves, ou plus certainement, la fin de sa vie. A un autre niveau de lecture on peut également y voir une profonde réflexion sur le musée de la mémoire, dont cette idylle hors du temps est une parfaite illustration. Que doit-on penser de cet empire de rats, survivants de la propre folie de leurs prédécesseurs, des hommes réduits à demander de l’aide à ceux qui veulent les oublier. Ce film a inspiré L'Armée des douze singes? de Terry Gilliam, Les Frissons de l'angoisse? de Dario Argento? et a fortement marqué Mamoru Oshii?. Voir le filmRegarder le film légalement et gratuitement sur Google vidéo Distribution
Fiche technique
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