Recherchez sur ce site

Sommaire (edit)

Le cinéma

Liens

Développé grâce à: pmwiki.org

Changements Récents Version imprimable Edition

Les Idiots (Idioterne) est un film danois réalisé par Lars von Trier et sorti en 1998.

Analyse

Le film a pour sujet un groupe d'adultes anti-bourgeois qui passent leur temps à chercher leur « idiot intérieur », en libérant leurs inhibitions et en se comportant comme s'ils étaient mentalement retardés en public, par conséquent provocant l'opinion de la société, le politiquement correct. Ils estiment que la société dans son ensemble traite leur intelligence de façon non créative et sans défis. Ainsi, ils cherchent l'humiliation et les situations dégradantes.

  • Devise 1 : « Vous êtes un complet idiot, et plus idiot que vous ne le pensez ».
  • Devise 2 : « Un film par des idiots, sur des idiots, pour des idiots ».

Karen, assise dans un restaurant chic, observe une jeune femme, Susanne, qui essaie de faire manger proprement deux hommes, handicapés mentaux. L'un d'eux, Stoffer, se prend d'affection pour Karen. L'autre, Henrik, perturbe le repas. Agacé, le garçon leur demande de partir. Karen les accompagne. Dans le taxi, elle comprend que Stoffer et Henrik ont joué les idiots. Elle est involontairement impliquée dans le jeu de ce petit groupe dont le but est de confronter la société à leurs idioties. En compagnie des autres membres, Ped, Miguel, Axel, Jeppe et Joséphine, elle visite une usine.

Karen s'installe chez eux, dans cette grande maison à la campagne, qui appartient à l'oncle de Stoffer. C'est au cœur de cette demeure, pourtant mise en vente, qu'ils passent leur temps à explorer les formes de l'idiotie. La communauté joue les débiles à la piscine, puis à Copenhague. Vulnérable, Karen se pose des questions. Elle s'interroge sur le bien-fondé de ces expériences, tout en reconnaissant être heureuse de vivre là. Un couple de bourgeois vient visiter les lieux, prêt à acheter. Avec la complicité d'enfants trisomiques d'une institution voisine, Stoffer les en dissuade.

Un jour, une partie fine est organisée avec l'accord plus ou moins tacite des participants. Le lendemain, le père de Joséphine vient rechercher sa fille. Malgré l'hostilité des membres, elle est obligée de repartir. Pour ne pas lui avoir déclaré son amour à temps, Jeppe se jette sur le capot de la voiture, mais en sort indemne. L'irascibilité et l'empreinte de Stoffer pèsent de plus en plus sur le groupe. Cette fois, il veut aller encore plus loin. Il faut que chacun d'eux soit capable de rentrer chez ses proches et de jouer les débiles, dans sa famille ou au travail. Axel s'en va. Henrik retrouve un comportement normal à l'extérieur. Le jeu touche à sa fin. Accompagnée de Susanne, Karen rentre chez elle. Elle retrouve ses sœurs, sa mère et son grand-père. Karen a disparu la veille de l'enterrement de son petit garçon, âgé d'un an à peine. Anders, son mari, arrive. La famille prend le café. Karen fait l'idiote. Anders la gifle violemment. Son épouse accuse le coup. Elle prend la main de Susanne.

Filmé en application de « Dogme 95 », le film présente une facture documentaire avec les maladresses du cinéma-vérité. Ici pas de structure narrative ostensiblement forte comme dans Breaking the Waves. Le film est seulement structurée par le trajet de Karen. Car tout prend sens du malheur de Karen dont le visage ressemble à un masque tragique. Ses interventions brèves structurent le film en le ponctuant selon une certaine logique.

Elle essaye d’abord de téléphoner par deux fois chez elle. Puis elle résiste maladroitement à la fantaisie et à la gaieté du groupe comme si elle assumait encore la rigidité familiale. Mais finalement c’est elle qui va le plus loin dans la transgression sociale. Voici ce qui paraît lui en donner la force : à la mort de son enfant Karen a pris conscience du vide de son existence et de l’étouffement familial dont rendent compte les images de l’appartement étriqué. Le comportement hostile de sa famille montre une incompréhension totale. Son geste insensé de mère renonçant à l’enterrement de son enfant va trouver sa légitimation dans la transgression commune des limites à laquelle s’efforcent les idiots amateurs.

La notion d’une communauté compatible avec son malheur est essentielle pour cette femme qui a perdu tous ses repères affectifs. Réciproquement, l’expérience des Idiots trouve dans le tragique sa véritable raison d’être. « Libérer l’idiot qui est en nous », « être fier de son idiot » comme ils se le proposaient, paraît individualiste et dérisoire. La mobilité extrême de la caméra vidéo fait aussi penser à un mouvement fou. Mais le réel n’en est que plus inflexible. Vous aurez beau faire zigzaguer la caméra dans tous les sens : le réel est ce qui revient toujours à la même place. Donner une configuration morale à l’agitation de l’idiotie, et une structure narrative à l’improvisation, c’est dresser un monde moral qui nous prémunisse contre la force aveugle du monde extérieur. Se construire moralement suppose, contre le poliyiquement correct, une lutte terrible qui passe par l’expérience de l’excès.

Distribution

  • Bodil Jørgensen : Karen
  • Jens Albinus : Stoffer
  • Anne Louise Hassing : Susanne
  • Troels Lyby : Henrik
  • Nikolaj Lie Kaas : Jeppe
  • Louise Mieritz : Josephine
  • Henrik Prip : Ped
  • Luis Mesonero : Miguel
  • Knud Romer Jørgensen : Axel
  • Trine Michelsen : Nana
  • Anne-Grethe Bjarup Riis : Katrine
  • Paprika Steen : l'acheteuse potentielle
  • Erik Wedersøe : Svend, l'oncle de Stoffer
  • Michael Moritzen : L'employé municipal
  • Anders Hove : Le père de Joséphine
  • Claus Strandberg : L'homme à l'usine
  • Hans Henrik Clemensen : Anders, le mari de Karen
  • Lone Lindorff : La mère de Karen
  • Erno Müller : Le grand-père de Karen
  • Regitze Estrup : Louise, la sœur de Karen
  • Lotte Munk Fure : Britta, La sœur de Karen
  • Marina Bouras : La femme d'Axel
  • Julie Wieth : La femme avec deux enfants

Fiche technique

  • Titre original : Idioterne
  • Réalisation : Lars von Trier
  • Scénario : Lars von Trier
  • Opérateurs : Lars von Trier, Kristoffer Nylhom, Jesper Jargil, Casper Holm
  • Montage : Molly Malene Stensgaard
  • Musique originale: Kim Kristensen
  • Durée : 117 minutes
  • Format : Tourné en vidéo puis transféré en 35 mm
  • Dates de sortie :
Reproduction possible des textes sans altération, ni usage commercial avec mention de l'origine. .88x31.png Credit auteur : Ann.Ledoux