Sommaire (edit)Le cinéma
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Une vie est un film français d'Alexandre Astruc, adapté du roman homonyme de Guy de Maupassant et sorti en 1958. AnalyseLe film est tiré du premier roman de Guy de Maupassant, publié en 1883, qui présente un tableau de la condition féminine au XIXe siècle, à travers le destin de Jeanne. Cette histoire nous montre en détail les étapes successives de la déchéance de cette jeune aristocrate entre 1819 et 1848. Tout s'effrite peu à peu, dans cet univers sans espoir. Une vision pessimiste, du monde et d'une société marquée par le Code civil et l'inégalité des sexes. Une réflexion sur la marche de l'Histoire qui s'inscrit dans la lignée de fictions historiques, très répandues au XIXe siècle. Dans une gentilhommière d'Yport, en Normandie, Jeanne Dandieu est élevée entre ses parents dans un milieu fermé où elle ne connaît que les paysannes des environs, en particulier sa domestique, Rosalie. Sa barque s'étant renversée dans la tempête, elle est sauvée de justesse par des pêcheurs et, abordant au port, elle fait la rencontre de Julien de la Mare. Les assiduités de ce jeune homme taciturne aboutissent au mariage, dans la joie de tous. Les désillusions viendront bientôt, Julien n'aimant pas vraiment Jeanne et se créant de plus en plus une vie à part de chasseur et de propriétaire terrien. Ils font bientôt chambre à part, mais un jour Jeanne surprend Rosalie, qui va enfanter. Elle accueille ce fils naturel avec délicatesse, mais ses soupçons croissent de jour en jour et elle finit par savoir que c'est Julien qui l'a trompée avec sa servante. Prête à se suicider, Jeanne sombre dans un profond état de prostration. Un docteur venu la consulter lui apprend alors qu’elle attend un enfant. Sa grossesse se déroule tristement et elle accouche dans de terribles souffrances ; déçue par le mariage, Jeanne témoigne un amour excessif à son fils, Paul. Quelques temps après, Jeanne surprend de nouveau son mari dans les bras d'une autre femme, mais se sent d’autant plus trahie qu'il s'agit de la comtesse de Fourville, une de ses amies. Peu après, sa mère meurt et Jeanne trouve dans les papiers de la défunte des lettres prouvant que sa mère a entretenu une relation adultère avec un ami de la famille. Paul, lui, connaît de graves problèmes de santé et Jeanne craignant de se retrouver seule voudrait un autre enfant. Le comte de Fourville, s’étant rendu compte de la relation qu’entretenait sa femme avec Julien, les tue tous les deux. Entre temps, Jeanne accouche d’une fille morte née. Paul, sa seule consolation, grandit, aimé de tous, et poursuit des études très médiocres. Il fugue à Londres et se contente d’écrire à sa mère en lui promettant régulièrement son retour et en profitant pour lui demander de l’argent. Jeanne ayant pardonnée à Rosalie, celle-ci retourne aider son ancienne maîtresse et découvre son épouvantable situation financière qui la force à vendre la demeure familiale. Avec Rosalie, elle se retire dans une modeste demeure tandis que Paul annonce son mariage avec une femme de piètre condition. Cloîtrée dans sa solitude, Jeanne ressasse continuellement ses vieux souvenirs. Un jour, apprenant que la femme de Paul est gravement malade, Jeanne accepte de prendre soin de leur petite fille sur qui elle déverse toute son affection si longtemps retenue. Ce film nous montre en détail les étapes successives de la déchéance de cette jeune aristocrate entre 1819 et 1848. Tout s'effrite peu à peu, dans cet univers sans espoir. Une vision pessimiste, du monde et d'une société marquée par le Code civil et l'inégalité des sexes. Une réflexion sur la marche de l'Histoire qui s'inscrit dans la lignée de fictions historiques. Le roman a été adapté à l'écran à nouveau en 2005 par Claude Chabrol, avec Barbara Schulz dans le rôle de Jeanne. Critique de Jean-Luc Godard Il faut admirer Une Vie :Le manège décoré par Walt Disney, le déjeuner sur l'herbe avec nappe en simili plastique, le vert chewing-gum d'une pelote de laine: on s'en fout. Toutes les fautes de goût accumulées par Astruc, Claude Renoir et Mayo, on s'en fout. Du saxophone de Roman Vlad aussi. Il n'est pas mal, d'ailleurs. Mais de toute façon la vraie beauté d'Une vie est ailleurs.
Elle est dans la robe jaune de Pascale Petit qui frissonne dans les dunes gris-Vélasquez de Normandie. C'est faux! Pas gris-Vélasquez! Et même pas gris-Delacroix, s'égosillent les «connaisseurs». ( ... )
Peu importe que la version actuellement proposée dans les salles ne corresponde plus à celle que prévoyait le découpage. Peu importe que chaque scène soit systématiquement stoppée au montage en plein élan. Il faut admirer Une vie tel quel. Et, tel quel, Une vie se présente comme le contraire d'un film inspiré. La folie derrière le réalisme, disait Astruc dans une interview.
Mais on l'a mal compris. La folie de Julien, c'est d'avoir épousé Jeanne, et celle de Jeanne d'avoir épousé Julien. Un point cest tout. Il ne s'agissait pas de tourner la Folie du docteur Tube, mais de montrer qu'un homme des bois et une femme d'intérieur qui s'aiment, c'est de la folie. À vrai dire, Une vie décontenance les plus chauds partisans d'Astruc, comme le Plaisir avait décontenancé ceux qui croyaient connaître Maupassant. En effet, alors que l'on attendait Astruc le lyrique, ce fut Astruc l'architecte qui survint. ( ... )
Tout comme Amère victoire, Une vie est un film formidablement simple. Et simplifier ne veut pas dire styliser. Astruc s'oppose ici à Visconti auquel il serait idiot de le comparer. Dans Nuits blanches, Maria Schell était certes plus efficacement utilisée. Mais dans Une vie, elle l'est de façon plus juste et plus profonde. En son temps, Maupassant était sans doute un auteur moderne. Paradoxalement donc, la meilleure façon de trouver le vrai ton dix-neuvième siècle, c'était de donner à l'affaire un ton franchement 1958. Astruc et Laudenbach y ont réussi magnifiquement. je n'en veux pour preuve que l'admirable réplique de l'admirable Christian Marquand à la femme qui lui a offert sa dot et son château: «À cause de toi, j'ai gâché ma vie. » ( ... )
Au seuil de l'inconnu, tel pourrait être le titre d'Une vie plutôt que celui d'un film de science-fiction. Car Une vie force le cinéma à porter ses regards ailleurs.
Jean-Luc Godard, Cahiers du cinéma, novembre 1958
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