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Lady Chatterley est un film français de Pascale Ferran, sorti en 2006.

Analyse

L'action se déroule dans les années 20, en Angleterre. Après la première guerre mondiale, Sir Chatterley, aristocrate anglais grand teint, en est revenu paralysé, désormais contraint de se déplacer en fauteuil roulant. Cet homme réduit dans sa virilité partage son temps entre l'amertume des conversations entre anciens combattants et la gestion crispée de ses privilèges de classe dans l'usine qu'il dirige.

Confinée dans leur vaste domaine, soumise au puritanisme doublement décrépit d'un homme dont les valeurs, en même temps que son corps, viennent d'être invalidées par le carnage de la guerre, sa femme s'évade de plus en plus souvent en forêt. Elle y rencontre Parkin, le garde-chasse, et finit par s'éprendre passionnément de cet homme d'extraction modeste, aussi secret qu'entier, cette dernière qualité étant en la circonstance non négligeable.

D’où de grands moments d’érotisme, et, dans l’imaginaire collectif, une héroïne peu à peu réduite à une symbolique d’adultère aristocratique, perverse et fricotant avec le petit personnel. Les nombreuses adaptations ou variantes cinéma, de la version de 1955 signée Marc Allégret avec Danielle Darrieux à la bluette érotico-kitsch de Just Jaeckin, avec Sylvia Kristel, en 1981, ont renforcé cette imagerie, chacun à leur manière.

L'histoire est connue et fait l'objet de nombreux autres films : celui de l'amour contrarié entre deux personnes que leur origine sociale sépare. Mais, cette fois-ci, Pascale Ferran rend à Constance Chatterley ce qui lui appartient, ou plutôt ce qu’elle s’approprie peu à peu dans le roman : la liberté.

Car c’est bien de cela qu’il s’agit : une femme qui s’évade pour aller à la rencontre d’elle-même. De la clarté grise, étouffée des pièces du château au miroitement de la forêt environnante, le film se construit minutieusement sur ce franchissement.

Sur ce va-et-vient entre le dedans et le dehors, entre l’épouse résignée et la promeneuse qui s’enhardit, bientôt amante éblouie. C’est comme un thème musical, un refrain auquel Pascale Ferran ajouterait progressivement quelques notes de plus. La traversée de la forêt, répétée encore et encore, structure le récit autant que le personnage : chaque fois, Constance doit repartir de zéro, refaire les pas, y compris dans sa relation physique et affective avec Parkin, le garde-chasse.

La transposition de Pascale Ferran ne tire pas ses qualités du parfum de scandale provoqué, à l'époque, par la charge érotique du roman. Resserré autour de la relation entre les deux amants, le film tient au contraire tout entier dans la manière, admirable, dont est mis en scène leur insensible rapprochement, surmonté le grand écart social, culturel et physique qui fonde la mutuelle attirance de la belle fiévreuse et de la brute suspicieuse.

Le film est littéralement éclairé par cette femme-enfant redécouvrant la vie, faisant l'amour comme pour la première fois, pas toujours bien, maladroitement, mais de mieux en mieux, se dénudant pas étapes, s'affirmant par pallier. Pascale Ferran à la délicatesse de laisser croire au classicisme: chaque scène de trouble est ainsi filmée comme étant potentiellement la dernière, chaque pas en avant fait ainsi craindre le brutal retour vers l'arrière. Mais la découverte du pot-aux-roses reste potentielle, le poids traditionnel du mariage, l'amour impossible, ou sa non-réciprocité: autant de pièges du drame adultère. Ferran les contourne, préfère laisser filer l'amour et laisser les amoureux seuls en face de désirs mais aussi de leurs faiblesses.

On aura très rarement vu au cinéma l'amour et le sexe, la réticence et l'abandon, l'attente et la jouissance, le sentiment et la chair aussi bien filmés qu'à travers le lent apprivoisement de cet homme et de cette femme, pour cette raison qu'ils sont manifestement pensés, et donc filmés, ensemble. La beauté primitive et sensuelle qui habite le film, l'attention qu'il porte à la nature et à la matérialité des choses, aux couleurs, aux tons et aux rythmes changeants à travers lesquels se noue et se consomme la rencontre entre ces deux personnages, tout cela contribue à rendre caduques les questions de morale et de pudeur qui se posent ordinairement en la matière.

Le prix Louis-Delluc 2006 a été décerné, lundi 18 décembre 2006, à Paris, à ce film.

Pascale Ferran a déclaré "accueillir ce prix, décerné par la critique la plus glorieuse, avec une joie immense et un soulagement proportionnel à une peur rétrospective". "Je suis touchée que ce film ait atteint le public, en lui parlant au creux de l'oreille. Il a été difficile à mener à bien et a demandé un très grand engagement à tous, comme un marathon. J'ai eu atrocement peur que le film soit très en dessous de ce que j'en rêvais", a ajouté la cinéaste. Au nom du jury, Gilles Jacob a salué en Lady Chatterley un "film d'une grande sensibilité, avec une émotion à l'état pur et une façon savante de faire du cinéma". Le jury a souhaité aussi "aider une jeune réalisatrice". "Faire des films est de plus en plus difficile", a ajouté le président du jury.

Distribution

  • Marina Hands : Lady Chatterley
  • Jean-Louis Coullo'ch : Parkin
  • Hippolyte Girardot : Clifford
  • Hélène Alexandridis : Mrs. Bolton
  • Hélène Fillières : Hilda
  • Bernard Verley : Le père de Constance
  • Sava Lolov : Tommy Dukes
  • Jean-Baptiste Montagut : Harry Winterslo
  • Michel Vincent : Marshall
  • Christelle Hes : Kate
  • Joël Vandael : Field, le chauffeur

Fiche technique

  • Réalisation : Pascale Ferran
  • Scénario : Roger Bohbot, Pascale Ferran, Pierre Trividic, d'après L'Amant de lady Chatterley, roman de David Herbert Lawrence, écrit en 1928.
  • Directeur de la photographie : Julien Hirsch
  • Compositeur : Béatrice Thiriet
  • Montage : Mathilde Muyard, Yann Dedet
  • Durée :158 minutes (2h 38)
  • Date de sortie: 1er Novembre 2006

Récompenses:

Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux